France : le tour de passe-passe de François Bayrou sur le dossier des retraites (Commentaire)
Par Nadjib TOUAIBIAPublié le
La montagne a accouché d'une souris. Le discours, très attendu, du Premier ministre François Bayrou devant le Parlement mardi 14 janvier, n'apporte rien de nouveau. Il se présente plutôt comme un copier-coller des mesures égrenées par son prédécesseur, Michel Barnier, avec quelques retouches à la marge.
L'emballement médiatique autour de la préparation de cette apparition dans l'hémicycle a connu le même flop. Il s'est même trouvé un plateau de télévision où l'on avançait l'hypothèse d'une grande surprise dans la besace du locataire de Matignon. Que nenni ! Les commentateurs ont été laissés sur leur faim, contraints désormais de faire le tri dans la parole du chef du gouvernement pour dénicher ce qui pourrait nourrir à nouveau les débats, entretenir le suspense sur la grande question du moment : censure ou pas censure ? Si ce n'est pas cette fois, quelle sera la prochaine ?
Hors des chantiers de l'endettement, des efforts budgétaires, de la simplification administrative, de l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, de l'immigration — sous forme de clin d'œil à Marine Le Pen — et du mode de scrutin législatif, c'est, sans surprise, la loi sur la retraite qui polarise l'attention de la classe politique.
Sur ce dossier, Bayrou se livre à un tour de passe-passe dont il espère tirer profit pour amadouer les socialistes et mener à l'éclatement du Nouveau Front Populaire, grande attente des médias de droite au cœur de tous les commentaires et interviews.
Le Premier ministre envisage donc d'organiser un « conclave » rassemblant politiques et partenaires sociaux qui devront plancher sur cette épineuse question de la retraite à la lumière de données fournies par la Cour des comptes. Charge à eux de s'entendre, et le Parlement sera alors saisi. Le cas échéant, c'est le texte voté à coups de 49,3 qui restera en vigueur, peu importe que la grande majorité des Français y soit opposée. Et le tour est joué.
La France Insoumise a, comme prévu, déposé une motion de censure quelques heures après la fin du discours de Bayrou. Communistes et écologistes annoncent qu'ils la signeront. La formation de Marine Le Pen leur tourne le dos. Les socialistes, quant à eux, se donnent un peu de temps pour trancher. En fin de compte, le gouvernement passera ce cap. La messe n'est pas dite pour autant. Reste l'étape décisive du budget. Et au-delà, celle des urnes, où les Français attendent au tournant tous ceux qui les ont bernés.