Diplomatie : vers un début d'apaisement des tensions entre Alger et Paris ?
Par belkacemgPublié le
Lors d'une conférence de presse au sujet de la Libye, un conseiller à l'Elysée a déclaré que Macron regrettait "les polémiques et les malentendus engendrés par les propos rapportés" et qu'il était fortement attaché au développement de la relation entre la France et l'Algérie.
Des propos allant dans le même sens on été prononcés mardi où l'on insistait sur le respect d'Emmanuel Macron envers "la nation algérienne, pour son histoire et pour la souveraineté de l'Algérie".
Préoccupée par la situation en Libye, la présidence française a insisté sur le fait que "L’Algérie était un acteur majeur dans la région". Le président français souhaitait d'ailleurs la participation de son homologue Abdelmadjid Tebboune à une conférence à Paris organisée plus tard cette semaine. L'executif français a aussi précisé que la France désirait déveopper une relation bilatérale "au bénéfice des populations algériennes et françaises, mais également pour répondre aux grands défis régionaux, à commencer par la Libye ".
"L’Algérie est un acteur majeur dans la région et le président souhaite la participation du président Tebboune à cette conférence ", a insisté le conseiller à la présidence.
Samedi dernier, Tebboune avait prévenu qu'il ne ferait pas le premier pas pour tenter d'apaiser les tensions avec son homologue français. Selon le lui, E.Macron avait "rouvert un vieux conflit de manière totalement inutile ".
Une situation en Libye qui préoccupe les deux capitales
Longtemps dans le chaos, les élections libyennes entendent instaurer un semblant de stabilité et assoir le renouveau libyen. Néanmoins, la multiplication des acteurs et les dernières évolutions laissent entrevoir des complications. La candidature de Khalifa Haftar pourrait marquer le début d’une nouvelle stratégie pour certains États en vue de le stopper ou de le soutenir.
Personnage clivant, le maréchal peut aggraver les divisions dans le pays en cas de défaite et relancer les violences qui freinent depuis longtemps le développement du pays. De plus, la lutte d’influence géostratégique est de plus en plus dangereuse, impliquant de nombreux pays : Émirats arabes unis, l' Égypte, la Russie, Israël, le Qatar, la Turquie, la France et l’Algérie.
Mise à mal, par l’enlisement de la crise malienne, la France ne peut se permettre une autre crise libyenne dans la région, ni se payer le luxe de se passer des services de renseignement algériens rompus aux conflits sahéliens.
" Les renseignements algériens ont des réseaux partout et connaissent très bien la situation. Il y a une coopération sécuritaire très importante. Si vous gelez le partage de renseignements, ça limite les capacités de l’armée française. Quand vous menez des opérations militaires pas loin de l’Algérie, vous devez coordonner avec l’armée algérienne… Donc cela aussi peut impacter le déroulement des opérations", analyse le chercheur algérien Djallil Lounnas, spécialiste des groupes djihadistes au Sahel et professeur de relations internationales à l'université marocaine al-Akhawayn.
De plus, c’est Alger qui dirige le Comité de suivi de l’accord de paix conclu en 2015 entre Bamako et les groupes armés du nord du Mali. Ce processus, déjà laborieux, mais dans lequel Alger a ses propres intérêts de sécurité nationale, semble en revanche peu susceptible d’être affecté par les tensions franco-algériennes.
Du côté algérien, une crise libyenne, avec qui elle partage plus 800km de frontière, peut ébranler la situation sécuritaire du pays. Déjà confrontée à des tensions avec le Maroc et l’explosion de la criminalité organisée à ses frontières avec le Mali et le Niger, l’Algérie doit limiter impérativement les conflits dans lesquels elle peut s’engager. En cela, affermir ses relations avec la France pour une stabilisation de ses frontières avec le Mali et une coopération pour une potentielle gestion commune de la crise libyenne serait plus sage.
La réponse d'Alger ne s'est pas fait attentre
Le chef de la diplomatie algérienne a salué mercredi des déclarations de l'Elysée manifestant "du respect" envers son pays en pleine crise diplomatique, et annoncé qu'Alger participerait vendredi à une conférence sur la Libye à Paris.
"Contrairement aux déclarations à l'origine de la crise, celles-ci (faites mercredi par l'Élysée) sont raisonnables et comportent des idées montrant du respect pour l'Algérie, son histoire, son passé, son présent et aussi pour la souveraineté algérienne", a déclaré Ramtane Lamamra, avant d'annoncer que son pays participera bien à la conférence internationale sur la Libye mais ne sera pas représenté par son président.
Tensions récurrentes entre Alger et Paris
Emmanuel Macron avait déclenché l’ire d'Alger après des propos rapportés le 2 octobre par le quotidien Le Monde lors d’un déjeuner entre le président français et des petits-fils de harkis. Le président français aurait accusé le système " politico-militaire " algérien d'entretenir une « rente mémorielle » en servant à son peuple une " histoire officielle " qui "ne s'appuie pas sur des vérités". D'après le quotidien, il avait également affirmé que "la construction de l'Algérie comme nation est un phénomène à regarder. Est-ce qu'il y avait une nation algérienne avant la colonisation française ? Ça, c'est la question (...) »
Emmanuel Macron avait indiqué qu’après son indépendance en 1962, l’Algérie s’était dotée d’une histoire officielle " totalement réécrite ", qui " ne s’appuyait pas sur des vérités », mais développait plutôt « un discours qui reposant sur une haine de la France ".