Gilets jaunes : le Rassemblement national de Marine Le Pen joue sur du velours
Par N.TPublié le
Vers où les gilets jaunes vont-ils conduire la France ? La question s’impose désormais après quatre épisodes de manifestation et de violence, après 8 morts et des dégâts matériels considérables et au moment où le mouvement semble s’essouffler, malgré la persistance d’actes d’occupation de ronds-points et de vandalisme des installations de péage autoroutier.
Si l’on en croît la série de représentants autoproclamés qui défilent sur les plateaux de TV, les gilets jaunes ne comptent pas désarmer. Ils envisagent plutôt de rebondir sur le terrain politique à la faveur des prochaines échéances électorales et se veulent même porteurs d’une mesure historique: le référendum d’initiative citoyenne (RIC).
L’augmentation du pouvoir d’achat n’en reste pas moins la revendication centrale, somme toute légitime face à un pouvoir qui fait ouvertement le choix de privilégier le patronat et les couches aisées au nom de la théorie fumeuse du ruissellement.
Retraités, salariés pauvres, artisans et petits patrons, tous tétanisés par le spectre de la pauvreté, du chômage, de la faillite, se rejoignent ainsi dans un même élan de révolte. Ce faisant, ils se démarquent des partis traditionnels et des syndicats, entendent creuser leur propre sillon et remodeler le paysage politique.
A regarder de plus près, les gilets jaunes adoptent tout compte fait la même doctrine qu’Emmanuel Macron en campagne. Tout comme lui, ils se disent ni de droite ni de gauche, prétendent s’adosser à la société civile, apporter un nouveau souffle à la vie politique, remettre les choses à l’endroit dans la société. A la différence du chef de l'Etat, ils la jugent en revanche profondément inégalitaire, scandaleusement injuste.
La République en Marche, formation au pouvoir, et les gilets jaunes seraient-ils finalement le produit d’un seul et même phénomène : le déclin des partis et des syndicats ? On peut valablement penser que tel est le cas.
Cette régression a ouvert la voie au candidat Macron, prince du Cac 40, réputé moderne et pragmatique. L’artisan d’un projet illusoire, en fait, dans une France en panne. La peur du Front National et l’abstention ont fait le reste.
Dès lors, les gilets jaunes peuvent-ils à leur tour émerger au-dessus de la mêlée, constituer et imposer une nouvelle force, intégrer les institutions de la République ? Rien n’est moins sûr.
Le mouvement est en réalité une masse au contenu hétéroclite, fortement divisée, malléable, exposée à toutes les manipulations. Il n'émergera pas en tant que tel. L’extrême droite l’a bien compris, elle a aussitôt distillé ses slogans de haine, imprégné ses idées nauséabondes, infiltré le moindre espace, fabriqué des leaders… Exploiter la détresse de laissés-pour-compte, la belle aubaine !
Les autres formations, cantonnées au rôle de spectateurs, tentent à leur tour de racoler auprès des gilets jaunes. Elles découvrent que le terrain est déjà conquis et miné. Les fachos ont pris de l’avance. Ils attendent les premières récoltes pour les européennes de mai prochain. Ils n’en espèrent pas moins pour les municipales et même au-delà.
Marine Le Pen boit du petit lait. Son parti, le Rassemblement national, joue sur du velours. Il ne pouvait s'attendre à mieux.
L’explosion des gilets jaunes assombrit l’avenir immédiat de la société française. Celle-ci est désormais coincée entre le Macronisme, un projet sournois du grand capital contre le modèle social français, et la menace d’un populisme totalitaire et fascisant.
Il revient aux partis de gauche, à ce qu’il en reste, de se rassembler, et vite, pour enfin tenter une sortie de ce tunnel.