Les femmes premières victimes des intégristes qui occupent le nord Mali : paroles de réfugiées
Par N.TPublié le
De nombreuses femmes fuient la région du nord Mali vers la Mauritanie pour échapper à la dictature des hordes d’Al-Qaïda et de Ansar al-Din dont elles sont les premières victimes, contraintes de respecter des codes vestimentaires et qui subissent au quotidien des agressions physiques.
Plusieurs d’entre elles racontent le calvaire vécu entre les griffes des groupes armés, fous de Dieu, qui imposent leur loi.
"La population du nord du Mali ne voulait pas quitter sa terre. Mais les pratiques très dures imposées par Ansar al-Din et al-Qaida l'ont contrainte à s'enfuir", explique un militant touareg Boubakar Ansaru, cité par le site Magharebia.com.
"Alors que les hommes sont partis pour le front ou ont déjà fui à pied, les femmes, du fait de leur situation, restent dans les villes, en particulier à Tombouctou", rapporte Abdul Rahman Ag Atay, membre du comité de coordination de la jeunesse touareg dans le camp de réfugiés de M'Berra, proche de la ville de Bassiknou, dans le sud-est du pays, cité par le même journal.
Mariama Walet Mohamed, une réfugiée âgée de 28 ans raconte son calvaire. Selon elle, lorsque Al-Qaida et ses alliés au Maghreb islamique ont chassé le Mouvement national pour la libération de l'Azaouad (MNLA) de Tombouctou, cette ville du nord du Mali a changé au-delà de ce qui est imaginable.
"Je suis née ici et j'y ai passé toute ma vie, totalement libre. Je portais les vêtements que je voulais, et je me déplaçais librement où bon me semblait", explique-t-elle.
"Mais la prise de contrôle de la ville par les groupes de militants a totalement bouleversé ma vie. J'ai commencé à m'apercevoir que tout ce que j'avais appris sur l'Islam tolérant et la manière dont je vivais étaient considérés comme mauvais par les nouveaux maîtres de la ville", poursuit-elle.
"Depuis, lorsque je sortais habillée comme j'avais l'habitude de le faire, j'étais agressée et battue parce qu'une partie de mon corps était exposée", décrit-elle.
"Au départ, nous avons tenté en tant que filles de résister à ces principes très stricts imposés par les djihadistes. Nous avons été battues à coups de bâton et jetées en prison."
Une autre réfugiée, Fadimetou Walet Bibi, 50 ans, relate également les souffrances endurées, au nom de l’Islam.
"J'ai connu la guerre des années 1990 contre l'armée malienne, qui a fait de nombreuses victimes. Mais le traitement infligé par ces militants a été pire, parce que la torture et la restriction des libertés peuvent être plus sévères que la mort", explique-t-elle.
"Je suis venue dans ce camp de réfugiés lors des récents affrontements entre le MNLA et le Mouvement pour l'unité et le djihad en Afrique de l'Ouest, en compagnie de mes quatre filles."
"Mes filles et moi avons été battues à plusieurs reprises par les djihadistes à Tombouctou alors que nous allions au marché", ajoute-t-elle.
"La raison en était toujours la manière de nous habiller, qu'ils considéraient comme non islamique. L'une de mes filles souffre encore de fortes douleurs au dos et aux jambes après avoir été battue par des jeunes partisans d'Ansar al-Din."
Et Walet Bibi d'ajouter : "Le plus étrange, c'est que ces jeunes, qui n'ont aucune expérience de la vie, se voient conférer une autorité totale pour diriger la population et appliquer la sharia."