Droite Française : les liaisons dangereuses
Par N.TPublié le
La recomposition de la droite passe par des hommes et des associations. Du Club de l'Horloge à Radio Courtoisie en passant par les dirigeants et autres conseillers de l'U.M.P. et du F.N. Revue de détail.
Entreprendre la filature de la recomposition de la droite s'apparente à un voyage dans un monde parallèle où tout n'est qu'apparence et faux-semblants. L'UMP et La Droite Populaire, le Mouvement Pour la France de Philippe De Villiers, Le FN et le MNR (Bruno Mégret), la Nouvelle Droite Populaire, le Parti de la France (Carl Lang) et autres officines plus ou moins occultes composent un tableau en trompe l'œil de la droite française. Leur objectif est clair : défendre, maintenir et développer les intérêts de la classe dominante, de la finance et des capitalistes.
La plupart des dirigeants de la droite classique actuelle sont passés par l'extrême droite. Guy Teissier (UMP), président de la Commission Défense à l'Assemblée Nationale a fait ses armes à Unité nationaliste, Alain Madelin, Patrick Devedjian, Gérard Longuet (actuel ministre de la Défense), Hervé Novelli, ont été des animateurs d'Occident, organisation d'extrême droite, dissoute en 1968, et qui renaîtra sous le nom d'Ordre Nouveau, base de construction du Front National. Entre deux opérations commandos contre des militants de l'Unef, de l'Union des Etudiants Communistes et autres gauchistes, ils militent, entre autres, pour la suppression du suffrage universel. Ils ont tous été des ministres de Jacques Chirac, Edouard Balladur ou Nicolas Sarkozy. Au gré des circonstances politiques, de nombreux cadres font la navette entre le RPR et le Front National.
Erreurs de jeunesse direz-vous. Pas à ce niveau là. Nous retrouvons le même mécanisme, la même méthode aujourd'hui. Ainsi, dimanche 22 avril, au soir du premier tour de l'élection présidentielle, sont apparus des petits nouveaux tels que Nicolas Bay et Guillaume Peltier, la trentaine bien tassée. L'un est porte-parole et conseiller politique de Marine Le Pen, l'autre de Nicolas Sarkozy. A première vue, rien ne les rapproche. Ce n'est qu'une apparence. Ils ont tous les deux fait leurs armes au Front national de la Jeunesse (FNJ) où ils ont créé, ensemble, l'association Jeunesse Action Chrétienté, militant contre le PACS, l'euthanasie et le droit à l'avortement.
En 2007, Nicolas Bay quitte le FN pour le MNR de Bruno Mégret. En 2009, sentant sans doute le vent tourner avec l'émergence de Marine Le Pen, il retourne à la maison mère, le FN. Guillaume Peltier quitte le parti de Jean-Marie Le Pen en 2001 et se fond dans le Mouvement Pour la France de Philippe De Villiers jusqu'en 2008. En 2009, il rejoint l'UMP de Nicolas Sarkozy. Ils ont pour l'instant, calé leur carrière politique.
C'est un élu du Mouvement Pour la France, Paul-Marie Couteaux qui présente Florian Philippot à Marine Le Pen. Cet ancien militant nationaliste de gauche d'une trentaine d'années, diplômé d'HEC et de l'ENA, haut fonctionnaire de l'Inspection générale de l'administration, devient le médiatique porte-parole et conseiller politique de la candidate du Front National.
Club de l'Horloge...
Tout ce beau monde se retrouve dans divers laboratoires idéologiques tel le Club de l'Horloge. Ce cercle de réflexion politique, créé en 1974, est d'orientation libérale et conservatrice. Il défend les valeurs chrétiennes. Il a été fondé par Henry de Lesquen, un haut fonctionnaire ancien secrétaire général de l'OPAC de Paris sous Jacques Chirac, membre du RPR de 1977 à 1985. A partir de 2001, il roule pour lui-même à travers l'Union pour le Renouveau de Versailles et "Voix Françaises 95" pour la "résolution de nos problèmes d'immigration".
Sur l'acte de fondation on trouve également Jean-Yves Legalou, ex membre de l'UDF, ancien adjoint de Patrick Devedjian à la maire d'Antony. En 1985, il adhère au Front National avec Bruno Mégret, qu'il suivra par la suite au MNR. Yvan Blot est membre du RPR de 1978 à 1989, date à laquelle il rejoint le Front National qu'il quittera à la fondation du MNR. Il a parrainé l'adhésion de Bruno Mégret au RPR, avec qui il favorise la rupture du RPR avec la ligne gaulliste, jugée trop socialisante.
Le Club de l'Horloge regroupe des cadres, des hauts fonctionnaires, des intellectuels, des hommes politiques et des universitaires français de droite et d'extrême droite. Cette élite prône une "union de la droite, en faisant entrer le Front national dans une alliance de gouvernement". Se réclamant d'un national-libéralisme, il cherche à réconcilier le libéralisme économique avec l'identité nationale et les valeurs républicaines.
Le concept de "Nouvelle droite" est essentiellement nourri par deux courants : le Club de l'Horloge, d'essence national-libérale et le GRECE (Groupement de Recherche et d'Etudes pour la Civilisation Européenne) préconisant un nationalisme révolutionnaire.
Pour diffuser ses idées, nous retrouvons les membres et les dirigeants du Club de l'Horloge à la tête de Radio courtoisie, présidée par Henry de Lesquen. Elle se veut être "la radio libre du pays réel et de la francophonie", d'inspiration maurassienne par la référence au pays réel. En politique, elle ratisse tout le spectre de la droite "de François Bayrou à Jean-Marie Le Pen". Le dimanche Radio Courtoisie devient "Lumière de l'espérance", la radio des catholiques intégristes de Saint-Nicolas du Chardonnet et de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X.
Les droites, UMP et FN confondus, exacerbent le "choc des civilisations" en attaquant frontalement l'islam et les musulmans au nom de la défense de l'identité française, chrétienne avant tout, selon elles. Il n'y a que l'épaisseur du bulletin de vote Sarkozy entre le positionnement de l'UMP et celui du FN sur la question de l'immigration et de la sécurité. De Nicolas Sarokozy à Marine Le Pen, ils sont d'accord sur l'essentiel : défendre les intérêts de la bourgeoisie et le capitalisme. Ils ont en commun la haine du peuple et la peur du rouge.
Comme l'écrivait Simone de Beauvoir dans Les temps modernes : "La vérité est une, l'erreur est multiple. Ce n'est pas un hasard si la droite professe le pluralisme."
A lire, sur Médiaterranée, les deux premiers épisodes de notre saga : "Composition et recomposition d'une droite en décomposition".