Grèce : la lutte contre l'immigration illégale se durcit
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La lutte contre l'immigration illégale en Grèce semble se durcir chaque jour. Des passeurs ont récemment écopé de lourdes peines de prison allant de 50 à 142 ans. Plusieurs associations humanitaires dénoncent le sort réservé aux migrants qui seraient injustement accusés et condamnés.
La Grèce criminalise les passeurs de migrants
Trois jeunes hommes originaires d'Afghanistan et de Somalie purgent actuellement des peines de prison de 50 ans et de 142 ans. Ils sont accusés d'avoir dirigé des canots pneumatiques transportant avec d’autres migrants. Pour leur défense, les condamnés ont déclaré avoir été abandonnés par des passeurs dans la mer Égée, entre la Turquie et la Grèce.
Mohammed, condamné à 142 an de prison, a déclaré aux journalistes et aux législateurs du Parlement européen qu'il n'avait pas d'autre choix que de conduire le bateau. Le passeur l'aurait forcé à prendre le relais, en le frappant au visage et en le menaçant d'une arme avant d'abandonner le canot dans une mer agitée. "Je le referais, du moment que je sauve des vies". a t-il affirmé.
Poursuites contre des associations humanitaires
Certaines associations montent aux créneaux et dénoncent ces condamnations. Des travailleurs humanitaires et des bénévoles se sont également retrouvés dans le collimateur des autorités grecques.
Dans l'affaire largement médiatisée de la défenseuse des droits de l'homme syrienne, Sarah Mardini (elle-même réfugiée) et du volontaire Sean Binder qui ont été arrêtés et détenus pendant des mois en 2018, des accusations d'espionnage, de blanchiment d'argent ont été formulées contre eux. Ils nient les faits et affirment qu'ils ne faisaient rien de plus qu'aider à secourir des gens.
La Grèce n'est pas le seul pays concerné. Selon l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Allemagne, l'Italie, Malte, les Pays-Bas, l'Espagne et la Grèce ont ouvert 58 enquêtes et procédures judiciaires depuis 2016 contre des entités privées impliquées dans la recherche et le sauvetage.
"Je pense qu'il est important de les contester devant les tribunaux, de ne pas du tout rester les bras croisés et d'accepter que nous soyons catalogués comme des contrebandiers ou des espions parce que j'ai offert une RCP, (ou) le plus souvent juste un sourire, à quelqu'un en détresse", a déclaré Binder à l'AP. "Il est absurde de nous faire passer pour des criminels. Je ne l'accepte pas..... Peu importe qui vous êtes, vous ne méritez pas de vous noyer dans la mer."
Binder et Mardini seront jugés sur l'île de Lesbos pour des délits d'espionnage, de falsification et d'utilisation illégale de fréquences radio. Ils risquent une peine maximale de huit ans, convertible en amende. Ils font toujours l'objet d'une enquête pour des délits qui pourraient leur valoir 25 ans de prison.
La Grèce n'entend pas faire de concessions
Les responsables grecs nient vigoureusement que le pays procède à des repoussages illégaux, malgré les nombreuses indications du contraire. Le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis a de nouveau rejeté ces affirmations mardi dernier, déclarant que son gouvernement applique une politique migratoire "dure, mais juste".
La traversée maritime courte, mais souvent périlleuse, de la Turquie vers les îles grecques voisines est une voie d'accès populaire vers l'Europe pour les personnes fuyant les conflits et la pauvreté en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient. Pour réprimer le trafic de migrants, la Grèce a introduit en 2014 une loi imposant des sanctions sévères aux passeurs de migrants : 10 ans d'emprisonnement pour chaque personne passée en fraude, ou 15 ans par personne s'il y a danger de mort, et la prison à vie si quelqu'un meurt.
Les passeurs se sont rapidement adaptés. Au lieu de transporter eux-mêmes les personnes, ils persuade ou force leurs passagers à conduire les bateaux, ce que confirment de nombreux témoignages de demandeurs d'asile à leur arrivée.