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Edito: la répression en Algérie, le risque calculé de Bouteflika

Circulez, il n'y a rien à voir! Le gouvernement Algérien tente de banaliser le mouvement de contestation sur le thème du changement et de la démocratie.

Si l'on en croit Mourad Medelci, ministre des Affaires étrangères, qui s'exprimait lundi sur Europe1, "les marches organisées il y a quinze jours et samedi ont bien démontré que ces mouvements étaient des mouvements minoritaires. Je suppose, que de marche en marche, elles ne feront pas mieux".

« L'Algérie n'est pas la Tunisie, n'est pas l'Égypte" a ajouté Mr Medelci, assurant que la mesure de levée de l’état d’urgence, instaurée en 1992, sera effective "dans les jours prochains".

Pourquoi alors un déploiement de forces à la hauteur d’une vaste opération de guérilla urbaine? Sans compter la manipulation évidente de groupes de jeunes venus crier des slogans à la gloire de Bouteflika.

Nul n'est dupe, le gouvernement a bel et bien pris la juste mesure de la montée en puissance de la contestation. La peur est là, qui le pousse à organiser une riposte: isoler le mouvement des démocrates qui mobilise surtout dans les couches supérieures des classes moyennes (intellectuels, artistes, journalistes, professions libérales, corps médical, enseignants), des autres catégories sociales.

Reste que par ailleurs des émeutes explosent à travers le territoire national quasiment au quotidien, autour de mots d’ordre liés à l’emploi, au logement, à la cherté de la vie et à la lutte contre la « hogra » (abus de pouvoir).

Une très probable jonction entre la masse des ouvriers, employés, chômeurs, laissés-pour-compte et les couches de la classe moyenne pourrait bien secouer sévèrement le régime, mettre le président Bouteflika en très mauvaise posture pour le reste de son mandant et contraindre finalement l’armée à prendre des mesures pour éviter le chaos dans un pays qui se relève à peine d’une décennie cauchemardesque.

Il est sans doute encore tôt pour avancer des hypothèses sur l'évolution des évènements. Mais il n’est peut-être pas sûr que l’armée soit disposée à faire la guerre au peuple pour sauver Bouteflika, les appareils politiques usés qui l’entourent et la nomenklatura engraissée par la corruption. La grande muette n'est certes pas indemne de reproches sur ce chapitre, seulement, et quoiqu'on en dise, elle n'est pas homogène et c'est toujours elle qui fait la pluie et le beau temps.

Tel est le risque calculé de Bouteflika.