Front de gauche, de Jean-Luc Mélenchon : une histoire d'amour qui vire mal entre le PCF et le PG ?
Par nicolas éthèvePublié le
Coup du sort ou effet boomerang ? Alors que Jean-Luc Mélenchon, candidat à l'élection présidentielle pour le Front de Gauche, constitué par le Parti de Gauche (PG) et le Parti Communiste Français (PCF), se prépare à chauffer l'ambiance électorale au cours d'un meeting qui se tiendra ce mercredi soir, à 20h, au Parc des expositions de Montpellier, Marianne 2 publie aujourd'hui un article qui agite le web.
Et pour cause, au détour d'un titre qui pose cette question brute de décoffrage « Et si Mélenchon était le dindon de la farce ? », l'article du journaliste Gérald Andrieu met à jour les importantes divisions qui fissurent le Front de Gauche, avec, d'un côté, un PCF qui serait, comme l'autre partenaire historique de la « gauche plurielle », Europe Ecologie Les Verts (EELV), en négociation avec le PS et son candidat à l'élection présidentielle François Hollande à propos des candidatures aux élections législatives « sur une cinquantaine de circonscriptions où il y aurait un risque Front national » ; et de l'autre, un PG littéralement exclu de ces discussions.
Lettre au PS
Cerise sur le gâteau, Marianne 2 publie, comme pièce à conviction, un courrier de Eric Coquerel, le négociateur du Parti de Gauche, qui a adressé ce mardi une lettre à Christophe Borgel, le secrétaire national du PS chargé des élections et des fédérations. Un courrier du PG qui peut se résumer ainsi : « Dans plusieurs circonscriptions, pèse un danger d’élimination de la gauche au premier tour au profit d’un duel FN/droite au second. Nous savons que des discussions existent avec d’autres partis. Le Parti de Gauche n’a jamais été pour la politique du pire face au FN. (…) Nous souhaitons donc savoir si (…) vous maintenez votre refus d’une discussion nationale sur ce sujet ».
Créé début 2009, suite au rejet de la motion qu'il défendait au congrès de Reims tenu en 2008 par le PS (un parti pour lequel Jean-Luc Mélenchon a notamment été ministre délégué à l'Enseignement professionnel du gouvernement Lionel Jospin de 2000 à 2002, suscitant, au passage, d'importantes grèves dans le monde de l'enseignement), le Parti de Gauche a été fondé dès l'origine dans l'esprit de l'organisation allemande « Die Linke » (« la gauche »), qui a remporté de belles victoires électorales outre-Rhin et inspiré à Jean-Luc Mélenchon l'idée de la consécration d'un tel mouvement, version française.
Un parti qui s'imposerait sur la scène politique hexagonale face au Parti Socialiste (PS), leader historique de la gauche française. D'où les nombreuses attaques qu'a toujours ourdies Jean-Luc Mélenchon contre le PS, depuis sa prise du maquis « anti-libéral », opérée lors du débat national survenu en 2005 sur le traité constitutionnel européen.
Une histoire de bâtons et de carottes
Des attaques toujours d'actualité comme le montre encore ce matin la lecture du Midi Libre, le quotidien régional du Languedoc-Roussillon, où le candidat à l'élection présidentielle présenté par le Front de Gauche tacle une nouvelle fois le PS, au détour d'une problématique locale, et avec ses petites phrases dont il a l'art, en très bon orateur qu'il est : « Lorsque j’étais au PS, nous avions à souffrir des méthodes déplorables de la fédération de l’Hérault, dirigée par M. Navarro, [ancien premier secrétaire de la fédération socialiste de l'Hérault, Ndlr]. A l’époque, nous avions plusieurs fois dénoncé ces méthodes avec mon camarade René Revol [maire PG de Grabels (Hérault) et conseiller de Montpellier Agglomération, Ndlr]. Mais la direction nationale n’en a tenu aucun compte. Le système socialiste dans l’Hérault est totalement vermoulu, la gauche doit se ressaisir et je pense que le Front de gauche sera la réponse face à un PS qui est désormais épuisé en Languedoc-Roussillon ».
Quelques colonnes plus haut, Jean-Luc Mélenchon avait paradoxalement répondu ceci, en réponse à une autre question du journaliste Philippe Mouret qui lui demandait si un accord avec le PS était envisageable dans le cadre du deuxième tour de l'élection présidentielle : « Si je suis au second tour, je suis prêt à dialoguer avec le PS pour obtenir le plus large rassemblement. Mais on sait déjà que si le PS arrive en tête, François Hollande n’a pas l’intention de discuter. (...) Je le mets en garde contre les idées toutes faites. L’époque des patrimoines électoraux est révolue... 20 % de l’électorat n’est pas fixé et peut basculer à tout moment. »
L'arroseur arrosé ?
L’arroseur arrosé ? Cela y ressemble fort pour un « Jean-Luc Mélenchon qui (…) répète depuis des semaines qu’il ne participera ''à aucun autre gouvernement que celui [qu’il dirigerait]'' », comme le souligne Marianne 2... Mais le pire n'est pas là, pour le Front de Gauche, dans cet épisode médiatique. Il réside dans la mise en lumière du monde qui sépare très tangiblement, au sein du PG et du PCF, les partisans du Front de Gauche et ceux qui, du côté du PCF, refusent de voir leur « appareil » idéologique et leurs « postes » d'élus totalement vampirisés au profit de la stratégie du PG, orchestrée par la figure charismatique de Jean-Luc Mélenchon. De là à se dire que tout ce joli monde se tire une balle dans le pied, il n'y a qu'un pas... Comment peut-on en effet prétendre rassembler l'ensemble de la nation française, quand on s'avère incapable de s'entendre dans son propre camp ? Début de réponse le 22 avril 2012 prochain pour le premier tour de l'élection présidentielle française...
Voir la vidéo du meeting de Jean-Luc Mélenchon, à Montpellier :