Déchaînement de violences en Grande-Bretagne (Photo: Xinhua)

La violence en Grand-Bretagne, comme un boomerang

Le feu couvait autour d'un concentré de sentiments d'injustice, de frustration, de marginalisation, de rejet dans une société britannique de plus en plus fracturée, entre nantis et démunis, et parmi ces derniers, une majorité de jeunes désarçonnés, livrés à la rue sans filet, hors de tous les circuits scolaires, parentaux; d'ados et de presque adultes réfractaires, fiévreux de colère et d'un trop plein d'envie d'en découdre, par la casse et le pillage.
Le feu couvait et il suffisait d'une étincelle pour qu'il enfante émeutes sur émeutes au cœur des grandes villes du royaume, dans une ambiance stupéfiante de guérilla urbaine, mettant au défi le plus jeune premier ministre britannique à la mine habituellement réjouie, visiblement dépassé, tout autant d'ailleurs que les forces de l'ordre qui ne s'attendaient pas, loin s'en faut, à une explosion de cette ampleur. Et pour cause, la société britannique n'a pas connu pareille situation depuis les émeutes de 1985, presque trente ans.
A l'inverse de la France notamment, où les fameuses cités de banlieues dites «sensibles» accueillent massivement des générations de familles d'origine étrangère et des populations pauvres, la Grande-Bretagne a préservé et développé un modèle de «mixité sociale», mêlant au cœur des villes des citoyens d'origines sociales différentes. En favorisant une telle coexistence dans un même espace urbain, ce modèle a créé un équilibre très Britannique, jusque-là épargné des violences urbaines. Quelques mois d'une politique ultra-libérale ont cependant suffi pour en saper les fondements, le faire imploser dans des conditions effroyables. Les coupes sévères dans les dépenses publiques et les budgets sociaux ont évidement frappé les plus vulnérables, les plus faibles, dont les jeunes surtout, sans qualification ou insuffisamment armés pour s'en sortir dans un contexte de crise économique. Carrément jetés hors de la société dont l'économie est en panne, ils veulent désormais y rentrer par effraction.
Un peu plus d'un an après son arrivée à la tête de la coalition conservatrice libérale, David Cameron reçoit comme un boomerang une politique qui a attisé le feu de la colère des laissés-pour-compte au point de provoquer un déchaînement de violences.