1000 suppressions d'emploi et deux navires en moins. C'est ce qui risque d'arriver à la SNCM...

Le destin de la SNCM est suspendu aux votes de la Collectivité Territoriale de Corse

Une grande partie de l'avenir de la SNCM se joue entre aujourd'hui et demain, au sein de la Collectivité Territoriale de Corse (CTC). Son président Paul Giacobbi y présente en effet un volet de délibérations qui pourrait bien sonner le glas de l'emploi avec pour seul horizon de la SNCM, la suppression catastrophique d'un millier de poste infligée aux marins corses et marseillais.

Déjà fragilisée en novembre 2011 par l'annulation de la DSP prononcée par la Cour administrative d'appel de Marseille, contre laquelle la CTC n'a pas fait appel puisqu'elle l'exonère de tout dédommagement à l'égard de la compagnie maritime et lui permet de redessiner une Délégation de Service Public (DSP) à moindre coût pour la collectivité, la SNCM a finalement pris connaissance ces dernières semaines du funeste dessein que lui prépare Paul Giacobbi.

Une DSP en baisse de 60%

Très rude à l'encontre de la compagnie régionale, comme le montre sa dernière interview publiée dans Corse-Matin, le président de la CTC a annoncé vouloir réduire la nouvelle DSP à sa portion congrue, avec une baisse de volumes de 60% pour la SNCM : 410 000 places pour les passagers au lieu de 2 millions dans la DSP actuelle (dont 1 million utilisées) ; et 1,4 millions de mètres linéaires pour le fret, en lieu et place des 2,9 millions dans la DSP actuelle (dont 1,6 millions utilisés).

Ces mauvaises nouvelles s'ajoutent à celles annoncées par Les Échos qui soulignaient déjà, le 22 février dernier, les deux grands axes sur lesquels Paul Giacobbi entendait faire des économies : à savoir, la suppression du service complémentaire qui permet de subventionner les rotations supplémentaires en période de pointe et la non-extension de la DSP au Port de Toulon, où la SNCM vient tout juste d'ouvrir une ligne en direction de Bastia pour concurrencer la compagnie « low cost » Corsica Ferries.

Des conséquences économiques et sociales

Conclusion arithmétique : « La compagnie va devoir se séparer au minimum de deux car-ferrys (qui ont transporté 540 000 passagers l'an dernier) et de 800 salariés sur 2000 », indique Marc Dufour, le président du directoire de la compagnie au Figaro. Ce qui signifie, du coup, que la SNCM ne pourra conserver que quatre cargos mixtes sur la Corse, souligne également le quotidien.

C'est dans ce contexte que le président de la SNCM, Gérard Couturier, a proposé à la CTC de lui céder les clés de l'entreprise pour l'euro symbolique, avec l'aval de Veolia Transdev actionnaire principale de la SNCM (66%), aux côtés de l’État (25%) et des salariés (9%).

Au-delà du slogan que Paul Giacobbi n'a pas manqué de taxer de « farfelu », cette « proposition sérieuse » du président de la SNCM a surtout permis de mettre en lumière le peu d'intérêt qu'exprime le Président de la CTC envers cette entreprise et ses salariés. Sans jamais s'inquiéter des conséquences économiques et sociales qu'elle rencontrera très vite sans une volonté politique forte de compensation et donc, de rééquilibrage.

Une volonté politique forte à l'orée de la présidentielle ?

A cet égard, le positionnement politique de Paul Giacobbi adhérent du PRG désigné par le PS pour les élections législatives est pour le moins surprenant à quatre semaines de l'élection présidentielle française. Car comment peut-on se réclamer de « gauche » quand on mène des politiques publiques qui se solderont par le licenciement d'un millier de salariés ? Avec un tel passif, comment peut-on se présenter à l'élection législative sous l'étiquette socialiste, alors que le candidat du PS à l'élection présidentielle défend l'idée d'un vaste projet de réindustrialisation ? La question reste posée... Et elle trouvera peut-être quelques éléments de réponse d'ici la venue de François Hollande en Corse samedi. Au moins au sein de son assemblée...

N.E

Mise à jour du 26 mars, 00h : La Collectivité Territoriale de Corse a voté vendredi la réduction de 60% sur la précédente DSP présentée par Paul Giacobbi. Avec les conséquences sociales et économiques que l'on sait... Les marins CGT ont déposé un préavis de grève pour le 27 mars. Avec, comme revendications, le respect du droit du travail français par le concurrent de la SNCM, Corsica Ferries, qui bat pavillon italien, et le soutien financier des propriétaires de la SNCM que sont Veolia Transdev et l’État. Parallèlement, la Collectivité Territoriale de Corse a également adopté la proposition d'une commission d'étude pour la création d'une compagnie maritime régionale.

Mise à jour du 28 mars, 12h30 : La grève prévue le mardi 27 mars a été annulée, la CGT sédentaires et la CGT marins ayant respectivement décidé de retirer et de suspendre leur préavis de grève. Une décision qui ménage l'activité commerciale de la SNCM. Et présage, peut-être, de la constitution d'un front commun entre la direction et les syndicats pour la défense de l'emploi et de la SNCM, dans ce contexte périlleux d'une réduction drastique de la DSP votée par la Collectivité Territoriale Corse ? Un comité extraordinaire doit être prochainement organisé. A suivre...