Algérie: derrière la riposte à la chute du prix du baril, la question de la légitimité du pouvoir
Par N.TPublié le
Branle-bas de combat dans les coulisses de l’exécutif algérien… Le gouvernement se débat pour trouver des réponses à la chute brutale du prix du pétrole qui menace tous les équilibres budgétaires et dont les conséquences sont lourdes de risques. Reste que la montagne accouche d’une souris.
Outre le gel des recrutements dans la Fonction publique qui ne résistera sûrement pas au légendaire piston et aux passe-droits, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, demande à ses ministres de réduire les déplacements à l’étranger, les prises en charges des délégations étrangères, l’organisation d’événements… Il est aussi vaguement question de revoir la liste des projets d’équipement sous l’angle de l’urgence, d’accorder une priorité à l’achèvement de ceux qui sont en cours de réalisation, de faire plus « d’efforts » pour le recouvrement des taxes et « d’intégration » de l’économie informelle dans les circuits officiels…
Du coup, voilà que l’exécutif envisage de prendre ses distances avec le modèle d’une économie administrée de la rente. On parle désormais de développement du marché des capitaux et de réforme du secteur bancaire...
Ceci étant, les Algériens peuvent tout de même dormir tranquille, les réserves sont là, qui permettent de tenir encore quatre années ! Ils se doivent de plus de remercier Abdelaziz Bouteflika qui a veillé au règlement de la dette. Le pays est serein…
Pas de mesures chocs en direction des lobbys et des oligarques
Mr Sellal annonce tout compte fait une série de mesures à faible portée, destinées surtout à faire impression dans l’opinion, mais dont il ne faut pas attendre de grands effets sur la préservation de l’économie nationale, nourrie par la seule rente pétrolière.
Plus que la crise elle-même qui s’annonce, l’instruction aux ministres est particulièrement inquiétante. Elle ne comporte aucune des mesures chocs que les algériens sont en droit d’attendre d’un pouvoir qui les a mené si près de la catastrophe.
L’exécutif se garde bien en effet de s’attaquer aux lobbys de l’importation, de donner un grand coup de pied de cette fourmilière, de faire la chasse à ces prédateurs qui se nourrissent grassement de la vache à lait. Mais pourquoi le ferait-il sachant qu’il a instauré et renforcé un modèle économique et social fondé sur l’argent facile, qui fait la part belle aux nouveaux riches, qui permet de plus le recyclage passif et la récupération de réseaux d'islamistes ?
Pas question non plus de mobiliser le patronat qui a fait fortune à la faveur des investissements de prestige, de lui exiger d’orienter en urgence ses capitaux vers des investissements productifs créateurs d’emplois, de mobiliser et de mutualiser ses ressources pour des plans de formation en direction de la jeunesse laissé-pour-compte, bercée d’illusions, honteusement trompée par l’octroi facile de crédits destinés à des activités stériles dans une économie de bazar. Mais pourquoi les clans au pouvoir le feraient-ils, sachant qu’ils ont tous conclu un pacte d’alliance avec les différentes fractions de cette nouvelle armée d’oligarques pour se maintenir et protéger ses arrières au cas où ?
Tout autant que la crise conséquente à la chute du baril, la riposte du pouvoir algérien rebondit sans surprise dans le champ politique. Après le forcing pour un quatrième mandat d’un président sortant à bout de souffle, après tant d’erreurs accumulées dans la conduite de l’économie nationale, tant d’incapacité à stopper la gangrène de la corruption et de la gabegie, tant d’incompétences dans la gestion des secteurs clé de l’industrie, du commerce, des finances, la question de la légitimité du pouvoir est plus jamais posée.