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Travel ban américain : les Libyens interdits, les Mauritaniens restreints, quel avenir pour le Maghreb face à Trump ?

L'administration Trump a considérablement élargi sa politique d'interdiction de voyage, portant le nombre de pays concernés à 39. Parmi eux, deux nations du Maghreb au sens large : la Libye, frappée d'une interdiction totale d'entrée aux États-Unis, et la Mauritanie, soumise à des restrictions partielles. Si l'Algérie, le Maroc et la Tunisie échappent pour l'instant à ces mesures, la pression américaine sur la région ne cesse de s'intensifier.

La proclamation signée le 16 décembre 2025 par le président Donald Trump marque une escalade significative dans la politique migratoire américaine. Le nombre de pays visés par des restrictions totales ou partielles est passé de 19 à 39, doublant ainsi la portée du « travel ban » initial instauré en juin dernier. Cette extension, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2026, vise officiellement à « protéger la sécurité des États-Unis contre les terroristes étrangers ».

Parmi les 17 pays désormais frappés d'une interdiction totale d'entrée sur le territoire américain figure la Libye, aux côtés de l'Afghanistan, de l'Iran, de la Somalie, du Yémen, de la Syrie ou encore d'Haïti. Pour les ressortissants libyens, cela signifie l'impossibilité d'obtenir un visa d'immigrant ou de non-immigrant, quelle que soit la nature de leur demande. Une décision justifiée par Washington par le chaos sécuritaire persistant dans le pays depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011, un pays qui reste déchiré par les luttes de pouvoir et l'influence des puissances étrangères.

La Mauritanie sous surveillance américaine

La Mauritanie se retrouve quant à elle dans une catégorie intermédiaire : celle des pays soumis à des « restrictions additionnelles ». Selon la Maison Blanche, cette décision repose sur deux critères principaux. D'une part, un taux de dépassement de visa (overstay rate) de 9,49 % pour les visas de tourisme et d'affaires B-1/B-2, jugé préoccupant par le Département d'État. D'autre part, une présence gouvernementale qualifiée de « faible » dans certaines parties du territoire mauritanien, ce qui crée selon Washington « des difficultés substantielles en matière de contrôle et de vérification des antécédents ».

La Mauritanie rejoint ainsi une liste de 20 pays soumis à des restrictions partielles, aux côtés du Nigeria, du Sénégal, de la Côte d'Ivoire, du Gabon, de la Gambie, du Bénin, de la Tanzanie ou encore de Cuba et du Venezuela. Ces restrictions ne constituent pas une interdiction totale mais complexifient considérablement l'obtention de visas pour les ressortissants de ces pays.

Le reste du Maghreb sous pression diplomatique

Si l'Algérie, le Maroc et la Tunisie ne figurent pas sur les listes du travel ban, les trois pays n'en sont pas moins dans le viseur de l'administration Trump, chacun pour des raisons différentes. La stratégie américaine au Maghreb obéit à une logique brutalement pragmatique : loyauté, utilité, business.

Le Maroc bénéficie d'une position privilégiée. Le 3 août 2025, une lettre de Donald Trump adressée au roi Mohammed VI réaffirmait « que les États-Unis d'Amérique reconnaissent la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental ». Par rapport à ses voisins – une Algérie fragilisée, une Libye éclatée, une Tunisie en crise politico-économique – le royaume chérifien se distingue par sa stabilité institutionnelle et son positionnement atlantico-africain assumé. L'alliance stratégique entre Rabat et Washington s'est encore renforcée avec le projet d'accord de paix Maroc-Algérie porté par les émissaires Steve Witkoff et Jared Kushner.

L'Algérie fait face à une pression croissante. Un ultimatum a été adressé par le président Trump au général Saïd Chengriha et au président Abdelmadjid Tebboune, exigeant que l'Algérie cesse tout soutien au Front Polisario et engage un dialogue direct avec le Maroc dans un délai de soixante jours. Si l'Algérie et les États-Unis restent des partenaires économiques, leurs échanges sont devenus minimes. La diplomatie algérienne ayant perdu de son influence au Sahel et au Moyen-Orient, son appui ne semble plus prioritaire pour les Américains.

La Tunisie, quant à elle, paie le prix de ce que Washington considère comme des « mauvais signaux » envoyés par le président Kaïs Saïed. Début août 2025, Tunis s'est vu infliger un taux de 25 % de droits de douane par les États-Unis, qui avaient déjà drastiquement réduit leurs aides. Une sanction économique qui fragilise encore davantage un pays déjà en proie à de graves difficultés financières.

L'immigration irrégulière constitue un autre point de tension. Selon le diplomate algérien Sabri Boukadoum, les flux migratoires ont augmenté de plus de 35 % ces dernières années dans la région. Une donnée que l'administration Trump surveille de près, faisant planer la menace d'une extension du travel ban à d'autres pays du Maghreb si la situation devait se dégrader.

Pour l'heure, la diaspora maghrébine aux États-Unis reste majoritairement épargnée par ces nouvelles restrictions. Mais dans un contexte où la politique migratoire américaine se durcit de mois en mois, rien ne garantit que cette situation perdurera. Le Maghreb, région stratégique coincée entre l'Afrique subsaharienne et l'Europe, demeure plus que jamais sous le regard attentif – et menaçant – de la Maison Blanche.

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