Marseille: L'accès à l'eau pour tous, une priorité pour les associations FNARS, Abbé Pierre et Médecins du Monde
Par tatianaPublié le
"Le droit d'accès à l'eau effectif pour l'ensemble de la population, qu'elle soit précaire ou non": tel est le combat qu'ont décidé de mener les associations Abbé Pierre, Médecins du monde et la Fédération des associations d'accueil et de réinsertion sociale(FNARS PACA-Corse-DOM).
S'étant rassemblées devant la Mairie de Marseille, les trois associations, soutenues par des militants, voudraient changer la donne. Ils espèrent faire signer aux différents candidats à la Mairie de Marseille une CHARTE D'ENGAGEMENT, composée de cinq points-clés. Le Directeur Régional de la Fondation Abbé Pierre a bien voulu répondre à quelques questions.
-Pourriez-vous nous présenter votre association et pourquoi avec "Médecins du monde" et la FNARS?
-Je suis le directeur régional de la fondation Abbé Pierre, je m'appelle Fatibou Aroua et cette initiative est une initiative collective des associations qui travaillent avec des personnes en grande précarité. Des personnes qui vivent soit dans les rues, soit dans les centres d'hébergements, soit qui fréquentent le CASO c'est à dire le centre d'accueil pour des questions de santé des Médecins du monde. Il se trouve que depuis quelques années, on s'aperçoit, chacun de notre côté, que les problèmes exprimés par les personnes en difficulté s'aggravent sérieusement.
-Pourquoi avoir choisi de manifester devant la mairie ?
-Ce n'est pas spécialement contre le maire actuel. On est venu devant l'hôtel de ville de Marseille pour d'abord vérifierqu'ils signent bien la Charte et aussi pour signifier au prochain maire qu'on suivra l'affaire parce que c'est bien à partir de la mairie que ça se joue.
-Dans votre communiqué de presse vous parlez de toilettes publiques hors d'usage, de bornes fontaines détériorées etc... Comment en est-on arrivé là et à qui la faute?
-On les a fermées, on ne les a pas gérées, on ne les a pas nettoyées, on n’a pas investi. C'est la faute à la collectivité publique qui n’a pas su gérer un accès et une gestion de ces biens-là. Je vous invite à aller dans d'autres villes par exemple à Aix en Provence, là-bas, nous n'avons pas un tel problème d'eau publique. Il y a des fontaines partout et elles ne sont pas détériorées. A Paris, vous avez des WC, des douches publiques, sans gardien sans que ça pose de problèmes.
-Vous militez pour l'accès à l'eau aujourd’hui. La qualité de l'eau peut-elle être garantie dans les lieux publics?
-Si vous voulez, j'ouvre le caniveau et je bois l'eau qui s'y trouve. L'eau est bien potable. La quantité d'eau utilisée pour le nettoyage de la ville est impressionnante, pourtant elle est potable. On est prêt à utiliser de l'eau potable pour nettoyer les rues mais on n’est pas prêt à en donner à un campement où il y a des enfants, des personnes âgées etc.... je ne comprends pas. C'est illogique.
-Quelles conséquences sur la santé de la consommation d'une eau non conforme?
-Quand vous ne pouvez pas vous laver, vous attrapez un certain nombre de maladies, des dermatoses, des puces du corps par exemple. Des hépatites A, des gastro-entérites lorsque vous buvez de l'eau qui n'est pas potable.
-Vous demandez dans le communiqué aux candidats de s'engager en faveur de l'ouverture et l'installation de sanitaires "dignes" et gratuits... j'insiste sur le mot "digne" qui renvoie à l'inégalité sociale?
-Pour nous à la fondation Abbé Pierre, les choses sont claires: quand on refuse l'accès à l'eau aux gens de la rue, c'est une manière de vouloir les expulser de cette ville sans le dire, c'est leur rendre la vie tellement impossible parce que pour boire un verre d'eau, se laver, si ils ne peuvent pas, comment ils font ? Le nombre de douches dans cette ville est ridicule par rapport au nombre de personnes sans abri: 9 douches pour toute la ville dans des centres d'accueils, des associations et ce n'est même pas public. C'est plus que de l'inégalité sociale, on parle à ce niveau d'exclusion sociale, de la pure exclusion sociale.
-Médecins du monde a réalisé une enquête sur les inégalités sociales et territoriales dans plusieurs villes. A quel rang peut-on classer la ville de Marseille?
-Sur toutes les questions, Marseille se positionne en dernier rang. Il n'y a pas un point sur l'accueil des sans-abris où elle est en tête et où le problème ne se pose pas. La ville de Marseille, c'est la seule dont la case est cochée dans tous les cas et c'est alarmant. C'est vraiment une question de volonté politique.
-La question de l'accès à l'eau doit-elle être une priorité pour les candidats?
-Dans l‘intérêt du reste de la population, pour éviter des épidémies, des désagréments à la population qui vit autour, oui.
-Qu'attendez-vous de cette manifestation? Au niveau des responsables de la mairie sachant que c'est une période d'élections et de promesses municipales. Et aussi des Marseillais en général?
-Qu'ils signent un engagement autour de choses simples: ce sont des WC accessibles, libres et gratuits dans la ville et en nombre suffisant, et gérés parce que vous avez raison, il y a eu des toilettes Deuco mais elles étaient payantes et pas gérées. Pourquoi? Parce que les gens ne mettaient pas assez d'argent. Mais bien sûr, qui sont ceux qui fréquentent ces lieux publics? Ce ne sont pas les plus riches. C'est une question de gestion. Aux Marseillais, on ne peut rien leur demander pour l'instant parce qu’il n'y a pas de douches, de WC publics, il n'y en a pas...
-Le PS a été invité mais n'est pas venu. Est-ce à dire qu'ils ne signeront pas la charte?
-Ils vont la signer. Je viens de les appeler pour leur dire qu'ils nous adressent un communiqué de presse pour confirmer leur signature. Le problème qu’il y a eu c'est que Patrick Mennucci était hier à Paris; il est rentré je crois hier soir ou ce matin? Son équipe de campagne a organisé un planning, je n’ai pas compris. Par contre l'UMP ne répond pas: Mr Padovani nous avait dit qu'il essaierait de la signer mais il est co-listier, pas tête de liste.
-D'autres manifestations ont-elles lieu en parallèle de celle-ci dans d'autres villes?
-Non, il n'y a pas d'autres manifestations. Nous nous sommes axés sur la ville de Marseille.
-Un mot sur le contrat signé avec Veolia?
-Je ne m'occupe pas du prix de l'eau. Nous ne sommes pas sûrs de mettre en régie privée ou en régie publique. La question de la régie privée, c'est inquiétant. On voit bien que la logique économique risque de prévaloir donc de poser effectivement un problème d'accès à l'eau à terme aux plus pauvres. Mais ça, c'est un problème plus large, ça touche tous les gens modestes. Et le prix de l'eau n'est pas donné. Mais ça, ce n'est pas notre premier problème. Nos organisations ne sont pas des organismes syndicaux...