Gastronomie. Le couscous, chacun y apporte son grain
Par N.TPublié le
C’est un mets emblématique, un symbole de convivialité aux lointaines origines berbères. Classé chaque année dans le top 5 des spécialités préférées des Français, ce « plat du pauvre » compte presque autant de variantes qu’il y a de villages au Maghreb. Reconnu par l’Unesco, le couscous a conquis tous les palais du Globe
Ce fut un événement rare d’unité maghrébine, et il fera date hors des tensions politiques... L’Algérie, le Maroc, la Mauritanie et la Tunisie, porteurs du dossier « Savoir savoir-faire et pratiques liés à la production et à la consommation du couscous », ont obtenu, le 16 décembre 2020, l’entrée du couscous au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. Une consécration bien méritée pour, selon les régions, le « seksou », « kouski », « kseksou », « kuskusi » ou, tout simplement « couscous », transcription latine de ces termes berbères.
De quoi ce plat est-il composé ? Pour résumer, c’est une association de semoule de blé dur, d’orge ou de maïs, de légumes, de viandes ou de poisson, mais pour résumer seulement, car les recettes recèlent d’innombrables gestes pour accompagner la prépa- ration et la cuisson, relever le tout avec des épices et affiner le gout de chaque ingrédient. À l’agneau et aux courges, à la viande et au potiron, aux fruits secs, citrouilles et carottes, sans oublier l’incontournable courgette... Le mets réserve toujours des surprises.
LES PIEDS-NOIRS Y AJOUTENT LA MERGUEZ
Ses origines sont un autre mystère. Les spécialistes s’accordent toutefois à situer l’apparition du couscous dans les habitudes alimentaires berbères ancestrales. Des découvertes de pots qui auraient pu servir à sa préparation, dont, dit-on, le premier couscoussier de l’histoire, ont été faites dans le nord de la Kabylie. Née dans le Maghreb occidental (Algérie, Maroc), la préparation aurait été ensuite adoptée en Tunisie et dans la péninsule ibérique. Quels sont les symboles et les valeurs qui entourent sa consommation, pourquoi s’est-il fait une place de choix dans la cuisine française ? Dans les pays du Maghreb, où il est né, le couscous est avant tout un plat qui rassemble et se partage. Il est servi aux, mariages, naissances, funérailles, retrouvailles. C’est aussi le plat traditionnel du vendredi, notamment au Maroc. L’établissement parisien les Trois Frères, une institution dans le quartier de la Goutte-d ’Or, offrait un temps le couscous gratuit tous les jeudis soir.
En France, ce sont les pieds noirs arrivés d’Algérie qui ont introduit ce plat dans les foyers, on leur doit la présences des merguez, absentes des recettes traditionnelles maghrébines. L’entreprise agroalimentaire française Garbit a lancé le couscous cuisiné en conserve avec pour slogan « C’est bon comme là-bas, dis ! ». La consommation de couscous s’est même imprégnée de politique dans l’Hexagone. « Tout le monde mange du couscous et des merguez dans ce pays, l’intégration est réussie ! » s’exclamait lors d’un meeting à Paris le candidat du Front de gauche à la présidentielle de 2012, Jean-Luc Mélenchon. Dans ce camp politique, l’invitation à des couscous dits « républicains » est devenue une pratique courante. L’extrême droite, quant à elle, ne voit pas d’un bon œil la place qu’a prise le couscous en France, estimant qu’il ne reflète pas son identité.
MONDIALISATION GOURMANDE
Il est enfin des villes où des cuisiniers de talent se sont forgé une solide réputation. À Marseille, le Femina, créé par la famille Kachetel en 1921, a une histoire singulière. « Le restaurant a été ouvert par l’arrière-grand-pères de mon grand-père ! » raconte avec fierté le gérant actuel, Mustapha. « Je fais partie de la quatrième génération dans ce lieu (une ruelle du quartier Noailles, dans le centre-ville, NDLR). Ca s’appelait Chez Kachetel jusqu’en 1988-1989, et c’est moi qui l’ai rebaptisé le Femina, en hommage à ma mère et à ma grand-mère, qui m’ont appris à faire le couscous », poursuit-il.
Et Mustapha d’expliquer avec enthousiasme que le couscous d’orge, devenu la spécialité de la maison, était à l’origine « le plat du pauvre dans les montagnes de Kabylie, car il se conservait facilement et tenait chaud au ventre pour aller travailler dur». Aujourd'hui, « 95 % de ma clientèle vient pour l’orge, des Européens, des Américains... le plat s’est mondialisé », se réjouit-il, non sans rappeler que sa recette figurait dans le dossier présenté à l’Unesco.
Petite anecdote : Benoit Payan, actuel maire de Marseille, fréquentait le restaurant bien avant d’être élu. « Un jour je lui ai dit, Benoit, tu seras maire de Marseille! Il m’a répondu “In cha’Allah», confie le maitre de céans. « La preuve, dit-il, que le partage d’un couscous permet de conserver des souvenirs. »
Le couscous
Il existe plusieurs variétés de couscous, mais le plus courant est le couscous aux légumes et à la viande.
Ingrédients pour 4 personnes environ :
2 poignées de haricots verts, 1 carotte, 2 tomates,
1 courgette, 1 petite boîte de pois chiches en conserve,
1 demi-poivron vert, 1 demi-poivron rouge, 1 oignon, 20 cl de bouillon, 20 g de beurre, 5 c. à s. d’huile d’olive, 1 c. à c. de cumin en poudre, 1 c. à c. de curry en poudre, Sel, Poivre
Réalisation
1. Équeuter les haricots verts, les couper en morceaux et les
cuire 12 min dans l’eau bouillante salée. Égoutter et réserver.
- 2. Éplucher et hacher l’oignon. Éplucher et couper en dés la carotte. Couper en cubes les tomates. Couper en 2, épépiner et couper en dés les poivrons. Couper en dés la courgette. Égoutter et rincer les pois chiches.
- 3. Dans une cocotte, faire chauffer l’huile et y faire revenir l’oignon 5 min. Ajouter les légumes, les épices, du sel, du poivre et laisser revenir quelques minutes. Verser
le bouillon et couvrir. Au bout d’une dizaine de minutes, ajouter les pois chiches égouttés. Faire cuire à couvert jusqu’à ce que les légumes soient fondants.
4. Couvrir la semoule d’eau bouillante. Laisser reposer 5 min et égrainer à la fourchette. Faire chauffer
le beurre dans une poêle et y faire revenir la semoule 5 min. Saler, poivrer et servir avec les légumes.