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Contez moi le bled... auprès des tisseuses de Bou Saad

Photo: Samuel KellerÉcouter les tisseuses parler, chanter et partager leurs secrets, c’est ce qu’ont fait Samuel Keller et Michael Zeidler, commissaires de l’exposition « Un lieu, des liens… ». « La rencontre est née d’une coïncidence et du hasard.». Ainsi commence le conte moderne d’une rencontre entre deux cultures.

Lors de la fête de la Transhumance à Die (Drôme), Samuel Keller se lie d’amitié avec les tisseuses de Bou Saad, petit village tunisien au sud du pays, niché contre le Djebel Orbata. L’échange des invitations se fait naturellement : « Les portes se sont ouvertes dans une confiance totale. Nous avons reçu autant que nous avons donné. Ces moments précieux ont permis une osmose, une authenticité. »

Samuel Keller et Michael Zeidler en rapportent des photographies, un film et des souvenirs. Bou Saad est un lieu à l’écart, protégé du travestissement touristique. Un lieu où l’histoire des vies se tisse. Il y a Rached et sa voiture en panne, surnommée « le dromadaire du désert ». Il y a Hedi, l’instituteur qui se prend au jeu du reportage pour conter son village. Il y a Belgacem Amara, ancien chef du canton venu vivre en France. Et ces enfants qui s’amusent dans l’aire de jeux.

Le bled est à l’image du conte. Survivance du passé, il est un idéal secret fait de codes et d’ambiguïté. Tout à la fois réel et imaginaire, il devient le lieu des fantasmes et des souvenirs déformés. La deuxième partie de l’exposition convie artistes, scientifiques et individus à raconter le « bled », leur bled. « Le mot bled est riche de signification. Il cache toute une vie, et autant d’histoires qu’il y a de personnes » explique Michael Zeidler.

L’artiste espagnol, Isidro Ferrer, affiche en volume son attachement au bled. Les entrailles du personnage de carton qu’il a imaginé sont devenus un labyrinthe. Le cœur, une maison. Le bled forme l’organe de vie, lieu de notre premier amour et de nos émotions naïves, qui continue à battre malgré la distance et le temps.

L’appel à contribution lancé dans la presse le prouve : des dizaines de témoignages ont été recueillis et exposés. Dominique questionne son frère retourné au bled 60 ans après leur départ: « As-tu revu la maison avec son petit perron ? Y a-t-il encore les deux pierres romaines gravées de chaque côté de l’entrée ? Y a-t-il encore les grands eucalyptus le long de la piste sableuse?…» Les interrogations restent en suspens pour mieux retenir la vérité et laisser le souvenir du bled rejoindre l’intemporalité du conte.

Isabelle Appy

 

L’exposition « Un lieu, des liens » se poursuit jusqu’au 16 avril 2011 à la Bibliothèque départementale.

Renseignements : 04 91 08 61 00 - http://lomnibus.chez-alice.