Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a déclaré hier que l'emploi d'armes chimiques contre la population civile en Syrie était "inexcusable" et "indéniable", et que le président Barack Obama allait prendre une décision bien étudiée sur la façon d'y répondre. "Le massacre aveugle de civils, la tuerie de femmes et d'enfants et de passants innocents par des armes chimiques est moralement indécent", a lancé John Kerry. "A tous égards, c'est inexcusable et -- en dépit des excuses et de faux-fuyants fabriqués par certains -- c'est indéniable", a-t-il insisté.
Hier également, M. Obama a appelé le Premier ministre australien Kevin Rudd à propos de l'attaque présumée aux armes chimiques dans le conflit syrien, commise en banlieue de Damas le 21 août. Ils ont "discuté des réponses possibles de la communauté internationale" et de façons de sortir de la crise, a indiqué la Maison Blanche dans un communiqué.
La conseillère à la Sécurité nationale Susan Rice a également rencontré une délégation conduite par Yaakov Amidor, le présidennt du Conseil de sécurité national israélien. Selon la Maison Blanche, ils ont parlé de l'Iran, de l'Egypte, de la Syrie et d'autres dossiers relatifs à la sécurité au Moyen-Orient.
Obama consulte les Européens
M. Obama a appelé le Premier ministre britannique David Cameron et le président français François Hollande ce week-end, au moment où le gouvernement américain étudiait les options militaires qui s'offrent à elle, allant d'une frappe aux missiles de croisière à une campagne aérienne plus soutenue contre la Syrie.
Le gouvernement syrien a nié en bloc les accusations selon lesquels il a eu recours aux armes chimiques. Ces accusations émanant de l'Occident constituent "une insulte au bon sens", selon le président Bachar al-Assad, qui estime qu'une intervention militaire américaine en Syrie serait vouée à "l'échec".
Selon John Kerry, qui a noté que les enquêteurs étaient toujours en train de recueillir des preuves supplémentaires sur le terrain, il ne fait aucun doute pour le gouvernement américain, au vu de ce qui s'est passé dans la banlieue de Damas, que le gouvernement syrien a la capacité de mener une attaque de ce type.
Accusant le régime al-Assad de destruction de preuves, John Kerry a qualifié l'attaque de "lâche", accusant le gouvernement de chercher cyniquement à la dissimuler.
"Le président Obama pense que ceux qui ont recours aux armes les plus atroces contre les populations les plus vulnérables de la planète doivent rendre des comptes", a ajouté John Kerry, avant d'indiquer que le président allait prochainement prendre une décision éclairée sur la réaction américaine à l'attaque. John Kerry n'a pas précisé quand M. Obama allait prendre sa décision.
La Syrie prête à se défendre
Aujourd'hui, le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid al-Mouallem, a défié les puissances occidentales de fournir des preuves de l'utilisation d'armes chimiques par l'armée syrienne.
Il a déclaré lors d'une conférence de presse à Damas qu'il était dans l'intérêt de son gouvernement de révéler ce qui se cache derrière l'attaque aux armes chimiques présumée en banlieue de Damas, affirmant que le gouvernement syrien a honoré son accord avec l'ONU, alors que les rebelles ont saboté la mission des inspecteurs de l'ONU.
L'opposition syrienne a affirmé que près de 1 300 personnes avaient été tuées dans une attaque à l'arme chimique lancée par l'armée gouvernementale contre les bastions rebelles en banlieue de Damas le 21 août. Le gouvernement syrien a fermement rejeté cette accusation.
"La Syrie possède des preuves sur l'incident chimique en question en banlieue de Damas et les présentera en temps voulu", a souligné le ministre.
A propos d'une intervention possible des Etats-Unis en Syrie, le chef de la diplomatie syrienne a indiqué qu'aucune intervention militaire n'aurait d'impact sur les avancées de l'armée syrienne sur les rebelles. "La Syrie se défendra en employant tous les moyens à sa disposition si les Etats-Unis décidaient d'attaquer le pays", a-t-il également soutenu.
Il a déclaré en outre qu'il n'était toujours pas convaincu que les Etats-Unis lanceraient une action militaire contre la Syrie, affirmant que Washington pourrait œuvrer en faveur de plus de concessions.
Les Occidentaux se préparent
Côté occidental, pourtant, les grandes manoeuvres semblent imminentes. "Nous sommes préparés. Nous avons positionné des éléments pour être capables de répondre à toute option choisie par le président. Nous sommes prêts à y aller", a ainsi déclaré Chuck Hagel, le secrétaire américain à la Défense, dans une interview à la BBC.
Le parlement britannique, quant à lui, sera convoqué ce jeudi par David Cameron afin de procéder à un vote relatif à une intervention.
Enfin, selon plusieurs médias français, citant des sources du ministère de la Défense, le porte-avion français Charles-de-Gaulle, actuellement basé à Toulon, pourrait rapidement rejoindre la zone de futures frappes éventuelles, quelque part autour des côtes syriennes.
L'Italie a toutefois fait savoir, par la voix d'Emma Bonino, la ministre des Affaires étrangères, qu'elle rejetait toute intervention armée décidée sans l'approbation des Nations Unies. "L'Italie ne prendra part à aucune solution militaire sans mandat du Conseil de Sécurité de l'ONU", a-t-elle ainsi assuré devant le parlement italien.