Maison de l'Europe de Provence : un débat citoyen à Marseille sur la situation actuelle en Ukraine
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"C'est la crise la plus grave que l'Europe connaît depuis la fin de la Guerre froide", souligne la Maison de l'Europe de Provence dans son invitation pour un débat citoyen sur la situation actuelle en Ukraine.
Ce débat qui a eu lieu lundi 23 juin 2014 dans les locaux de la Commission Européenne à Marseille était animé par M. Merger, président de la Maison de l'Europe de Provence, en la présence de M. Vozdigan, Consul Général d'Ukraine à Marseille, M. Robin-Champigneul, chef de la Représentation de la Commission Européenne à Marseille, et Mme Dobryanska, présidente de l'Association Marseille-Odessa. La discussion était centrée sur les perspectives diverses de la société civile, des institutions européennes et de l'Etat ukrainien.
"Tous les quatre ans, mon pays change, c'est pour cela je suis optimiste"
Le Consul Général de l'Ukraine, M. Vozdigan, a ouvert le débat en exposant le changement survenu dans son pays depuis la chute de l'Union soviétique en 1989: avec l'occupation russe de 400 ans, les mentalités en Ukraine n'ont pas changé, constate le Consul Général. Cela se voit notamment dans la législature qui contient encore des lois russes. En conséquence, l'Ukraine garde une grande empreinte russe qu'elle ne cherche pas à contester, mais qu'elle intègre subtilement dans sa spécificité culturelle. C'est pour cela que même si les Ukrainiens sont dispersés en Europe (au Portugal seulement vivent 200.000 à 300.000 Ukrainiens) la culture ukrainienne est souvent perçue comme russe. La conscience de la spécificité ukrainienne en Europe n'a commencé qu'en 2004 en Europe, l'année où la Révolution Orange s'est opposée à l'ancien Président Janukowitsch. Tout en évoquant les années qui ont suivi, les tumultes politiques, les va-et-vient des mêmes hommes politiques et la recherche d'une stabilité dans une position charnière entre l'Union Européenne et la Russie, le Consul Général est certain que l'Ukraine va trouver sa voie: "Tous les quatre ans, mon pays change, c'est pour cela je suis optimiste".
"Toute l'Europe est surprise de l'ampleur de la révolte du peuple ukrainien"
L’insurrection de la population en 2013 à la place Maidan à Kiev montre avant tout que la population évolue plus rapidement que le gouvernement. Le mensonge politique du Président Janukowitsch, ses tergiversations entre les promesses en faveur des valeurs européennes en 2011 et sa soumission devant la Russie en 2013, quand il ne signera finalement pas l'accord d'association avec l'U.E., ont mené à son renversement. La rage des Ukrainiens se nourrit du goût de la liberté que le rapprochement avec l'Europe a suscité. La solidarité internationale intervient à un moment où la divergence entre les couches sociales s'accentue et où l'allocation des biens et des moyens financiers souffrent de la corruption. M. Robin-Champigneul souligne le moment novateur que marque cette révolution brusque et inattendue: "Toute l'Europe était surprise de l'ampleur de la révolte du peuple ukrainien".
"La liberté coûte cher et le peuple ukrainien prouve qu'elle lui est chère aussi..."
Le soutien de l'Union Européenne s'est exprimé en deux étapes, souligne M. Robin-Champigneul. La première étape est l’établissement d'un régime légitime après le renversement de l'ancien Président et la sécurisation de la population ukrainienne à la suite de l'agression russe. La stratégie guerrière de Vladimir Putine d'annexer la Crimée et d'infiltrer les villes industrielles et géo-stratégiquement importantes de Donesk et Luhansk avec ses forces civiles a coûté la vie à 356 Ukrainiens. Tout en regrettant profondément cette perte de civils, M. Vozdigan affirme fièrement que "la liberté coûte cher et le peuple ukrainien prouve qu'elle lui est chère aussi". Le représentant Poroschenko a récemment rédigé un programme de paix. Mais comment est-ce qu'il peut stabiliser l'État de l'Ukraine si Vladimir Putine poursuit une stratégie de déstabilisation?
"La Russie est beaucoup plus dépendante de l'Europe que l'Europe de la Russie"
Avec les éléctions de Petro Poroschenko, l'Ukraine a un nouveau Président qui guide les étapes de l'accord d'association et travaille ensemble avec l'Union Européenne sur la nouvelle constitution du pays. Le 25 juin 2014, s'effectue la deuxiéme étape qui contient l'aspect sectoriel économique: l'allocation et la gestion des visas, les tarifs douaniers, la facilitation des exportations vers l'Union Européenne, les échanges économiques et financiers et la lutte contre la corruption. De même, un plan financier accompagne l'accord, avec 11 milliards d'euros qui sont pour la plupart des prêts et non pas des subventions. Ces deux étapes de l'accord d'association seront accompagnées par la facilitation des dialogues entre Poroschenko et Vladimir Putine. Tant que le conflit ne sera pas résolu, l'U.E. ne cessera pas de chercher des moyens pour sécuriser la population, assurer l'intégrité de la nation ukrainienne et trouver une alternative pour l'approvisionnement en énérgie. Face à cette situation politique qui ne menace pas seulement l'intégrité territoriale de l'Ukraine, mais aussi la prospérité et la paix en Europe, M. Robin-Champigneul a tenu à rassurer le public en sulignant que "la Russie est beaucoup plus dépendante de l'Europe que l'Europe de la Russie", comme le montre les négociations en cours entre GazProm et le Commissaire européen de l'énergie Günther Oettinger.
Le jumelage des deux villes de Marseille et d'Odessa, une source de développement des projets
En faisant un état des lieux de la société civile en Ukraine, Mme Dobryanska met en lumière la farce que joue Vladimir Putine depuis l'annexion de la Crimée et l'influence de sa stratégie de déstabilisation: "Déjà, il ne faut pas reconnaître l'annexion de la Crimée", affirme le Consul Général. Et puis il ne faut pas accepter les prétextes de l'agresseur russe et se laisser tromper par le soutien de sa population: même les nouveaux réseaux sociaux ne peuvent rien faire contre la machinerie de la désinformation que les agences de média russe entretiennent depuis les premiers événements de 2013. (Cette désinformation consiste par exemple en la distribution des fausses images, come celles de la persécution de la grande minorité russe dans une ville soi-disant ukrainienne, mais qui se trouve dehors du pays.). Depuis les événements en Ukraine, Mme Dobryanska ne travaille que difficilement avec ses partenaires à Odessa et elle craint qu'elle sera la prochaine ville occupée par les séparatistes et groupes armés russes. Aprés les éléctions en 25 Mai 2014, la ville a élu un nouveau maire, mais comme le regrette la représentante de la mairie de Marseille, il ne s'est pas encore présenté officiellement. Néanmoins, le jumelage des deux villes Marseille et Odessa continue à développer des projets. La ville de Marseille compte exposer les résultats d'un échange des photographes de Marseille et d'Odessa à la Bibliothèque Alcazar en 2015. Ainsi, un photographe marseillais visitera Odessa en août 2014 pour se documenter et identifier les marques d'un changement politique. En espérant que le besoin de vivre en paix et la lutte pour le libre choix puissent trouver leur terme, dont ces témoignages photographiques pourraient être un présage !