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Edito: le soulèvement populaire égyptien à un tournant décisif

L’opposition égyptienne se radicalise. Un appel est lancé pour une marche géante et une grève générale mardi 1 février. L’annonce d’un nouveau gouvernement n’a pas calmé la colère de la rue, qui rejette fermement ce raccommodage à la hâte de l’exécutif.

L’armée s’est déployée autour des lieux stratégiques de la capitale, contrôlant rigoureusement les accès et les allées et venues, notamment aux alentours de la célèbre place Tahrir. Elle n’en juge pas moins que «les demandes du peuple égyptien sont légitimes» et assure «qu’il n’y aura pas de recours à la force».

La pression internationale s’accentue sur le président Moubarak. L’Union européenne lui demande «d’engager sans délais des réformes». Les Etats-Unis qui se sont exprimés dès dimanche en faveur «d’une transition en bon ordre», adaptent visiblement leur position officielle selon l’évolution du rapport de force. Sans le dire encore ouvertement, ils ne semblent plus disposés à soutenir coûte que coûte le Rais. Israël agite de son côté l’épouvantail des islamistes, prenant prétexte des déclarations des Frères musulmans.

Reste la parole massivement portée par la rue. Pour l’heure, les Égyptiens disent avec détermination qu’ils ne veulent plus du régime de Moubarak parce qu’il est dictatorial et injuste. Ils veulent le départ du Rais parce qu’il a incarné ce système trente années durant. Risquent-il pour autant d’ouvrir la voie aux islamistes ?

Une telle hypothèse, sans doute très commode dans des raisonnements hâtifs, ne résiste pas à l’analyse de la situation de l'Égypte d’aujourd’hui. Pour nombre d’observateurs, l’aspiration à la démocratie dans la modernité y est très largement partagée. Par ailleurs, sans sous-estimer leurs capacités de mobilisation, les Frères musulmans ne semblent plus être en mesure de faire basculer le pays dans un scénario à l’Iranienne. Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis leur période de gloire.

Peut-être faut-il tout simplement admettre enfin que les temps ont changé et qu’en réalité un même vent de révolte souffle dans les pays arabes à la faveur de conditions objectives. Un vent qui pourraient bien faire chuter une à une les dictatures et faire aussi barrage à l’intégrisme islamiste. Il faut y croire, deuxième du genre après la Tunisie, le soulèvement populaire égyptien est à un tournant décisif… vers la démocratie.