De plus en plus de journalistes pris pour cible de meurtre, selon un rapport de l'UNESCO
Les meurtres de journalistes sont en augmentation. En effet, la plupart sont pris pour cible dans des pays qui ne sont pas enguerre mais où la révélation d'informations délicates, telles que trafics de drogue, violation des droits de l'homme et corruption, selon un rapport de l'UNESCO leur fait courir un danger de mort.
Intitulée « La sécurité des journalistes et le risque de l'impunité », cette étude est publiée à l'occasion de la réunion du 24 au 26 mars à l'UNESCO du Conseil intergouvernemental du Programme international pour le développement de la communication (PIDC).
Il s'agit de la deuxième étude sur la question, la précédente remontant à 2008.
En 2008-2009, l'UNESCO avait condamné le meurtre de 125 journalistes, un chiffre comparable à la période précédente de 2006- 2007 - lorsque l'organisation avait dénoncé 122 assassinats.
Au moins 80% de ces décès sont dus à des attaques qui visaient spécifiquement les victimes, souligne le rapport. Il s'agit "en particulier d'agressions délibérées menées par des individus qui ne veulent pas que les journalistes enquêtent et révèlent des informations au public".
L'analyse les bilans sur une base annuelle, avec 77 meurtres dénoncés par l'UNESCO en 2009, fait ressortir le fait que cette année-là a remporté un triste record, le précédent remontant à 2006 (69 morts), époque où la violence en Irak était omniprésente.
D'ailleurs, les diminutions importantes enregistrées en 2007 (53 assassinats dénoncés) et en 2008 (48), étaient en grande partie dues à l'amélioration de la situation en Irak.
Quant au pic constaté en 2009, il s'explique en partie par l'assassinat d'une trentaine de journalistes en un seul et même jour, le 23 novembre dernier dans un guet-apens aux Philippines. En raison de cet événement exceptionnel, ce pays arrive en tête, avec 37 meurtres ayant visé des journalistes, devant l'Irak où le nombre de victimes est passé de 62 à 15 entre les périodes 2006- 2007 et 2008-2009, selon la même source.
Autre évolution notable, constatée par le rapport en 2008-2009, le pourcentage de meurtres qui ne sont pas liés à des situations de conflits internes a fortement augmenté par rapport à 2006-2007. La plupart des victimes n'étaient pas des correspondants de guerre étrangers mais des journalistes locaux travaillant dans des pays généralement en paix, sur des sujets d'intérêt local. Dans la grande majorité des cas (95%), les victimes sont des hommes.
Le rapport 2010 a également déploré la croissance de la fréquence des actes de violence contre les journalistes. "Dans la plupart des cas, l'impunité empêche la justice de passer et, si cette tendance persiste, les journalistes seront des cibles faciles".
Depuis 1997, le directeur général de l'UNESCO a entrepris de condamner systématiquement toute atteinte à la vie de journalistes à la suite de la Résolution 29 adoptée par la conférence générale de l'UNESCO à sa 29e session.
Ce texte pressait les États d'adopter le principe en vertu duquel aucune circonstance atténuante ne devrait être reconnue aux crimes contre des personnes lorsqu'ils sont perpétrés en violation de la liberté d'expression et aussi du droit d'autrui à être informé.
Cette résolution exhortait aussi les autorités compétentes à s'acquitter "du devoir qui leur incombe de prévenir ces crimes, d'enquêter à leur sujet, de les sanctionner et d'en réparer les conséquences".
"Seule la volonté politique des États de traduire en justice les assassins de journalistes et de mettre ainsi fin à l'impunité constituera, au bout du compte, la meilleure protection pour les professionnels de la presse", a souligné Irina Bokova, directrice générale de l'UNESCO.