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Marseille : Regards croisés sur l’écriture dans les révolutions arabes

Associé au festival du livre de la Canebière, le 1er salon Méditerranéen des Publications de Femmes s’est tenu ce week-end à Marseille. Samedi après-midi, les deux manifestations proposaient une réflexion sur les enjeux des révolutions arabes. Regards croisés sur l’écriture de l’écrivaine franco-tunisienne, Sophie Bessis, de la poétesse syrienne Maram Al-Masri et de l’éditrice d’origine palestinienne et sénégalaise, Elisabeth Daldoul.

Autour du thème des exils et des voyages, Sophie Bessis a présenté samedi après-midi lors du festival du livre de la Canebière son récit Dedans dehors publié aux éditions Elyzad. Elle a raconté son attachement à «sa terre natale, aux murs blancs» et à ses racines tunisiennes. Mais aussi de quelle manière son histoire personnelle a croisé la grande Histoire. «Cette révolution est un peu notre enfant» a-t-elle déclaré.

Conscientes de l’enjeu des révolutions et du chemin qu’il reste à parcourir, elle a souligné avec son éditrice, Elisabeth Daldoul l’intensité de l’affect et de la libération de la parole. «Avec la révolution, les chaînes ont explosé. L’émotion est si forte et si inattendue que l’on ne sait encore que faire de cette liberté». Elisabeth Daldoul n’a pas encore reçu de textes de l’après 14 janvier : «les gens sont secoués». Il faut apprendre la parole libre, sans censure.

Les deux femmes sont convaincues de l’importance de «la circulation de la parole, plus uniquement nord-sud mais sud-nord et sud-sud !» Les éditions Elyzad publient depuis six ans des textes écrits en langue française. Un parti pris qu’Elisabeth Daldoul explique par l’envie de toucher un plus large public, d’ouvrir les frontières culturelles et d’abattre les clichés. «Il est temps de donner à lire nos lieux et nos territoires».

La dignité et la dignité intellectuelle sont également les mots clefs qui ont sous-tendu le 1er salon Méditerranéen des Publications de femmes. Cette année, un concours de nouvelles sur le thème de l’«exil» avait été lancé aux femmes des pays des bassins méditerranéens. Esther Fouchier, animatrice du débat, a regretté la censure exercée à l’encontre de la lauréate syrienne interdite par son pays de venir chercher son prix.

C’est avec beaucoup d’émotion et avec « toute [s]on humanité » que Maram Al-Mashri a évoqué la situation de son pays : «On n’y meurt pas de faim mais on est affamé de dignité.» Quel poids ont les mots face à l’atrocité des événements ? «Je suis poète et je viens normalement vous lire des poèmes. Malheureusement si la Syrie est très connue pour ses cerisiers, aujourd’hui je viens vous parler du sang de nos hommes et de nos fils qui coule». Hier, la poésie des arbres en fleur a laissé place à la douleur d’un pays pris en otage.

Isabelle Appy