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La ville d’Arles rend hommage aux Indochinois réquisitionnés en 1939

La ville d’Arles, dans le sud de la France, a rendu un hommage officiel jeudi aux centaines de travailleurs indochinois réquisitionnés en 1939 au déclenchement de la deuxième guerre mondiale et qui ont donné un essor au développement de la riziculture en Camargue.

Selon le journaliste Pierre Daum, auteur d’un ouvrage qui est consacré à ces travailleurs sous le titre « immigrés de force », «jusqu’alors, la culture du riz dans le delta du Rhône était marginale, essentiellement destinée à dessaler la terre et à la préparer à d’autres cultures, comme celle de la vigne».

A partir de 1939, la France réquisitionna en masse pour combler les besoins en main-d’œuvre de son industrie de guerre. Quatorze mille Marocains, six mille Algériens et quatre mille Malgaches furent alors recrutés. Mais c’est la colonie d’Extrême-Orient qui fournit le contingent le plus important de ces « ouvriers non spécialisés » (ONS, « linh tho » en vietnamien).

Au total, vingt mille jeunes Indochinois furent enrôlés, le plus souvent de force, sous la supervision du ministère des Colonies et du service de la main-d’œuvre indigène, rattaché au ministère du Travail à Vichy.

« Nous avons voyagé pendant trente jours dans des conditions épouvantables, à fond de cale, serrés les uns contre les autres, avec interdiction de monter sur le pont. Comme des esclaves ! » se souvient avec émotion Lê Ba Dang, quatre-vingt-neuf ans, aujourd’hui artiste plasticien de renommée internationale, qui fut l’un de ces travailleurs vietnamiens que la France réquisitionna.

À leur arrivée à Marseille, les jeunes gens étaient parqués au pénitencier des Baumettes. Ils étaient ensuite affectés dans différentes régions de la France dans des usines et le plus souvent à des tâches nocives et périlleuses.

« Les humiliations racistes étaient surtout le fait d’officiers coloniaux. Gonflés de mépris, ils voyaient les Vietnamiens comme des rien du tout », relate Lê Ba Dang.

Aucun de ces « immigrés de force » n'a obtenu de pension pour les années travaillées en France. Selon Pierre Daum, ils étaient payés moins du dixième du salaire d'un ouvrier français.

En juin 1940 lorsque la guerre s'achève, leur rapatriement se heurte au blocus maritime britannique. Plus de 14.000 restent en France et sont alors affectés par le régime de Vichy à des travaux d’assainissement, à la récolte du sel et au développement de la riziculture en Camargue.

Il faudra attendre 1946 pour qu’ils commencent à être renvoyés dans leur pays. Les derniers contingents ne quitteront la France qu’en 1952. Un millier de travailleurs indochinois choisiront cependant de rester en France.

Hervé Schiavetti, maire d’Arles (PCF) envisage de dédier un espace public à ces travailleurs indochinois, sortant ainsi de l’oubli une page sombre de l’histoire coloniale de la France.

L’ambassade du Vietnam en France salue l’hommage arlésien comme « une très bonne initiative » et se félicite que «pour la première fois, une commune française reconnaisse la contribution de ces travailleurs vietnamiens ».

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