Chine : un été agité pour le géant de la grande distribution Carrefour
C'est bien malgré lui que le grand distributeur français Carrefour attire de nouveau l'attention de médias chinois, après la fermeture fin juillet de son magasin à Xi'an, la capitale de la province du Shaanxi (nord-ouest), et après le procès fin août contre un distributeur chinois de Fuyang, une ville de la province de l'Anhui (est), pour contrefaçon de sa marque .
Selon de récentes accusations, Carrefour aurait augmenté le coût de ses "marges arrières" (une pratique commerciale consistant à faire rémunérer par un fournisseur les services ou prestations que lui impose un distributeur), ce qui a pour conséquence d'éliminer des marques locales moins compétitives.
Le groupe français a cependant réfuté cette accusation. Cependant, la composition de ses recettes, dont une proportion importante proviennent des marges arrières est pointée du doigt, selon le quotidien China Business News.
Une enquête publiée par le journal "China Times" montre que de petites marques chinoises doivent payer entre 3 000 et 5 000 yuans par type de produit pour avoir un droit de cité dans un magasin Carrefour. Si un produit local se vend dans les 15 magasins de Carrefour à Beijing, il faut donc débourser au moins 45 000 yuans (environ 6 700 dollars). Ce qui n'est pas le cas pour des marques relativement connues à qui le fournisseur propose une politique préférentielle, soit 1 500 yuans par produit.
Implanté depuis 1995 en Chine, le distributeur français compte aujourd'hui plus de 140 magasins dans une quarantaine de villes, pour la plupart dans l'est et le sud du pays.
Le 28 juillet, Carrefour a fermé son unique magasin dans la province du Shaanxi, officiellement pour mauvaise gestion. Le groupe a réaffirmé toutefois son ambition d'ouvrir entre 20 et 25 magasins en Chine par an.
"Sur le marché chinois, les marges arrières représentent une part remarquable des recettes de Carrefour. Mais cette stratégie ne marche pas très bien sur des marchés mûrs, par exemple ceux du Japon ou de la Malaisie, où les gros fournisseurs sont en position de force dans les négociations avec Carrefour. La marge de profit est donc très faible sur ces marchés-là", a analysé un ancien responsable de Carrefour Chine qui a demandé l'anonymat, lors d'une interview accordée au journal China Times.
De fait, après son retrait de marchés japonais et russe, Carrefour a exprimé son intention de céder une partie de ses activités en Asie du sud-est.
Lang Xianping, économiste chinois renommé, indique que la dépendance aux marges arrières dans le modèle économique de Carrefour est une vision à courte vue, et un mauvaise exemple pour les distributeurs chinois.
"Les marges arrières trop élevées nuisent , sur la durée, à la santé de Carrefour. En fin de compte, la mission fondamentale d'un distributeur est de vendre des produits, au lieu de prélever des frais sur leur vente", a de son côté déploré Ding Liguo, le fondateur du site Internet topretailing.com.
En juillet, un magasin Carrefour, basé à Qingdao, a perdu un procès avec son fournisseur local Zhao Minghua, à cause de ses marges arrières trop élevées . Le magasin s'est vu condamné par le tribunal local à payer une amende de 7,5 millions de yuans.