Le Collectif du 5 mai écrit à François Hollande, le président de la République française
Par nicolas éthèvePublié le
Le Collectif du 5 mai s'est rassemblé aujourd'hui devant la préfecture de Haute-Corse, à Bastia, pour lire et remettre une lettre ouverte à François Hollande. A l'aube du 21ème anniversaire de la catastrophe de Furiani, ils attendent toujours une sacralisation de cette journée dramatique qui a connu 18 morts et plus de 2300 blessés.
Ils se battent depuis des lustres pour la sacralisation du 5 mai. Pour dire : ''Furiani mai più'' ("Furiani, plus jamais ça " ). Des lustres... Bientôt 21 ans, précisément... Et aujourd'hui, ils étaient encore plus de 300 à se rassembler devant la préfecture de Bastia, à l'appel du Collectif du 5 mai, pour la lecture d'une lettre ouverte à François Hollande, le Président de la République.
Une lettre que Médiaterranée vous publie ici in extenso. Car en dépit de tous les efforts de discussion et de dialogue consentis par le Collectif du 5 mai et malgré la signature d'une pétition par près de 41 000 personnes (dont Didier Deschamps, Emmanuel Petit, Gérard Houiller et Louis Nicollin), 3 matchs doivent être joués le 5 mai, selon Lauda Guidicelli, pour le Collectif du 5 mai. Mais on ne sait pas encore lesquels, les matchs de la 35ème journée n'ayant pas encore été distribués par la LFP...
Un petit Marseille-Bastia ?
Cette 35ème journée verra notamment s'affronter Marseille et Bastia au Vélodrome, ainsi que Montpellier et Brest à La Paillade... Ce serait un comble de voir ces équipes jouer le 5 mai. Un comble aussi grand que d'assister au spectacle d'une équipe de football jouant au ballon, le jour anniversaire de cette catastrophe qui reste la plus dramatique de l'histoire du football français.
Un comble déjà vu avec, par exemple, la Coupe de la Ligue remportée par Lyon le 5 mai 2001 et le titre de champion de France remporté par l'OM en 2010. Didier Deschamps, alors entraineur de Marseille, avait d'ailleurs dit à ce sujet qu'il n'avait pas pu fêter le titre à cause de cette funeste date... Pour définitivement comprendre pourquoi, il suffit de lire cette lettre au Président, lue aujourd'hui à Bastia et remise en mains propres au Sous-préfet.
La lettre ouverte du Collectif du 5 mai à François Hollande
« Monsieur le Président de la République,
Le 5 mai 1992, il y a bientôt 21 ans, la Tribune Nord du stade Armand Cesari s'effondre causant la mort de 18 personnes et faisant plus de 2300 blessés.
Le drame de Furiani est toujours présent dans les mémoires.
Cependant, les mobilisations multiples de milliers de personnes tant en Corse que sur le Continent n'ont pu faire admettre l'ampleur nationale de cette catastrophe aux autorités du football et aux pouvoirs publics.
N'oublions pas que la chaîne de responsabilités est multiple : responsabilités locales, des autorités du football, du Gouvernement de l'époque et de ses représentants en Corse...
De plus, le Ministère de l’Intérieur avait été alerté en juillet et novembre 1991 de l’imminence d’une telle catastrophe après un accident survenu lors d’une fête de village dans les Bouches du Rhône (Ceyreste). Malgré cela, les Préfets n’ont semble-t-il pas été prévenus de ces risques et aucune note n'a été publiée.
Le comble de cette affaire est que l’Expert qui avait alerté le gouvernement (nous avons en notre possession les différents courriers et articles de journaux traitant de ce dossier) est celui nommé au lendemain de la chute de la tribune, afin de faire les premières constatations techniques…
La responsabilité de l’État est, par conséquent, engagée bien au-delà des quelques mois de condamnation avec sursis prononcés à l’encontre de l’un de ses représentants. L’État, à l’époque, n’a pas su ou n’a pas voulu jouer son rôle préventif, ce qui fait de lui l'un des responsables de cette tragédie.
Bien évidemment, les autres responsables ne sont ni dédouanés, ni occultés, cependant, Monsieur le Président, aux vues de ces éléments, il est temps pour vous, de prendre position sur notre demande de sacralisation et de respecter le soutien que vous nous avez apporté.
Nous vous interpellons, car le Comité Exécutif de la FFF n’a pas eu la décence de tenir compte des propositions, y compris celles qui faisaient l’unanimité, débattues au sein du comité de réflexion mis en place par Noël Le Graët.
Ainsi, la FFF et son appendice, la Ligue de Football Professionnel, gestionnaire du « foot-fric », n’ont pas souhaité faire du 5 mai un jour sans football. Et ce, sans nous donner de raisons, preuve de leur "je m'en foutisme" et de leur absence de valeurs universelles.
Il faut savoir que ceux qui dirigent les instances du football aujourd’hui, étaient déjà présents dans cette affaire, l’un en qualité de Président de la Ligue Nationale du Football, l’autre avec son cabinet d’avocats comme défenseur en cassation de la Fédération Française de Football. Nous comprenons mieux pourquoi tout a été fait (lobbying auprès de députés et cabinets ministériels, journalistes, familles du football…) pour ne pas tenir compte des revendications de sacralisation du 5 mai portées par les représentants des victimes. Il est en effet difficile d'être juge et partie!
On jouera donc le dimanche 5 mai 2013 et on pourrait même, comme en 2001 et 2010, faire la fête autour d’un titre ce jour-là, alors que les victimes, leurs proches et de nombreux citoyens commémoreront au même moment, comme tous les ans, la plus grande tragédie du sport français.
Monsieur le Président de la République, aujourd’hui, vous et votre majorité à l'Assemblée Nationale, avez la possibilité de transformer votre soutien par des actes concrets. Soutien confirmé par votre Ministre des Sports dans un courrier datant de septembre 2012. Ainsi, l’engagement pris par François Mitterrand, au lendemain de cette tragédie serait enfin respecté.
Pour cela, des députés de votre majorité, tout comme des députés de l’opposition ont initié des démarches législatives allant dans le sens de la sacralisation du 5 mai. Nous déplorons d'ailleurs que seul le projet de loi de l'opposition ait été approuvé et déposé auprès des bureaux de l'Assemblée Nationale, alors que celui de la majorité n'aboutit toujours pas à un consensus.
Nous vous demandons expressément d’accompagner ces initiatives qui doivent et peuvent transcender les clivages politiques, comme cela a été le cas ici en Corse à travers, par exemple, les motions votées à l’unanimité au sein de l’Assemblée de Corse sur ce sujet. Nous vous rappelons que ces deux motions ont été transmises au Gouvernement. Nous vous demandons, par conséquent, de prendre en compte cette expression forte et solennelle, sauf à exprimer une forme de mépris à l’égard des représentants élus de la Corse.
Sacraliser la date du 5 mai ne correspond nullement à une auto-flagellation, mais il s'agit bel et bien de restituer des valeurs humaines au sport, en un mot des valeurs sociétales, universelles...
Dans l’attente, et restant à votre entière disposition pour toute information complémentaire, nous vous demandons, à nouveau, de nous accorder une entrevue sur ce sujet.
Veuillez croire, Monsieur le Président de la République, à l’expression de notre profond respect. »
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