Bilan 2009: une année de grandes transformations d'après les experts
L'année 2009 restera dans les esprits comme est une année de grandes transformations marquée notamment par des turbulences économiques, des évolutions politiques, et une interaction élargie entre les puissances.
Un certain nombre d'experts de différents coins du monde ont donné leur propre interprétation sur cette année qui s'achève.
Le rôle accru des économies émergentes
L'année 2009 a connu trois "premières fois", qui confirment une présence déterminante des économies émergentes dans le processus mondial de prise de décisions. Ainsi:
-le premier sommet du BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine), qui s'est tenu en juin à Ekaterinbourg, en Russie. Les dirigeants des dits-pays ont décidé de s'unir dans la gestion de la crise financière planétaire et la promotion de la reprise économique.
- une déclaration conjointe, pour la première fois, des membres du G8, réunis en juillet à L'Aquila (Italie) sur le traitement des défis planétaires avec six principaux pays en développement : l'Afrique du Sud, le Brésil, la Chine, l'Egypte, l'Inde et le Mexique..
-le G20, pour la première fois, composé des principaux pays développés et des économies émergentes, a été confirmé comme mécanisme de prise de décisions de fait quant à la gestion économique mondiale au sommet de Pittsburgh (Etats-Unis) organisé en septembre.
Ces trois événements ont envoyé un signal commun: la participation croissante des pays en développement aux affaires planétaires, qui s'accompagne de la réduction de la prédominance des pays développés occidentaux.
L'engagement du G20 dans la gestion de la crise financière,a déclaré Joseph Nye, un professeur de l'université Harvard, sera "la plus importante démarche" dans la gouvernance mondiale en 2009.
Zheng Yongnian, directeur de l'Institut de l'Asie de l'est de l'Université nationale de Singapour, a souligné que dans le management actuel du monde, aucun problème ne peut être réglé sans la participation active des économies émergentes.
Le changement du cadre de management du monde est universellement attribué au changement de la distribution des pouvoirs. En particulier, sous les impacts de la crise financière et économique, les pays occidentaux, incapables de relever à eux seuls les défis majeurs, doivent promouvoir la coopération avec leurs partenaires de développement, a-t-il observé.
Pour sa part, Stanley Crossick, ancien président du Centre de politique européenne (EPC), a jugé que la crise financière et économique a incontestablement accéléré "le mouvement du pouvoir depuis l'Ouest vers l'Est".
Opinion partagée par le professeur australien, Hugh White, qui a estimé que l'Asie deviendra le nouveau centre de l'économie et de la stratégie de la planète dans le nouveau siècle.
Pourtant, ces changements ne suffisent pas à conduire à une transformation en profondeur de la structure du monde.
"La plupart des gens sont maintenant d'accord sur la nécessité de restructurer le cadre politique et économique, sans savoir comment s'y prendre exactement", a fait savoir M. Zheng.
Selon Youri Tavrovsky, un professeur de l'Université de l'amitié du peuple de Russie, l'actuelle structure politico-économique du monde reste encore dominée par une économie ancrée sur le dollar, établie par les Etats-Unis au terme de la Deuxième Guerre Mondiale.
L'émergence du G20 reflète le fait que le monde reconnaît une nouvelle balance du pouvoir, a fait remarquer M. Tavrovsky, ajoutant que la nouvelle structure politique, toujours en phase préliminaire, sera mise à l'épreuve par le temps pour tester son efficacité.
La coopération se poursuit, les différents demeurent
En 2009, en général, les relations entre les principaux Etats ont été stables. Ils ont enregistré des progrès relativement importants, malgré leurs différends.
Par exemple, la tendance du développement des relations trilatérales entre la Chine, les Etats-Unis et la Russie est globalement positive, en dépit de leurs désaccords dus aux différents intérêts stratégiques.
Lors d'un sommet en avril à Londres, le président chinois, Hu Jintao, et son homologue américain, Barack Obama, ont convenu de construire des relations positives, coopératives et globales au 21e siècle. Les deux côtés ont également décidé de mettre en oeuvre un mécanisme de dialogue stratégique.
Lors de la visite en Chine de M. Obama en novembre dernier, les deux pays ont publié une déclaration conjointe, dans laquelle ils réitèrent leur engagement à prendre des mesures concrètes en vue de l'établissement d'un partenariat pour relever les défis communs.
"En raison de leur influence sur l'économie mondiale,il est très important pour les Etats-Unis et la Chine de maintenir de bonnes relations" a indiqué M. Nye.
Le professeur Mostafa Elwi Seif, président de la faculté des sciences politiques de l'Université du Caire, a indiqué qu'une puissance économique plus forte pour la Chine et les Etats-Unis est dans l'intérêt des deux pays.
Concernant les Etats-Unis et la Russie, l'amélioration des relations est évidente. En avril dernier, le président Obama et son homologue russe Dmitri Medvedev ont atteint un important consensus sur le désarmement nucléaire. En juillet, les deux pays ont signé plusieurs accords-cadres importants sur un projet de remplacement du Traité de réduction des armes stratégiques (START I). En septembre, l'administration Obama a annoncé l'abandon des projets de l'époque Bush pour le déploiement de bouclier antimissiles en Pologne et en République tchèque.
Ces changements positifs ont poussé la Russie à être plus optimiste quant à l'avenir de ses relations avec les Etats-Unis, selon M. Tavrovsky. Cependant, , a-t-il averti, cela ne signifie pas que les Etats-Unis ne chercheront pas à refréner la Russie.
Quant aux relations Chine-Russie, la confiance stratégique mutuelle a été renforcée en 2009, 60e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques. Le président Hu Jintao s'est rendu en juin à Moscou pour célébrer cet anniversaire. En octobre, le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, a effectué une visite officielle en Chine, les deux pays ayant réitéré leur priorité commune dans les politiques étrangères pour le développement des relations stratégiques de coopération.
Selon M. Tavrosky, "stratégiquement, la Russie et la Chine sont très importantes l'une pour l'autre".
De nouvelles tendances sont également à signaler dans les politiques étrangères du Japon et de l'Union européenne.
Depuis son arrivée au pouvoir en septembre dernier, le Premier ministre japonais, Yukio Hatoyama, a adopté une politique extérieure qui s'appuie davantage sur l'Asie, en cherchant un staut "d'égal à égal " avec Washington.
Concernant les relations transatlantiques, malgré le fait que l'Europe demeure la plus importante partenaire des Etats-Unis, leur coopération devient moins "intime" qu'elle ne l'était lors de la Deuxième Guerre mondiale et de la Guerre froide, selon des experts.
Pour M. Zheng, les défis croissants de la mondialisation rendant nécessaire la coopération entre les principaux pays du monde.
En introduisant la notion de "puissance intelligente" dans sa politique étrangère, l'administration Obama a exprimer sa volonté d'exercer son leadership pour établir des partenariats et résoudre les problèmes qu'aucun pays ne peut régler seul par ses propres moyens.