préserver un réseau national performant, comme en témoigne la hausse de 4% du chiffre d’affaires hors Marseille en 2024

Fermeture des Galeries Lafayette à Marseille : un séisme économique et symbolique pour le centre-ville

La nouvelle a frappé comme un coup de tonnerre : les deux magasins Galeries Lafayette de Marseille fermeront définitivement leurs portes fin 2025. Un coup dur pour les 145 salariés, les clients fidèles, et une ville déjà fragilisée par des années de mutations économiques et sociales. Mais derrière ce double départ se cachent des enjeux bien plus profonds, révélateurs des défis que traversent les centres-villes français.  

Ouvert en 1977 en plein cœur de Marseille, le magasin du Centre Bourse a longtemps incarné l’élégance commerciale de la cité phocéenne. Mais le quartier, désormais dominé par des enseignes discount comme Lidl ou Action, a progressivement éloigné sa clientèle historique. À l’inverse, le Prado Shopping, inauguré en 2018 à deux pas du stade Vélodrome, n’a jamais trouvé son public. Entre vacance commerciale chronique et perturbations liées aux matchs de l’OM, l’enseigne premium n’a pas résisté à la concurrence des Terrasses du Port, qui attirent 9 millions de visiteurs par an.  

10 millions d’euros de pertes annuelles : l’impasse économique

  
Le groupe Galeries Lafayette justifie cette décision par des pertes récurrentes – 10 millions d’euros par an cumulés pour les deux sites – malgré 30 millions investis en dix ans. La pandémie de Covid-19 a accentué l’hémorragie, accélérant la chute de fréquentation. Mais le vrai problème réside dans le décalage croissant entre l’ADN premium des Galeries Lafayette et les nouvelles réalités marseillaises. Le Centre Bourse attire désormais une clientèle en quête de prix bas, tandis que le Prado souffre de l’absence d’un écosystème commercial cohérent.  

Marseille face à son destin : requalification ou déclin irréversible ?

L’annonce a été vécue comme une trahison par les employés, dont certains l’ont découverte en direct via les médias. Les syndicats dénoncent un manque de transparence sur les plans de reclassement, tandis que la municipalité tente de rassurer sur l’avenir des emplois. Mais la fermeture symbolise surtout la dérive d’un centre-ville où le taux de vacance commerciale atteint 30% au Centre Bourse, amplifié par les émeutes de 2023 et la désertion des enseignes de luxe.  

La ville promet de revitaliser ces espaces. Le Centre Bourse pourrait accueillir la future cité judiciaire, transformant un lieu de consommation en zone administrative. Au Prado, malgré l’arrivée récente de Mango ou Zara Home, le départ des Galeries Lafayette laisse un vide inquiétant. Ces fermetures posent une question cruciale : comment réinventer les centres-villes à l’ère des géants du discount et du e-commerce ?  

Galeries Lafayette : un recentrage national malgré l’abandon marseillais 

Nicolas Houzé, directeur général du groupe, défend une stratégie claire : préserver un réseau national performant, comme en témoigne la hausse de 4% du chiffre d’affaires hors Marseille en 2024. Le futur magasin de Nîmes, prévu pour 2026, confirme cette logique. Mais à Marseille, c’est une page historique qui se tourne, rappelant que même les icônes du commerce ne survivent pas sans s’adapter aux mutations territoriales.  

Cette double fermeture n’est pas qu’un fait divers local. Elle illustre la spirale infernale qui touche nombre de centres-villes : paupérisation des clientèles, concurrence des zones périphériques, inadaptation des modèles économiques. Pour Marseille, l’enjeu est désormais de transformer l’essai – ou de voir son cœur urbain sombrer un peu plus. Une course contre la montre où se joue bien plus que l’avenir de deux magasins.