Jeune homme retrouvé carbonisé à Marseille, la terrible vidéo prémonitoire
Par jcsPublié le
Il y a environ un an, le jeune homme, retrouvé carbonisé le week-end dernier, avait joué, dans un clip de rap, le rôle d'un petit dealer, exécuté puis brûlé par les patrons du réseau.
Avant-hier, sur Chroniques de Mars, le blog d'Olivier Bertrand, le correspondant à Marseille de Libération, évoquait l'existence de ce clip bouleversant.
La vidéo est signée Kalif Hardcore, l'un des membre du groupe Black Marché, et s'intitule Marseille La Kalash. Le jeune assassiné la semaine dernière y endossait le rôle d'un revendeur de haschisch, qui décide de braquer la nourrice des trafiquants (la personne chez qui sont entreposés du matériel ou de l'argent).
Le petit dealer de bas de bloc est vite rattrapé par les patrons du réseau qui l'embarquent dans un fourgon, le mènent à l'écart pour le cribler de balles et mettre le feu à son corps.
Le parallèle avec ce qui lui est arrivé en réalité est saisissant. Si on ignore pour l'heure quels sont les motifs qui ont conduit les tueurs à l'éliminer, on sait que ses derniers moments sont similaires au scénario du clip.
Lucidité et prise de conscience
Cette vidéo peut choquer, d'autant plus quand on connaît la fin tragique dans la vie. Les images sont dures, crues, la violence et les armes sont omniprésentes. Mais le propos du clip n'est pas de cautionner cette violence. Le ton général du film est suffisamment explicite pour qu'il n'y ait pas d'équivoque à ce sujet, même si l'engrenage de la vengeance sans fin y est clairement décrit.
Sur son blog, Olivier Bertrand explique qu'il a hésité avant de diffuser ces images. C'est celui qui les lui a montrées qui l'a convaincu de le faire, car elles peuvent avoir valeur de prise de conscience pour ceux qui pourraient être tentés de suivre cette voie.
Nous avons également décidé de les reprendre. Elles sont de toutes façons toujours accessibles sur You Tube, bien que Kalif Hardcore ait expliqué hier à La Provence, qu'il avait été décidé que le clip ne serait plus visible. Ce n'est pas encore le cas.
Au-delà de la prise de conscience, ces images prouvent aussi, si certains pouvaient encore en douter, à quel point les jeunes sont lucides dans les quartiers où sévit ce genre de trafic. Et avec quelle rapidité un destin peut basculer.
En un an, le jeune homme, qui montrait, dans une fiction hyper réaliste, le quotidien de son quartier, a été rattrapé et happé par cette réalité.
Les enquêteurs l'ont révélé, il était très peu connu des services de police. Il n'avait pas le profil à être mêlé à un règlement de compte d'une telle sauvagerie. Il avait fait manifestement quelques mauvais choix qui l'ont conduit à cette fin brutale.
Il y a quelques jours, sa mère, (Olivier Bertrand précise qu'elle joue dans le clip le rôle de la nourrice), a lancé un appel poignant pour que cesse cette escalade de violence insoutenable. Pour que les parents, les adultes, ceux qui sont témoins de l'engrenage de ces enfants, parviennent à le dénoncer à temps. Elle n'avait pu déceler la dérive dans laquelle s'était embarqué son fils.
La légalisation du cannabis en question
Les enjeux du trafic sont devenus immenses, ceux qui tiennent les réseaux sont prêts à tout, niant toute valeur à la vie, pour continuer à entretenir leur business.
Les territoires du marché du haschisch sont à la fois de plus en plus nombreux et de plus en plus réduits. Cela divise les quartiers en petites zones de contrôle à se répartir, et cela multiplie les passages à l'acte sanglants pour conserver la main-mise sur ce commerce lucratif.
Cela pose aussi une question que les autorités ne cessent de fuir et de refuser : la légalisation du cannabis. En octobre dernier, Vincent Peillon, le ministre de l'Education, avait déclaré être favorable à la dépénalisation, avant d'être vite recadré par le premier ministre Jean-Marc Ayrault.
Il y a quelques mois, Daniel Vaillant, l'ancien ministre de l'Intérieur de Lionel Jospin, s'était ouvertement prononcé pour la légalisation. Manuel Valls, qui occupe actuellement cette fonction, y est farouchement hostile et ne veut même plus en entendre parler.
La légalisation ne résoudrait sans doute pas tous les problèmes. Elle limiterait au moins les enjeux liés à ce marché. C'est une piste à explorer pour enrayer la spirale de violence qui gangrène les quartiers.
Ouvrir ce débat, déjà, de façon sereine et apaisée, est désormais urgent et indispensable.