Des affiches du mouvement des indignés à Paris. (DR)

Des arabes aux indignés Madrilènes, l’année bleue de tous les printemps

En 2011, la révolution fut de couleur bleue, sur les pourtours d’une mer qui caresse des terres de civilisations. Bleue et aux odeurs de jasmin dans les rues de Tunis, un jour de printemps en hiver, quand des jeunes aux bras nus osèrent ce qui était jusque-là impensable : aller à l’assaut des citadelles d’un pouvoir confortablement installé des années durant dans le nid d’une dictature répugnante de corruption, de rapine, d’injustice, de népotisme, sous le regard consentant, voire complice des gouvernements occidentaux, à commencer par celui de la droite française aux déclarations de triste mémoire.

Bleue et fièrement baptisée du nom de la place Tahrir, « libération », centre nerveux de toutes les luttes dans la mégapole tentaculaire du Caire bouillonnant de la rage d’en finir avec le pouvoir pharaonique d’un Raïs qui attendait de passer tranquillement la main à sa progéniture. « Le peuple veut la chute du régime ! », a crié nuit et jour la Place Tahrir pour enfin redonner la parole au peuple, mais sans jamais baisser la garde face à la soldatesque qui continue à trôner et aux islamistes qui surfent désormais sur la peur et l’espoir des couches populaires.

Bleue et rouge, trempée du sang d’une guerre meurtrière pour venir à bout d’un despote fantaisiste assis sur des barils de pétrole, tantôt mis au ban des nations, tantôt courtisé pour les bonnes affaires sur le dos d’un peuple embastillé aux portes du désert. Une guerre qui laisse un pays en ruine et dont les populations civiles ont payé le plus lourd tribut.

Bleue et encore rouge du sang des manifestants qui tombent toujours au quotidien sous les balles de l’armée syrienne. Des milliers de morts, des villes assiégées, en état de guerre, et un autre despote illuminé cette fois, convaincu de son bon droit de tuer pour sauver son régime et qui joue habilement sur les divergences au sein de la communauté internationale. L’année 2011 s’achève en Syrie sur la visite guidée d’une délégation de la Ligue Arabe, incroyable mascarade sur un champ de bataille dont l’issue est incertaine, lourde de conséquences dans tous les cas.

Bleue enfin aux couleurs des « indignados », formidable souffle printanier qui se répandit un 15 mai de la Puerta del Sol à Madrid vers de nombreuses villes européennes et jusqu'en Amérique. Le souffle frais d’une jeunesse révulsée et solidaire par delà les frontières devant des systèmes injustes qui font la part belle aux oligarchies financières, pressurent les peuples à coup de plans d’austérité, s’accommodent du chômage de masse, creusent les inégalités et nourrissent la corruption.

2011 en Méditerranée fut ainsi l’année bleue de tous les printemps… des arabes aux indignés Madrilènes.