La crise n'est pas une fatalité, ni son lot de privations et de souffrances...
Par N.TPublié le
L’épisode du coup de semonce asséné par la Troika (Union européenne, BCE, FMI) aux banques chypriotes, marqué notamment par la tentative de racket des petits comptes, a fait passer au second plan l’effondrement économique de l’ile qui se profile.
Pour les chypriotes le plus dur est à venir dans la spirale d’une récession inévitable sous la pression du rouleau compresseur « austérité », à l’image de la situation tragique de millions de ménages espagnols, grecs, portugais, italiens, brusquement privés d'emplois, de soins de santé publique et d'éducation, de prestations sociales, précipités dans la misère.
Les constats sont en effet effarants : près de 26 millions de chômeurs en Europe, dont une grande majorité de jeunes, plus de 26% en Espagne, 16,9% au Portugal, 11,6% en Italie, 10,6% en France, où les associations humanitaires poussent par ailleurs un cri d'alerte devant l'augmentation impressionnante des demandes d'aides alimentaire, devant la détresse des sans-abris, des retraités aux revenus modestes, des travailleurs pauvres...
La crise financière, nous dit-on, qui a ébranlé les économies interdépendantes, est à la source de ces dégâts sociaux dont on ne voit plus la fin.
Mais la crise est-elle une fatalité ? De quelle logique participe-t-elle ? Quelles peuvent être les alternatives ?
Pour qui veut s'en contenter, il y a évidement les explications toutes trouvées, copieusement servies à longueur de journée dans les médias par des "experts", dont les expressions savantes entrecoupées de repères chiffrés et de statistiques nous parlent de mécanismes qui paraissent infiniment complexes, hors de portée du quidam contraint seulement d'en subir les effets sur sa vie quotidienne, ses projets à court et moyen terme.
Un prétexte et une opportunité…
Que n'a-t-on pas entendu à propos des "subprimes" aux États-Unis, de l'éclatement des bulles immobilières, des titres "pourris", de la crise de confiance entre banques, de la panique des marchés financiers, des faillites bancaires, du durcissement des conditions de crédits aux entreprises et aux ménages, du ralentissement des investissements et de la consommation, de la décroissance, de la récession de l'économie mondiale, de la mise en péril de la zone euro...
Reste que cette crise dont on nous rebat les oreilles à longueur de journée épargne étrangement les nantis, les catégories sociales aisées... L'industrie du luxe ne s'est jamais mieux portée, les milliardaires se gavent et leur nombre ne cesse de croître, les salaires des grands patrons atteignent des seuils indécents.
Reste que la crise est le prétexte tout trouvé pour mettre les salariés en concurrence, écraser les rémunérations, transformer le travail en marchandise jetable, briser les acquis sociaux, imposer tout simplement des conditions d'exploitation d'un autre temps.
Reste enfin que les grandes entreprises se saisissent de cette "opportunité" pour mener de supposées restructurations, plans de licenciements et de délocalisation déguisés, dans le seul intérêt des actionnaires et du taux de profit.
Une régression multidimensionnelle…
La crise est en réalité indissociable du capitalisme, dont le fonctionnement dans un environnement globalisé met en péril les progrès sociaux, soumet le travail créateur de richesses à la domination du capital. Comment ne pas reconnaitre que la période que nous vivons se caractérise par une régression multidimensionnelle ?
En effet, le monde d'aujourd'hui est plus que jamais sous la coupe des puissances d'argent et les gouvernements soumis à la pression des marchés financiers.
Les politiques d'austérité imposées aux économies de la zone euro en difficulté participent précisément de ce schéma et de cette logique. Elles alimentent inévitablement le cercle vicieux de la récession et de la pauvreté, ouvrent un boulevard au populisme le plus abject, favorisent la montée des intolérances, de la xénophobie et du racisme.
L'Europe libérale incite à un nivellement par le bas des rémunérations et des droits sociaux, pousse à la remise en cause des acquis, crée les conditions d'un recul des services publics.
Les firmes internationales et les gouvernements liberaux ou conservateurs s'accommodent fort bien par ailleurs des régimes totalitaires, des dictatures, ferment les yeux sur les atteintes aux droits et aux libertés individuelles les plus élémentaires. Rien ne les rebute, pas même le travail des enfants, ni l'exploitation éhontée, ni les salaires de subsistance.
Un front social planétaire…
Ici même, en France, le Medef et la droite profitent de la conjoncture pour imposer la flexibilité du travail, généraliser la précarité, engranger les exonérations patronales sans contreparties, ouvrir des brèches dans le modèle social construit et défendu par des générations de salariés.
Le capitalisme mondialisé génère cette régression et s'en nourrit. Il est à la source de ce terrible paradoxe d'une pauvreté croissante dans un monde toujours plus riche.
La rupture de cet engrenage pernicieux n'en reste pas moins possible. Elle passe avant tout par le rassemblement des forces de gauche en France et en Europe, et par le soutien aux mouvements progressistes à travers le monde autour de mots d'ordre communs: la redistribution des richesses, la réhabilitation de la valeur Travail, le renversement de la domination du capital, la résistance au diktat des marchés financiers. Plus que jamais, le front social est planétaire.
En France, comme partout ailleurs, la crise n'est pas une fatalité, ni son lot de privations et de souffrances...