Le sort des « migrants » : l’Europe en échec devant le fascisme rampant
Par N.TPublié le
Lamentable posture que celle de la grande Europe face au drame des réfugiés… Les gouvernants se livrent à des arrangements mesquins pour faire barrage et refouler les hommes, les femmes et les enfants qui risquent leur vie et périssent par centaines en mer pour fouler le sol de leurs territoires.
Le sommet qui s’est tenu jeudi 28 juin à Bruxelles dressent de nouvelles barrières autour de l’Europe forteresse. On se promet de renforcer les frontières extérieures, on envisage la création, sur une base volontaire, de «centres contrôlés», des zones de stockage et de tri d’êtres humains, en fait. Les non-éligibles au «droit d’asile», seront retournés vers leurs points de départs, livrés surtout aux réseaux mafieux de passeurs, d’esclavagistes et de tortionnaires. Et on s’accorde, enfin, pour empêcher les déplacements de réfugiés entre pays de l’UE.
Le texte est historique, juge-t-on. Il consacrerait une attitude à l’échelle de l’UE et mettrait fin à la dispersion, source de crise. En réalité, rien n’est moins sûr. L’accord fait surtout, pour l’essentiel, la part belle aux tenants de la ligne dure, aux leaders du fascisme rampant, en Italie, en Hongrie, en Autriche. Ceux-là ne pouvaient espérer meilleures conditions pour booster leurs discours de haine à l’égard des étrangers et des ONG qui viennent au secours des naufragés. Ces arrangements sordides accompagnés de tapages médiatiques creusent le lit de la xénophobie dont ils ont tant besoin pour prospérer.
L’histoire retiendra à quel point l’UE fait aujourd’hui fausse route, en dépit du bon sens. « Il y a un gain politique énorme aujourd'hui à jouer avec la peur de la vague migratoire, vague qui doit être relativisée », constate Hippolyte d'Albis - directeur de recherche au CNRS, professeur à l'Ecole d'Economie de Paris, interrogé sur le site de l’EXPRESS. Depuis 2015, les demandes d’asile ont considérablement diminué, note-t-il. «Rien que sur le premier trimestre 2018, elles sont en baisse de 25 % par rapport à la même période de 2017 et elles ne sont plus très éloignées de leur niveau de 2013, avant la crise en Syrie».
L’universitaire signe surtout, avec deux autres de ses confrères, les conclusions d’une recherche qui brise de fausses certitudes. «Les demandeurs d'asile ne sont pas un fardeau économique pour l'Europe !», démontrent-t-ils. «En utilisant des données statistiques de flux migratoires sur 30 ans dans 15 pays européens, nous montrons très clairement qu'il n'y a aucun lien de causalité entre l'augmentation du nombre de demandeurs d'asile et la dégradation des déficits publics ou l'augmentation du chômage. Nous montrons même que l'impact sur la croissance peut être positif à moyen terme : au bout de 5 ans, la richesse par habitat est supérieure de l'ordre de à 0,59 %», résume Hippolyte d'Albis.
Les dirigeants européens sont insensibles à ces démonstrations. Ils s’enlisent sur le terrain politique et identitaire. Ils alimentent la thèse d’une menace sur les racines chrétiennes de l’Europe. Du coup, les «populistes» (graine de fascistes en réalité) se frottent les mains. En France, six personnes sur dix estiment que l’on accueille trop de migrants, selon un sondage Odoxa-Dentsu Consutlting pour Franceinfo et le Figaro. Marine Le Pen s’en réjouit sûrement. Et Emmanuel Macron est confronté à son incapacité à préserver les valeurs de la République. «La multiplication des discours de responsables politiques (...) alimente les peurs et les fantasmes», dénonce Florent Gueguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité, interrogé par Franceinfo.
La porte est en effet grande ouverte à la régression. L’Europe est en échec devant le fascisme rampant.