Donald Trump est-il un chef d’État fasciste d’un nouveau genre ? (Édito)
Par Nadjib TOUAIBIAPublié le
C’est le seul président au monde dont l’oreille droite a été bénie suite à une blessure lors d’un attentat manqué. Dieu en a voulu ainsi et Donald Trump a été miraculeusement sauvé, maintenu en vie pour diriger l’Amérique. Ses partisans l’attendaient et le Tout-Puissant avait entendu leur message. Ainsi soit-il.
Ce délire obscurantiste du 47e président des États-Unis a fait le tour du monde. Ses propos surréalistes ont galvanisé ses partisans, déjà sous l’emprise d’un culte de la personnalité d’un autre âge. Le milliardaire qui s’est forgé une image d’homme politique hors catégorie, fantasque et jusqu’auboutiste est entré en scène avec fracas, comme il n’avait cessé de le promettre. Partout, du Capitol jusque dans les bistrots et les chaumières de nombreux États, l’idée fiévreusement martelée de la puissance retrouvée contre le reste du monde, d’un très prochain bain de richesse, d’un nouvel âge d’or, est désormais répandue. Trump est à la fois homme providentiel, justicier, redresseur de torts et Père Noël. Une partie de la grande Amérique est comblée.
Mais une fois ces choses dites, qui ont d’ailleurs abondamment nourri les commentaires à répétition sur les plateaux de télé, qu’en est-il de la réalité de cette bascule politique et sociale ? Où va cette puissance mondiale dont l’influence peut être redoutable, qui fait d’ores et déjà trembler l’Europe, inquiète les opinions publiques ? Osons la question tout net, et sans attendre : le phénomène Trump marque-t-il l’arrivée d’un fasciste au pouvoir, un fasciste d’un nouveau genre ?
Si l’on s’en tient à la batterie d’annonces le chemin est tracé dans cette direction. Le ton est donné, il présage des heures sombres qui pourraient surprendre jusqu’aux plus fidèles, y compris dans l’aéropage de multimilliardaires qui se sont précipités aux premiers cercles.
Donald Trump ne cache pas sa volonté de piétiner la Démocratie. Il projette de s'écarter de l'État de droit et de tordre la Constitution si cela sert les intérêts de sa politique. Il commence par gracier ses partisans qui ont tenté de renverser le Congrès pour annuler le vote présidentiel en janvier 2021. Il légitime ainsi la violence au service d’un ordre.
Trump réaffirme et poursuit des politiques d’exclusion de certaines populations en définissant l'identité américaine par des critères culturels et raciaux. Sa présidence a été marquée par un décret interdisant l'entrée sur le territoire américain à des ressortissants de pays à majorité musulmane, ainsi qu'un discours et des promesses politiques ciblant principalement l'Amérique latine, avec un accent sur les expulsions et le mur à la frontière mexicaine. Il diabolise aussi ceux qui s'affranchissent des normes traditionnelles de genre, menaçant les droits des femmes et des personnes LGBT+.
Le 47ème président des États-Unis est bien installé. Il peut tranquillement consolider les assises du régime totalitaire dont il ne s’est jamais caché
Trump utilise habilement et en priorité les réseaux sociaux pour communiquer directement avec ses supporters, leur donnant l’illusion d’une proximité et d’un langage sans tabou qui leur est plus accessible. Cette stratégie rappelle la relation directe établie par les leaders fascistes des années 1930 avec leurs partisans. La presse qui ne lui est pas aveuglément favorable pourrait connaître de bien mauvais jours. Les censeurs et autres inquisiteurs sont en embuscade.
Trump, enfin, s’est assuré la présence d’une Cour suprême conservatrice en plus d’une majorité républicaine au Congrès. Son pouvoir est blindé. Il s’est entouré d’une oligarchie fortunée dont il garantit les intérêts en échange de soutiens de toute nature et sans limites. Le 47ème président des États-Unis est bien installé. Il peut tranquillement consolider les assises du régime totalitaire dont il ne s’est jamais caché. Le nouvel occupant de la Maison Blanche est un fasciste version moderne, au temps de la dictature des réseaux sociaux entre les mains d’hommes d’affaires enivrés de leur influence sur les opinions à l’échelle planétaire. La balle est tragiquement dans le camp de ce qui reste comme contre-pouvoirs et d’une partie de la société civile. L’Amérique est à un tournant.