Egypte : La perle Alexandrie au cœur du trafic de croisières méditerranéennes, entre essor touristique et défi écologique
Le retour des paquebots de croisière à Alexandrie, à l’image du Norwegian Viva qui a transporté près de 14 000 passagers entre septembre et octobre 2025, symbolise la réintégration progressive de l’Égypte dans le circuit mondial du tourisme maritime.
Porte d’entrée historique de la Méditerranée africaine, le port d’Alexandrie investit dans la modernisation de ses infrastructures et dans une logistique portuaire hautement coordonnée, condition essentielle pour accueillir ces géants des mers longs de plus de 300 mètres.
Les escales répétées du Norwegian Viva traduisent un double enjeu : économique et stratégique. Le tourisme reste la première source de devises pour l’Égypte, et chaque accostage représente une vitrine pour le pays. L’État égyptien mise sur ces retombées pour stimuler les secteurs de l’emploi portuaire, du transport terrestre et des services aux voyageurs. Dans le même temps, Alexandrie se positionne face à ses homologues méditerranéens — Marseille, Barcelone, ou encore La Valette — dans une compétition régionale pour attirer les itinéraires de croisière reliant l’Europe, le Proche-Orient et l’Afrique du Nord.
Des pollueurs gigantesques
Mais cet essor pose une question de durabilité. Les navires de croisière sont parmi les plus grands pollueurs de la Méditerranée. À Marseille, la mobilisation citoyenne s’intensifie contre les émissions massives de dioxyde de soufre et de particules fines produites par ces bâtiments, responsables d’une pollution équivalente à celle de millions de véhicules. Les habitants réclament des limitations de trafic et un contrôle strict des escales estivales. Alexandrie, soumise à des conditions climatiques similaires et à une forte densité urbaine, pourrait bientôt affronter les mêmes tensions environnementales.
D’autant que l’impact économique local reste discutable. Les touristes débarquant pour quelques heures consomment peu dans les villes portuaires : ils déjeunent souvent à bord, dorment sur le navire et réservent leurs excursions via la compagnie. L’hôtellerie, la restauration et le petit commerce d’Alexandrie profitent peu de ces passages éclairs, contrairement aux ports de plus petite taille misant sur des séjours prolongés et des interactions locales.
Pour les pays méditerranéens africains, la question est désormais stratégique : comment capter les bénéfices d’un tourisme maritime mondialisé sans en subir les coûts environnementaux ? L’Égypte, en relançant Alexandrie comme escale majeure, illustre à la fois l’ambition et la fragilité de ce modèle. Entre modernisation portuaire, investissements logistiques et impératifs écologiques, la « perle de la Méditerranée » se trouve à la croisée des routes… et des choix à venir.