Scène filmée par une caméra de surveillance dans un hôpital de Brooklyn (DR)

La face honteuse de la grande Amérique

L’accès au soin de santé tiré au sort ! Cette scène invraisemblable a eu lieu aux Etats-Unis, première puissance mondiale. Une centaine d’individus, hommes, femmes, enfants, vieillards, souffrants de maladie, en attente de traitements ou d’actes vitaux sont invités à piocher un numéro inscrit sur un ticket ; et comme au loto il y aura des gagnants, 25 seulement, qui auront droit à des soins gratuits… Les autres, les perdants, prendront leur mal en patience, tenteront leur chance ailleurs, ou reviendront à la prochaine séance s’ils sont encore en vie.

Les âmes charitables organisatrices de cette étrange loterie dans une clinique d’Arlington, à quelques kilomètres de Washington, se défendent d’être injustes en n’offrant pas les soins aux personnes les plus souffrantes, les plus menacées. Tous sont des malades refusés par d’autres établissements, disent-ils. Tous pauvres, ils sont donc condamnés à supporter leur maladie quelle qu’en soit la gravité. Peu importe l’état des uns et des autres, une seule règle prévaut : la santé au petit bonheur la chance.

Aux Etats-Unis, tomber malade quand on est pauvre est une descente aux enfers, la pire des choses qui peut arriver. Des millions de citoyens craignent de vivre ce cauchemar à un moment de leur vie personnelle ou familiale faute de moyens pour se payer des assurances très onéreuses. Le secteur de santé américain fonctionne ainsi, comme une terrible machine à exclure.

C’est dire l’importance de la réforme durement arrachée par Barak Obama, dont l’application d’ici à 2014 permettra à 32 millions d’américains, jusque-là non-assurés, de bénéficier d’une couverture pour leurs soins de santé.

En attendant, vu de France où l’accès aux soins, bien que constamment sous menace, est encore garanti par la Sécu et la CMU, cette scène sordide de la santé à la loterie fait froid dans le dos. C’est un pan de la face honteuse de la grande Amérique.