Sous le chapiteau de la Fiesta des Suds (N. Bendjilali)

En direct de la Fiesta des Suds 2011 : des histoires étoilées à nous raconter

Il y a de la triade méditerranéenne (huile d’olive-vin-blé) favorisant le rencontre et les échanges dans le très populaire festival marseillais célébrant les musiques du monde. A la Fiesta des Suds on se réunit avec un art de vivre tout méditerranéen ! Et ce fut encore le cas ce week-end de coup d’envoi de la vingtième édition.

Entre amis, amateurs de culture, de musique, de danse, de partage, l’ambiance de ces deux premiers soirs à la fiesta était un peu comme celle de la rue méditerranéenne. A déambuler, à flâner, à grignoter, à regarder, à écouter.

A 19h, ce vendredi 14 octobre, le climat était doux et l’attente bon enfant devant les Docks des Suds. Une entrée à la fois intimiste et grandiose à la Fiesta par un espace jusqu’ici fermé au public transformé en Cathédrale d’images, proposait une rétrospective photographique des vingt dernières années sur écran géant. Et déjà, sonnait le coup d’envoi des festivités avec un feu d’artifice dont les flammes jaillissaient du mastodonte rappelant que cette année la Lucha Libre (le catch mexicain) et les surhommes qui la font vivre sont à l’honneur.

En prélude aux concerts puis en déambulation, La Banda du Dock emmenait dans la joie les festivaliers. Buvettes et guinguettes commerçaient dans une ambiance de féria, cependant que les bénévoles et salariés de la Fondation Abbé Pierre faisaient signer la pétition « mobilisation générale pour le logement » sous différentes formes dont une « pétition filmée » via leur vidéomaton, espace d’expression d’un témoignage ou d’une interpellation des candidats à la présidence de la République.

Et puis, le duo malien Amadou et Mariam donnait un concert généreux devant 8000 personnes, interprétant notamment quelques extraits de leur album attendu en janvier prochain avant de laisser la place au grand show de Kid Creole avec ses belles Coconuts dansantes.

Cheikh Zeïn
Cheikh Zeïn Mahmoud (chanteur soufi de Haute Egypte) et Tiko (Human Beatbox), deux des cinq artistes de Zaman Fabriq, à la fiesta des Suds 2011 ( Nadia Bendjilali)



Le lendemain, la fiesta avait un faible pour le flamenco. Et pour cause, le virtuose de la guitare flamenca, Paco de Lucia, était la guest-star de la soirée En attendant le concert donné par l’icône dans le majestueux chapiteau couvrant une grande partie de l’esplanade extérieure, le public a eu le plaisir de découvrir le groupe Zaman Fabriq (la Fabrique du temps), ensemble composé de cinq artistes proposant une musique où le chant soufi et populaire de Haute-Egypte, le saz turc et la flûte kaval (instrument pastoral des Balkans à l’origine) posent délicatement leurs mélodies sur des nappes de synthétiseurs, des sons de guitares saturés, le tout soutenu par l’énergie de la basse et du Human Beatbox (percussions vocales).

Le public a été surpris, puis charmé, enfin entraîné dans un concert alliant musiques actuelles et pratiques musicales rituelles et séculaires de l’aire méditerranéenne. C’est cela la magie de la fiesta : offrir la scène à d’audacieuses propositions musicales ! Nous avons interrogé Bruno Allary, au saz, à la mandole et à la guitare, mais également à la direction artistique de ce projet, à sa sortie de scène : « Pour moi qui suis guitariste de formation flamenco à la base, jouer ce soir, a été un vrai bonheur. Le public est venu et a réagi favorablement à ce que nous proposons qui est pour le moins surprenant et que l’on a choisi de densifier ce soir : une électrification forte qui exacerbe les spécificités de ces pratiques millénaires, chant soufi, saz et flûte kaval. La destinée de Zaman Fabriq c’est de faire entendre une même Méditerranée dans ce projet, et l’énergie rock, n’est pas ce que l’on pourrait penser, une couleur trop occidentale, mais bien une temporalité musicale plus universelle, qui ne rabote pas les angles et permet de conserver le caractère traditionnel et archaïque des autres composantes. »

Paco de Lucia
Solo de guitare de Paco de Lucia, le 15 octobre 2011 à Marseille (Nadia Bendjilali)



A 22h, sous le chapiteau, la foule était là, et faisait savoir par des applaudissements à l’artiste qu’il était attendu. A 22h15, Paco de Lucia entrait sur scène, accordait, puis, seul à la guitare, entamait son flamenco, une sorte d’épure qui impose le silence dans ses solos. Puis l’émotion du flamenco s’enrichissait de la venue sur scène de sept compagnons : l’imagination de l’harmonica d’Antonio Serrano, le chant vibrant de Duquende alternant avec la voix étonnante de David de Jacoba et en point d’orgue, la danse spectaculaire de Farruco, en prince du flamenco (fils, frère et petit fils de « bailaor ») emportant littéralement la salle dans la passion, et la magie de cet art. Salve d’applaudissements à 23h40, quand les musiciens quittaient la scène. Revenu seul sur scène, pour le rappel, Paco de Lucia offrait son âme de guitariste et beaucoup de cœur.

Ces deux premiers soirs, indéniablement la mayonnaise (ou l’aïoli pour faire honneur à la gastronomie provençale) a pris à la Fiesta. Quant à la fréquentation, elle est dores et déjà de 19000 à 20000 personnes, les étoiles sont bien au rendez-vous et les prochaines soirées réservent de belles surprises.

Pour télécharger le programme : www.dock-des-suds.org