France : le garde des Sceaux devant la Cour de justice de la République (CJR)
Par N.TPublié le
C'est une première sous la Ve République : un ministre en exercice jugé devant la Cour de justice de la République (CJR). Le procès de Dupond-Moretti se déroulera du lundi 6 au mardi 16 novembre. La première ministre, Elisabeth Borne, lui exprime sa « confiance ». Sur les ondes de France Inter, elle a salué son « excellent travail » et son « droit à la présomption d'innocence ».
Eric Dupond-Moretti, est entendu pour des accusations de prises illégales d'intérêts liées à ses fonctions pour des enquêtes lancées contre des magistrats avec lesquels il avaient eu maille à partir du temps où il exerçait son métier d’avocat. Il reste en poste durant son procès.
La CJR est la seule instance habilitée à juger les membres du gouvernement pour des faits commis dans l'exercice de leurs fonctions. L’audience s'ouvrira au Palais de justice de Paris. La cour sera composée de trois magistrats de la Cour de cassation et de douze parlementaires.
L’interrogatoire de Dupond-Moretti est prévu au deuxième jour du procès. Ce dernier conteste avoir été à l'initiative les enquêtes administratives lancées contre des magistrats et a toujours exclu de démissionner.
Une situation qui n’est pas sans susciter une controverse dans la classe politique.
Le ministre est « le patron des magistrats », le « ministre d'une partie des députés qui le jugent » et l'avocat général « qui requiert contre lui doit toute sa carrière à la Macronie », a fait valoir Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, lors d'une interview sur Radio J, dimanche, craignant un procès « largement biaisé ».
Les accusations qui pèsent sur le ministre peuvent entraîner une peine maximale de cinq ans de prison, 500 000 euros d'amende, ainsi qu'une peine complémentaire d'inéligibilité et d'interdiction d'exercer une fonction publique.
Les faits remontent à fin juin 2020, en marge de l'affaire "Paul Bismuth" visant l'ancien président Nicolas Sarkozy. Le magazine Le Point avait alors révélé que le Parquet national financier (PNF) avait examiné les relevés téléphoniques de plusieurs avocats, dont M. Dupond-Moretti, pour découvrir une éventuelle taupe qui aurait informé M. Sarkozy et son avocat, Thierry Herzog, qu'ils étaient sur écoute.
Dupond-Moretti, proche ami de M. Herzog, avait dénoncé une « enquête secrète ». « Nous sommes entrés dans une République des juges », s'était-il insurgé et avait porté plainte.
La garde des Sceaux de l'époque, Nicole Belloubet, avait demandé une « inspection de fonctionnement ». Devenu ministre, M. Dupond-Moretti avait ordonné une enquête administrative contre deux magistrats et Eliane Houlette, procureure nationale financière, pour déterminer d'éventuelles fautes individuelles.