Algérie. Les électeurs s'abstiennent massivement aux législatives
Par N.TPublié le
Moins d’un tiers des électeurs se sont rendus aux urnes pour élire les députés de la prochaine Assemblée nationale populaire. Le pouvoir poursuit sa feuille de route malgré la très faible participation.
C’est le fait marquant du scrutin : la grande majorité des électeurs algériens a tourné le dos aux urnes, samedi 12 juin, pour les législatives anticipées. Le taux de participation est de 30,2 % a annoncé l’Autorité nationale indépendante des élections (Anie) après la fermeture de bureaux de vote. Il avoisine 0 % dans les deux grandes villes de la Kabylie, Tizi Ouzou et Bejaïa.
Il atteint à peine 8,54 % à Alger. La plus forte participation est enregistrée dans le sud, à Illizi, avec 44,13 %. Les Algériens résidant à l’étranger, quant à eux, ont quasiment ignoré l’événement. Le taux est « très bas, moins de 5 % », a indiqué l’Anie, sans plus de précisions.
Selon cette même instance, les résultats définitifs « pourraient ne pas être annoncés avant les 96 heures conformément à la loi, car la réception des procès de dépouillement dure entre 3 et 4 jours ». Le climat de répression a dissuadé les électeurs.
Quelque 24 millions d’inscrits sur le territoire national et 90 000 à l’étranger étaient appelés à élire 407 parlementaires répartis sur un total de 58 circonscriptions électorales, en plus des quatre zones à l’étranger. Vingt-huit partis politiques (10 468 candidats) et 837 listes d’indépendants (12 086 candidats) étaient en lice.
Des affrontements ont eu lieu entre manifestants opposés aux élections et les forces de l’ordre dans la région de Bouira (est). Le scrutin se serait déroulé « sans incident » dans le reste du territoire.
« Ceux qui veulent boycotter sont libres, à condition qu’ils ne l’imposent pas aux autres. (…) Il m’est arrivé de dire que le taux de participation n’était pas important, ce qui est important, ce sont ceux qui sortiront des urnes et qui auront la légitimité nécessaire, parce qu’ils ont été élus par le peuple, pour prendre en mains le pouvoir législatif », a répondu à la presse le président Abdelmadjid Tebboune, à la sortie du bureau de vote.
Les islamistes donnés favoris
La forte abstention était ainsi attendue. Elle a été, fondamentalement, provoquée par les appels au boycott du hirak. Le climat de répression a fini par dissuader de nombreux électeurs.
Près de 200 détenus végètent en prison et les arrestations se sont poursuivies à la veille du vote. Les journalistes Ihsane El Kadi, directeur de Radio M et Maghreb Émergent, et Khaled Drareni, directeur de Casbah Tribune, ainsi que le militant politique Karim Tabbou ont été arrêtés le jeudi 10 juin puis relâchés après des interrogatoires tard dans la nuit de vendredi à samedi.
Les listes d’indépendants pourraient créer la surprise S’agissant de l’issue du scrutin, les islamistes ont été donnés favoris jusque-là. Le chef de l’État affirme être disposé à composer avec eux. Ils dirigeront l’exécutif, comme le prévoit la Constitution, s’ils sont majoritaires.
Les listes d’indépendants pourraient toutefois créer la surprise. Abdelmadjib Tebboune escompte y puiser la majorité présidentielle qui lui fait défaut.
Le sort des partis ex-soutiens du régime Bouteflika (FLN, RND) demeure pour l’instant une inconnue, mais leur présence relativement importante dans l’Hémicycle n’est pas exclue. La « rupture » n’est vraisemblablement pas pour demain.
Photo: H. Lyès El Watan