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Algérie : quand la jeunesse fait l’apprentissage de la barbarie

La scène est à peine croyable. Dans l’Algérie de 2011, après des années de tueries, de massacres organisés, d’assassinats ciblés, de ravages terroristes, de guerre sanglante qui n’épargna aucun coin du territoire ; voilà que des hordes de jeunes nervis sont encouragés à jouer du sabre et du couteau, un jour de manifestation pacifique pour le changement et la démocratie au cœur d’Alger, attaquant directement un chef de parti d’opposition, sous les yeux des forces de l’ordre, à peine discrètement encadrés par des flics en civils, pour s’offrir un épisode de lynchage en public.

Selon de nombreux témoignages concordants, Said Sadi, président du RCD (Rassemblement pour la Culture et la Démocratie) agressé par des troupes de jeunes dès son arrivée sur les lieux de la manifestation empêchée samedi 5 mars et accueilli par des slogans racistes, type «sale Kabyle» et «juif», a été épargné de justesse, contraint de rebrousser chemin en catastrophe dans un véhicule pris d’assaut sous des jets de projectiles, non sans avoir évité un coup de couteau.

Les meutes d’agresseurs ont été vraisemblablement alertées et le signal donné au moment opportun pour provoquer l’agression.

Comment les pouvoirs publics peuvent-ils permettre qu’un tel traquenard soit tendu à un homme politique ? Qui peut donc croire à la thèse de l’attachement de ces jeunes à Bouteflika au point de vouloir en découdre eux-mêmes avec ses opposants ? Nul n’est dupe, le scénario est évident d’une manipulation honteuse, répugnante, d’une lâche exploitation de la détresse de jeunes prêts à tout en contrepartie de quelques promesses.

Que l’on soit d’accord ou non avec Said Sadi, que l’on soit opposé ou non à ce choix de tentatives à répétition de marches pacifiques malgré l’armada à chaque fois déployée, la répression systématique et la faible adhésion de la population de la capitale, empêchée dans tous les cas de figure, on ne peut rester indifférent devant ces pratiques indignes, stratégie de la haine et de la violence, comme si le pays n’en avait pas assez souffert, concoctées sans doute dans les coulisses, à travers les ramifications policières des partis au pouvoir et des élus transformés en barbouzes.

En tant qu’Algérien, tout simplement, on ne peut rester impassible devant de tels procédés irresponsables et abjects, quand la jeunesse égarée fait l’apprentissage de la barbarie.