France 2 a révélé le visage de Mohamed Merah, le présumé meurtrier. (DR)

France : Après la tuerie de Mohamed Merah, bientôt un 21 avril 2002 bis ?

Depuis 3h du matin, ce mercredi 21 mars 2012, la France et le monde découvrent avec aberration le profil de Mohamed Merah. Ce jeune homme de 23 ans qui, encerclé par les hommes du RAID, a revendiqué son appartenance à la nébuleuse Al-Qaïda et reconnu être l'auteur des sept meurtres commis en trois temps, ces dix derniers jours.

Voici son atroce tableau de chasse : trois jeunes enfants scolarisés dans l'école confessionnelle juive Ozar-Hatorah, un professeur de cet établissement (père de deux des enfants assassinés) et trois militaires français d'origine maghrébine et antillaise... Tous abattus froidement, sous l’œil terrible d'une caméra qui serait aujourd'hui dans les mains des forces de l'ordre, nous apprend le gouvernement français, principal informateur de ces sinistres événements, par le biais de son ministre de l'Intérieur, Claude Guéant.

Un jeune à multiples facettes

Ainsi, après plus de 20 heures de siège dans le quartier toulousain de la Côte Pavée, on en sait plus sur Mohamed Merah, les médias, mobilisés en masse, faisant le reste du travail : garçon poli et calme pour son voisinage, bon carrossier pour son ex-patron, ce jeune, qui a grandi dans les quartiers nord de Toulouse, est aussi un délinquant condamné à plusieurs reprises par la justice et un aspirant légionnaire recalé... Il serait également, depuis plusieurs années, l'une de ces 20 personnes suivies en France par la DCRI (Direction centrale du renseignement intérieur) pour présomption de potentialités terroristes, en raison de son passage dans des camps d'entraînements afghans... Et il a fait preuve, ces dernières heures, d'une grande détermination. Une détermination à tuer, puis, une fois encerclé, à ne pas se rendre, malgré ses promesses de redditions successivement annoncées ce mercredi pour « 13h », dans l'« après-midi » et en « fin de soirée », pour finalement ne pas s'être encore rendu à l'heure où sont écrites ces lignes. Ses mobiles ? Venger les enfants palestiniens tués par Israël et s'opposer à la présence militaire française en Afghanistan, ainsi qu'à l'interdiction du voile intégral sur le territoire national, rapportent ses interlocuteurs « négociateurs »...  

Pour ce qui le concerne pleinement, le gouvernement affiche une volonté saluable de prendre l'ennemi public numéro 1 vif, plutôt que mort. Afin que le criminel s'explique devant la justice et ne parvienne pas à « fracturer notre communauté nationale », a souligné entre les lignes Nicolas Sarkozy cet après-midi à Montauban, lors de l'hommage national rendu en sa qualité de chef d’État aux trois militaires abattus par Mohamed Merah.

Une fracture ouverte

Problème : la fracture est déjà ouverte. Un seul exemple : Marine Le Pen, candidate à l'élection présidentielle du parti d'extrême droite qu'est le Front National, accuse déjà les autorités d'avoir « sous-estimé » le « risque terroriste » dans « notre pays »...

Un mois, jour pour jour, avant l'élection présidentielle française, la probabilité est grande, suite à un tel événement, de revivre, en 2012, un 21 avril 2002 bis. A cette époque, le candidat socialiste Lionel Jospin avait été évincé dès le premier tour à la faveur de Jean-Marie Le Pen (FN) qui s'était ensuite incliné face au Président sortant, Jacques Chirac, fondateur de l'UMP, un parti créé entre les deux tours, suite à ce séisme politique national.

Du pain béni pour le Président Nicolas Sarkozy, l'actuel candidat de l'UMP, qui surfe depuis longtemps avec son ministre de l'Intérieur Claude Guéant, sur le thème du choc des civilisations. D'autant plus qu'il se trouve depuis de longs mois en position difficile face au candidat socialiste François Hollande, jusqu'ici en grâce depuis sa victoire aux primaires citoyennes, avec un véritable plébiscite dans les sondages, même si ces derniers sont toujours à prendre avec des pincettes...

Le Pen-Sarkozy au second tour de la présidentielle ?

A la faveur de Mohamed Merah, le thème de l'insécurité s'invite à nouveau outrageusement dans la campagne présidentielle, alors qu'il était déjà omniprésent en 2007 et 2002 et s’avérait pour une fois, crise oblige, relégué derrière les thématiques fortes que sont notamment l'emploi, le pouvoir d'achat et le logement.

C'est aussi cela, Mohamed Merah, en plus d'être celui qui restera, dans la conscience collective, le tueur fou au scooter T-Max « made in » Al-Quaida : un jeune homme pris dans la folie de l'intégrisme et du fanatisme qui va fortement marquer les dernières semaines de la campagne présidentielle, vu le contexte naturellement émotionnel de cette actualité.

S'il a marqué les esprits, Mohamed Merah marquera aussi l'histoire, onze ans après l'acte de naissance d'Al-Quaïda délivré dans l'opinion publique mondiale, un certain 11 septembre 2001... A cet égard, les déclarations communes du CFCM (Conseil français du culte musulman) et du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives) contre l'amalgame entre la mouvance islamiste d'Al-Quaida et l'Islam de France qui « est une religion comme toutes les autres religions », sont plus que salutaires... C'est la seule vraie bonne nouvelle de cette semaine tragiquement marquée du sceau de la mort par Mohamed Merah.

N.E

Mise à jour du 22 mars 2012 : Le ministre de l'Intérieur Claude Guéant a officiellement annoncé ce midi que Mohamed Merah est mort, en fin de matinée, suite à l'assaut du RAID lancé après son nouveau refus exprimé hier soir à 22h45, de se rendre. Deux policiers ont été blessés, non grièvement, toujours selon la source du ministre de l'Intérieur, Claude Guéant.