Algérie : vaste mouvement de solidarité autour de l’écrivain et journaliste Kamel Daoud
Par N.TPublié le
Des voix s’élèvent dans la société civile et dans les milieux politiques pour dénoncer l’appel au meurtre lancé par un salafiste contre le journaliste et écrivain Kamel Daoud. Traumatisée par les terribles crimes de masse commis dans les années 90 par les groupes armés du GIA et par les assassinats ciblés d’intellectuels, d’artistes, de militants associatifs, de syndicalistes, de familles entières, et de villageois sans défense, la société algérienne semble déterminée à faire barrage à cette résurgence de la bête immonde. L’indignation est d’autant plus grande que les autorités restent scandaleusement silencieuses, laissant ces assassins potentiels proférer leurs menaces publiquement.
Des journalistes et militants des droits de l’homme ont lancé une pétition sur facebook, appelant les autorités à traduire devant la justice l’auteur de la fatwa. La pétition, signée par des milliers de personnes, appelle les ministres de la Justice et de l’Intérieur à «enclencher des poursuites contre ces appels au meurtre qui nous rappellent les pires moments de l’Algérie face au GIA». «Nous condamnons avec force les appels au meurtre public de Abdelfettah Hamadache, autoproclamé chef salafiste algérien», souligne le texte.
Les éditions Barzakh, qui éditent Kamel Daoud en Algérie, ont annoncé le dépôt d’une plainte devant un tribunal pour «incitation au meurtre». «C’est d’une gravité sans nom. Nous sommes totalement solidaire avec lui», écrit l’éditeur, qui demande «si la justice et l’état de droit existent encore en Algérie ou si la violence – morale, bientôt physique – est devenue la norme».
Le mouvement Barakat a dénoncé de son côté cette «menace» contre une plume libre. «L’oligarchie aux affaires ne semble vouloir reculer devant aucune compromission ni trahison pour sauvegarder ses intérêts. Cet appel en est la preuve que le peuple Algérien est laissé à l’abandon», écrit le mouvement sur sa page facebook.
La Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH) exprime «ses préoccupations face à la montée de l’intolérance. Elle se solidarise avec Kamel Daoud et condamne toute violence sous quelle que forme qu’elle soit» et «réaffirme le droit a l’expression pour tout citoyen et rappelle l’obligation de l’Etat à assurer la sécurité et la protection des citoyens et leurs biens».
Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), «exprime son entière solidarité à Kamel Daoud et à toute l’élite intellectuelle et tient pour responsables les autorités contre toute atteinte à l’intégrité morale et physique d’un des membres de la corporation journalistique qui a payé un lourd tribut».Il considère que «le précédent est extrêmement grave et confirme la démission de l’Etat et de sa justice, incapables d’assurer la défense des citoyens contre les extrémismes et les injustices».
L’ancien président du RCD, Saïd Sadi, qui indique que «le combat de Kamel Daoud nous concerne tous», a affiché sur sa page facebook que sa «solidarité à son endroit est à la fois un devoir envers un compatriote qui n’a jamais baissé la garde ni cédé à la démagogie ambiante et un engagement pour notre pays menacé par des dirigeants qui ont décidé de rejouer la scène morbide du chantage au péril intégriste pour préserver leur intérêts».
Soufiane Djilali, président de Jil Jadid, a exprimé, sur son compte Twitter, son «soutien à Kamel Daoud après l’outrage de la fatwa qu’il vient de subir».
Le Mouvement populaire algérien (MPA) d’Amara Benyounès (ministre du commerce) a condamné, ce jeudi 18 décembre, la fatwa dont fait l’objet l’écrivain et journaliste Kamel Daoud. « C’est avec une très grande consternation, mais aussi avec une immense révolte et beaucoup d’inquiétude, que nous avons pris connaissance des déclarations criminelles d’un imam politique », indique le parti de Amara Benyounès.
« Qui s’en prend violement au journaliste et écrivain, Kamel Daoud, dont il ne réclame rien moins que la mort. Cet appel au meurtre est intolérable et appelle une réaction immédiate et énergique », ajoute-t-il dans son communiqué.
Le parti condamne ainsi « avec la plus grande vigueur ces propos criminels et leur auteur, sans doute nostalgique de la décennie noire où de tels discours ont produit la tragédie nationale ». Il « exprime sa sympathie au journaliste et écrivain, Kamel Daoud, lui fait part de sa solidarité pleine et entière et le conforte dans sa décision de saisir la justice ».