Crise franco-algérienne : comment les pyromanes ont relancé l'escalade diplomatique
Par N.TPublié le
La relation franco-algérienne semblait pourtant sur le point de connaître une amélioration significative après des mois de tensions inédites depuis l'indépendance de l'Algérie en 1962. Une conversation téléphonique entre les présidents Macron et Tebboune le 31 mars 2025 avait acté une volonté commune de « donner une nouvelle ambition à la relation » dans un « esprit d'amitié » . Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot s'était rendu à Alger le 6 avril pour concrétiser ce rapprochement, évoquant une « nouvelle phase » entre les deux pays.
Une accalmie fragile réduite à néant
Cette fragile embellie a volé en éclats en l'espace de quelques jours sous l'effet d'une série de provocations et de calculs politiques à courte vue. Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, connu pour sa ligne dure envers l'Algérie, a joué un rôle central dans cette rechute. Alors que la diplomatie tentait d'apaiser les tensions, Retailleau a persisté dans une attitude vindicative, multipliant les menaces autour du dossier des Obligations de Quitter le Territoire Français (OQTF).
L'affaire Amir DZ : une provocation calculée
Le point de basculement survient avec la médiatisation soudaine de l'affaire Amir Boukhors, alias Amir DZ, un influenceur algérien réfugié en France depuis 2023. Ce « yotubeur » passe son temps à dénigrer le pouvoir algérien sur les réseaux sociaux. Les interrogations sont nombreuses sur ses sources de financement et ses liens supposés avec RACHAD, une organisation islamiste classée terroriste par Alger.
Le 8 avril 2025, un agent du consulat algérien de Créteil est arrêté en France, mis en examen et placé en détention provisoire pour son implication présumée dans l'enlèvement d'Amir DZ. Alger crie à la provocation, d'autant que l'affaire est rendue publique au moment même où les relations semblaient se normaliser. Le gouvernement algérien accuse explicitement Retailleau d'avoir orchestré cette mise en scène, le qualifiant de « ministre qui excelle dans les barbouzeries à des fins purement personnelles ». Le membre du gouvernement est en effet candidat à la présidence de son parti Les Républicains et l’hostilité à l’égard de l’Algérie est devenue un de ses arguments de campagne.
La spirale de la surenchère
La réaction algérienne ne se fait pas attendre : le 14 avril, Alger expulse 12 agents français « placés sous l'autorité de Bruno Retailleau », leur donnant 48 heures pour quitter le territoire. Une mesure présentée comme « souveraine » et ciblant spécifiquement le ministère de l'Intérieur plutôt que l'ensemble de l'appareil diplomatique français.
Paris répond par une mesure symétrique le 15 avril : expulsion de 12 agents diplomatiques algériens et rappel de l'ambassadeur français Stéphane Romatet pour consultations. L'Elysée dénonce une décision « injustifiée et incompréhensible » qui « dégrade brutalement » les relations bilatérales.
Cette escalade sans précédent depuis 1962 s'inscrit dans un contexte médiatique particulièrement inflammable. La presse de droite et d'extrême-droite française jette de l'huile sur le feu, Personnage au passé professionnel pour le moins trouble, Xavier Driencourt, ancien ambassadeur en Algérie, connu pour son hostilité à l'égard de ce pays, prend en permanence la parole sans concession pour le voisin méditerranéen.
Alors que certains journalistes évoquent désormais une possible rupture des relations diplomatiques, la crise atteint un niveau de gravité inédit. La balle est désormais dans le camp des présidents Macron et Tebboune pour éviter que cette escalade ne devienne irréversible. En attendant, c’est la victoire des pyromanes