Vacation, Yinka Shonibare Mbe

MP 2013: exposition"Le Pont", cheminements transbordeurs

Ce n'est pas un ouvrage d'art mais près de cent cinquante œuvres que l'exposition Le Pont nous offre à voir depuis le 25 mai et jusqu'au 20 octobre au Musée d'Art Contemporain de Marseille (MAC) et dans vingt-sept lieux de la ville.

Chacune à leur manière, ces œuvres sont des actes qui traduisent l'idée de circulation, de traversée, d'échanges et de regards croisés. A travers la Méditerranée mais pas uniquement puisque les artistes invités sont originaires du monde entier.

Ces propositions questionnent l'humanité d'aujourd'hui à partir des thèmes de la migration, de l'identité, de la biographie, de l'habitat, du sol, celui où l'on demeure et celui où l'on passe. En ce sens, elles indiquent comme le disait le sociologue Abdelmalek Sayad que « la migration est non seulement un itinéraire géographique mais une épistémologie ».

Espaces et mobilité:  "l'identité est une trajectoire"

Si le sens de ces créations n'est jamais donné a priori, toutes expriment que la mobilité géographique ressemble à un parcours de vie fait de continuité, de rupture, de stabilité et de mouvement. Toutes racontent ce processus physique et mental qui nous amène à une remise en cause proportionnelle à l'intensité avec laquelle nous prenons possession des lieux dans lesquels nous nous trouvons et réciproquement, ces lieux prennent possession de nous.

«Tandis que la circulation se prête aux expérimentations identitaires plurielles (... ), les temps et les espaces du travail artistique (la création artistique) sont de plus en plus structurés par la mobilité des acteurs » écrivaient Marco Martiniello, Nicolas Puig et Gilles Suzanne dans la Revue européenne des migrations internationales en 2009 (1).  A sa façon, Le Pont fait référence à Michel Foucault qui affirmait que « l'identité est une trajectoire ».

Elle le fait à l'aide de dispositifs et configurations extrêmement variés qui réunissent en un même lieu photographie, peinture, sculpture, vidéo et installations singulières. Que l'on pense ainsi à la Casserole de la Japonaise Mayura Torii (une marmite entourée d'une corde en fait), aux cosmonautes vêtus de tissu africain du Britannique d'origine nigériane Yinka Shonibare Mbe (intitulée Vacation), au journal du XXIe s. de Dan Perjovschi (The complete 21st century) ou à Road to exile II du Camerounais Barthélméy Toguo, barque remplie à ras bord de baluchons et entourée de bouteilles vides...

Des œuvres partout en ville

Mais l'exposition ne se cantonne pas aux murs du MAC, qui nous entraîne à travers la ville dans vingt-sept lieux aussi divers que la bibliothèque de l'Alcazar, le Museum d'histoire naturelle, la gare Saint-Charles, le quotidien La Marseillaise, l'esplanade Villeneuve-Bargemon, le théâtre de la Criée, le parc Borély, le Corbusier, l'église Notre-Dame du Rosaire, la Corniche J.F. Kennedy ou encore les Galeries Lafayette.

Et si «vivre, c'est circuler », comme le confiait tout récemment l'iconoclaste et inclassable Jean-Christophe Bailly à Télérama, pourquoi se priver d'aller à la rencontre d'une exposition dynamique et colorée qui nous pousse à nous déplacer en même temps que notre regard sur l'épreuve du voyage, de l'exil ou de l'errance dont témoignent sous des formes diverses ces productions.

(1) Créations en migrations : parcours, déplacements, racinements, Revue européenne des migrations internationales, vol. 25 – n° 2, 2009