40 ans après, Archie Shepp, légende vivante du jazz, ravive son “Attica Blues”. (Kotoviski / Wikimedia)

Jazz à Marseille : Archie texture

Le saxophoniste américain Archie Shepp a livré un superbe concert hier au Festival Jazz des 5 Continents à Marseille. Accompagné de vingt-quatre musiciens, ils ont revisité son œuvre, Attica Blues, hommage aux émeutes de prisonniers de 1971. 

Dans l’ambiance peut-être un peu trop feutrée du Palais Longchamp, les techniciens du Festival terminent d’installer la scène. Il est près de 23h, Hugh Masekela, trompettiste sud-africain vient de conclure son set. Hommage sobre à Mandela, la lutte contre le racisme incrustée en toile de fond. 

Le ton est donné. La scène est bientôt prête pour le Archie Shepp Big Band. Les arbres du jardin se couvrent de teintes rosées, bleutées ou orangées. Avant l’entrée des musiciens, un discours en anglais, traduit sur les écrans géants, situe le contexte. 

1971, Attica, prison de l'état de New York, des émeutes causent la mort d’une quarantaine de détenus. A l’époque, 51% des prisonniers aux USA sont noirs, tandis qu’ils ne représentent que 15% de la population totale, précise le texte.  

A l’été 71, George Jackson, membre du Black Panther Party est tué par un gardien de prison en Californie, alors qu’il tente de s’évader. Sa mort provoquera la mutinerie d'Attica.

Un an plus tard, Archie Shepp en tire l’album “Attica Blues”, en mémoire de Jackson et des autres victimes. “Peut-être que nous sommes tous des prisonniers”, conclut le récit d’introduction. 

Archie Shepp, né en 1937, initiateur du free jazz, n’est pas seulement une légende vivante de la musique. Il est un monument, témoin de l’histoire, de la ségrégation aux USA, des luttes pour les droits civiques,...

 

Le public reste scotché...

Le show d’hier soir révélait toute la densité de sa musique, cette Archie texture unique que les Marseillais ont pu savourer. Un seul regret toutefois : que le public se soit contenté de regarder le concert, comme c’est trop souvent le cas. 

La cadre feutré, l’ambiance douce, un peu trop confortable du Palais Longchamp, ou la lumière un peu trop vive sur les spectateurs les ont laissés étalés sur les pelouses ou sur les bâches tendues à même le sol. 

Presque amorphes, tandis que les vingt-cinq musiciens s’en donnaient à cœur joie. Finalement pour le dernier morceau et le rappel, après plus d’une heure et demie de spectacle intense, le public daignera se dresser pour vibrer à l’unisson des ultimes notes. 

Sur la scène, Archie Shepp joue encore, ponctue sa musique de quelques mots en français, comme tout au long du concert. Se délecte des sons produits par le philharmonique qui l’accompagne. 

Cuivres, cordes,  guitare, basse,  piano, batterie, percussions, chanteuses, chef d’orchestre. Et un Archie-tecte, au sax et à la voix.  

Parmi eux, quelques-uns jouent à la maison. Raphaël Imbert, saxophoniste marseillais, lance un solo, le maestro apprécie et le public se réveille enfin. Trop tard, c’est déjà fini. On en redemande... 

 

La 14e édition du Festival Jazz des 5 Continents se termine demain. Le programme complet est à consulter sur cette page

Ci-dessous, un extrait vidéo du concert donné par le Archie Shepp Big Band à Paris-La Villette en septembre 2012 :