Quelle Euroméditerranée en 2030 ?
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A quoi pourrait ressembler la région euroméditerranéenne à l'horizon 2030 ? Dans leur rapport « Scénarios d'évaluation et de transition vers une Euroméditerranée durable en 2030 » que Mediterranean Prospects a publié en juillet dernier, c'est à cette question que Rym AYADI, chercheuse au Center for European Policy Studies, et Carlo SESSA, président de l'Institute of Studies for the Integration Systems, ont tenté de répondre.
Et ils s'y sont employés en cherchant à évaluer les conséquences de plusieurs scénarios de développement socio-économique et d'intégration régionale dans les pays du sud et de l'est de la Méditerranée (Algérie, Egypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Palestine, Syrie, Tunisie, Turquie) à partir de l'adaptation d'un modèle qui prend en compte les interactions entre l'économie, les systèmes d'énergie et l'environnement.
Si l'on excepte le scénario de statu quo, « business as usual », ce canevas dessine trois perspectives identifiées comme transitions « rouge, verte et bleue », les deux dernières n'étant pas cependant pas exclusives l'une de l'autre.
Dans le scénario rouge, que résume l'expression « la zone Euroméditerranée sous la menace », la Méditerranée deviendrait une ligne de fracture civilisationnelle. Les conflits épisodiques pourraient devenir constants et se diffuser d'un pays à un autre entraînant des tensions et difficultés économiques et sociales favorables à l'immigration illégale voire au terrorisme et, in fine, préjudiciables au développement de chacun d'eux.
Dans le scénario vert, les auteurs envisagent la création d'un véritable marché commun entre l'Union Européenne et les pays du sud et de l'est de la Méditerranée. Un cadre qui permettrait selon eux une véritable intégration et la mise en œuvre d'actions dans les domaines clés de la recherche et du développement, du commerce, de l'énergie, de l'eau et des migrations.
Et dans le bleu, ils imaginent une simple alliance entre groupes de pays déjà constitués en organisations, comme la Ligue Arabe ou l'Union du Maghreb Arabe, ou sous-régions méditerranéennes et l'Union Européenne. Le sud, l'est et le nord de la Méditerranée entreraient alors dans des relations de coopération autour de thèmes comme le dialogue politique, la sécurité, l'éducation et l'emploi, le commerce et le codéveloppement, les migrations circulaires, la recherche et la technologie, les infrastructures, l'énergie et les télécommunications, l'agriculture, l'alimentation et l'eau potable, la prévention et la gestion du changement climatique.
Si la Commission Européenne a admis la nécessité de consolider le partenariat avec les pays tiers et modifier sa Politique Européenne de Voisinage, cette dernière approche est qualifiée par Mme AYADI et M. SESSA de susceptible de maintenir une situation de statu quo, sans vision cohérente.
La position de l'Union Européenne : bilan et perspectives
Selon ce rapport, en plus de 40 ans avant les mouvements arabes, l'Union Européenne n'a pas su conduire une démarche efficace de rapprochement des pays du sud et de l'est de la Méditerranée. Cependant, l'UE a réaffirmé son attention aux questions de droit, de liberté, de citoyenneté et d'équité tout en indiquant conserver une approche adaptée et gagée sur des avancées en termes de gouvernance démocratique et de développement économique et social de ses voisins.
Avec le risque que la situation n'évolue pas vraiment vers les deux scénarios optimistes vert et bleu, analysent les auteurs. Précisant que la région est en même temps en proie à une instabilité polarisante qui pourrait l'entraîner en direction du scénario rouge.
Ils appellent donc de leurs vœux une communauté transméditerranéenne pour contribuer à l'émergence d'un monde tripolaire constitué des USA, de la Chine et de l'Euromed.
Mediterranean Prospects
Mediterranean Prospects est un regroupement de chercheurs de haut niveau soutenu par le 7e Programme Cadre de Recherche et Développement de la Commission Européenne (2007-2013) et piloté par le Center of European Policy Studies, situé à Bruxelles.
Il a pour mission d'offrir une base éclairée aux débats et décisions au sein de l'Union pour la Méditerranée ainsi que dans le cadre de la Politique Européenne de Voisinage dans les domaines de la gouvernance démocratique et du développement économique et social.