Haïti : Six ans après le séisme, la population haïtienne à l’abandon face à l'ouragan Matthew !
Par N.TPublié le
L’ouragan Matthew a durement frappé début octobre une population haïtienne restée dans le dénuement malgré l’aide internationale, six années après un séisme qui a fait plus de 300 000 morts et des dégâts considérables.
Ils ont eu à peine le temps de se relever et de commencer à reconstruire avec le peu de moyens laissés après la rapine et les détournements organisés de l’aide internationale… Les Haïtiens comptent à présent leurs morts sur le passage de l’ouragan dévastateur Matthew, un vent fou accompagné de pluies diluviennes qui a balayé en seulement quelques heures les innombrables abris de fortune, installés sur les décombres du séisme de 2010.
Le bilan est terrible : 900 morts, des centaines de blessés, des centaines de milliers d’autres (300 000 au moins) dans un dénuement total, en attente d’aide humanitaire et sanitaire. «En raison de la coupure des voies de communication, les bilans sont encore provisoires. Pour le moment, le nombre de victimes est sans cesse révisé à la hausse. Les habitants du Sud et des quartiers populaires de Port-au-Prince ont besoin d’eau potable car les nappes phréatiques ont été souillées par les coulées de boue. Celles-ci ont rincé l’asphalte et percolé à travers des cimetières. Des milliers de mes concitoyens sont totalement démunis, sans toit, sans maison, sans vêtements, sans nourriture», alarme Martine Canal, pédiatre haïtienne et correspondante du Secours populaire français sur place.
Matthew a découpé les paysages, brisé des ponts, défoncé et inondé des routes, éventré des bâtisses, détruit plus de 80% des récoltes dans certaines zones et dévasté des villes entières, à l’image de Port-Salut, dans la péninsule méridionale, dont l’hôpital a enregistré, dès le 8 octobre, un premier cas mortel de choléra, cette autre peur qui hante désormais la population. Un tableau noir de la détresse dans un décor apocalyptique. Et, à nouveau, des questions inévitables : la «perle des Antilles» est-elle condamnée à subir sans résistance aucune les catastrophes naturelles auxquelles elle est exposée ? Pourquoi l’aide internationale n’a-t-elle pas profité à la protection de la population ? Difficile de démêler le vrai du faux dans un imbroglio aux mille et une facettes. Une chose au moins est sûre cependant : une grande partie de l’aide destinée à la reconstruction après le séisme de 2010 a été détournée de sa destination initiale.
1% des dons parvenus au gouvernement Haïtien...
Le site américain CounterPunch pointe pour sa part la responsabilité des États-Unis. L’aide de 379 millions de dollars qu’ils avaient consentie immédiatement après le séisme a été curieusement répartie. «L’agence américaine Associated Press a découvert en janvier2010 que 33 centimes de chacun de ces dollars avaient en fait été rendus directement aux États-Unis pour compenser le coût de l’envoi de troupes militaires (5 000 soldats à Haïti – NDLR). Pour chaque dollar, 42 centimes ont aussi été envoyés à des ONG publiques et privées comme Save the Children, le Programme alimentaire mondial des Nations unies et l’Organisation panaméricaine de la santé», révélaient les enquêteurs deux années après un séisme qui a fait plus de 300 000 morts.
Le gouvernement tout autant que les ONG et les entreprises haïtiennes ont été, semble-t-il, soigneusement tenus à l’écart de l’aide financière. «Seulement 1 % des dons a été envoyé au gouvernement haïtien», précise CounterPunch. Ce dernier cite également l’agence Associated Press, selon laquelle, «sur chaque dollar accordé par les États-Unis pour l’aide d’urgence, moins d’un centime est parvenu au gouvernement haïtien».
Ces mêmes sources indiquent enfin que les opérateurs économiques et associatifs haïtiens ont reçu des sommes dérisoires. De plus, « sur les 1 490 contrats attribués par le gouvernement américain entre janvier 2010 et avril 2011, seuls 23 d’entre eux avaient été accordés à des entreprises haïtiennes», a révélé de son côté le Center for Economic and Policy Research, un centre de recherche économique basé à Washington.
On l’aura compris, les États-Unis, comme sans doute d’autres pays donateurs, ont surtout financé leur business sur les ravages causés par le séisme. Six années après, la population de l’île rebelle à l’histoire tourmentée, entre répressions abominables, dictatures, fuite des cerveaux et ingérences étrangères, est à nouveau durement frappée faute de protection urbanistique et sanitaire. L’ouragan Matthew a levé le voile sur cette plaie honteuse.