La "lettre à un ami socialiste" de Pierre Verdier, colistier de Philippe Saurel aux régionales
Par nicolas éthèvePublié le
Dans une longue lettre publiée sur son compte Facebook, l’ex-socialiste présenté par Philippe Saurel en tête de liste départementale des Citoyens du midi dans le Tarn pour les régionales de décembre, répond publiquement à un courrier adressé par un « ami » du PS.
Dans cette missive, Pierre Verdier évoque Jean Jaurès, la maladie d’appareil dont souffrirait le PS et son envie originelle de combattre l’extrême droite qui a aussi motivé son engagement dans les régionales sur le territoire Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, au côté du Président de la Métropole de Montpellier. Médiaterranée publie ici cette lettre in extenso.
La lettre de Pierre Verdier à un ami socialiste
"Cher F.,
J'ai bien reçu ton message. Venant d'un ami que je sais sincère, il m'a touché et m'incite à prendre le temps de t'écrire. Je vais essayer de le faire pour essayer de te faire comprendre (à défaut d'adhérer à) la démarche dans laquelle je me suis engagé.
J'entends ce que tu me dis quand tu me parles des femmes et des hommes comme toi qui militent pour leurs idées et leurs convictions. J'ai beau être élu depuis bientôt une quinzaine d'années, c'est toujours le sentiment qui anime mon engagement au quotidien. Et je pense que c'est comme ça qu'il faut faire de la politique. Les postes importent peu. Ce qui compte, c'est ce que l'on peut apporter au collectif.
(je pense à la phrase de Jaurès dans son discours à la Jeunesse : "le courage, c'est d'agir et de se donner aux grandes causes sans savoir quelle récompense réserve à notre effort l'univers profond, ni même s'il lui réserve une récompense.")
L'un des moteurs de mon engagement est la lutte contre l'extrême droite et le Front National, parce que, dans le fonds comme dans la forme, ils incarnent tout ce qui est aux antipodes de l'idée que je me fais de la politique, celle du vivre ensemble et de l'effort collectif en faveur des plus fragiles et des plus démunis.
Force est de constater aujourd'hui que les partis traditionnels ne savent pas contrer la montée de l'extrême droite. Pire : l'image qu'ils donnent au quotidien (tu vois, c'est là que j'aurais pu par exemple évoquer l'idée de la présidence déléguée dont tu me parles dans ton courrier) est un facteur accélérateur de rejets des magouilles politicardes et du "tous pareils !".
Tu connais mon histoire. Tu sais que j'ai toujours pu compter sur le soutien de gens d'horizons divers pour l'emporter, sans jamais avoir le soutien ni du PS ni d'autre parti, tout en étant clair sur mes convictions. Et dans mes mandats d'élus depuis 14 ans (maire de Couffouleux pendant 2 mandats, conseiller général pendant 7 ans et aujourd'hui maire de Rabastens depuis l'an dernier), j'ai toujours essayé d'être un élu qui écoute et qui explique en assumant mes responsabilités, pas un élu qui dicte et qui impose.
Beaucoup des gens avec lesquels je discute ne disent que du mal de la politique et des politiques. Et, quand je leur dis que je suis un politique moi aussi, ils rétorquent : "oui, mais vous (ou toi), c'est pas pareil...". Combien sommes-nous à entendre régulièrement ces propos ? Nombreux. Très nombreux dès lors qu'on essaye, dans nos responsabilités et au plus près du terrain, de résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés tout en conservant le contact avec les "vrais" gens. Je l'ai écrit lors de la dernière campagne électorale : les élus ne sont pas une caste à part, ils sont des gens comme les autres avec des responsabilités particulières.
Je crois que c'est ce que les partis ont perdu de vue, plus préoccupé par des logiques d'appareils et de postes à conserver pour un camp que par la volonté de faire : enfermés dans ces logiques, ils sont incapables de proposer des perspectives.
En tant qu'élu, il ne faut pas seulement aller sur le terrain pour faire de la représentation. Il faut veiller à garder un vrai contact avec les gens et les réalités vécues au quotidien.
J'ai retrouvé ça dans la démarche de Philippe Saurel quand je l'ai entendu d'abord, puis lu et enfin rencontré. Je me retrouve dans la proximité qu'il entretient avec les gens, dans sa volonté et dans sa capacité à avancer sur les projets. La lecture de son livre - "Réparer la République" - m'a permis de mettre des mots sur des choses que je ressentais et ouvert des perspectives de renouvellement des pratiques politiques s'appuyant sur ce qu'il a déjà commencé à mettre en oeuvre à Montpellier depuis son élection l'an dernier.
Quand il a annoncé son intention d'être candidat à l'élection régionale de Décembre, j'ai tout de suite senti que ça valait le coup d'être tenté. Parce qu'il n'est pas né de la dernière pluie. Parce qu'il a prouvé qu'il savait faire (il est aujourd'hui le seul maire de gauche à la tête d'une grande ville dans le sud de la France !). Et parce qu'il sait mobiliser et donner envie.
Non, il ne s'agit pas de formule ou de potion magique. Simplement, au-delà du constat de la nécessité de "changer de logiciel" utilisé par les partis politiques, il s'appuie sur cette proximité pour proposer des pistes qui prennent en compte l'évolution de la société et des pratiques quotidiennes des "vrais" gens.
Et j'ai décidé de m'engager à ses côtés, non par rejet ou pour régler des comptes, mais parce qu'il y a urgence. Parce que l'incapacité actuelle des acteurs politiques traditionnels à apporter des réponses et à engager de nouvelles pratiques politiques laisse le champ libre à l'extrême droite, au Front National et à ceux qui veulent remettre en cause la démocratie et la république.
Tu vois, contrairement à ce que certains veulent faire croire (c'est toujours plus facile d'accuser que de se remettre en question), loin de moi la déception et la tentation de régler des comptes ou de renier des valeurs qui guident toujours mon engagement. Simplement, la société et le monde qui nous entoure changent. Et nous devons aussi être en capacité de nous adapter. Il n'est plus possible de se contenter de l'incantation "Droite/Gauche" ou d'agiter le chiffon rouge de l'extrême droite. Je n'ai pas envie d'avoir comme seul moteur la peur d'une nouvelle progression du FN pour aller voter.
Au vu de leurs pratiques actuelles, les élections sont une chose trop sérieuse pour être laissées aux mains des partis politiques.
Je m'apprêtais à subir cette élection régionale. Je n'avais aucune ambition pour les Régionales. J'avais en tête que l'élection n'était pas faite pour quelqu'un comme moi, qu'elle était verrouillée par les appareils des partis soit pour conforter des caciques soit pour faire élire des gens qui, sans le système de liste et de proportionnelle, n'auraient aucune chance d'être un jour élus sur leur nom et leur qualité propres.
(dans mon engagement politique, je n'ai jamais cherché à plaire ou à monter dans les appareils. Même quand j'ai été à l'intérieur, j'ai toujours essayé de dire ce qu'étaient mes convictions et contribuer à aller vers ce qui m'a semblé être la bonne direction, quitte à déplaire).
Avec ses Citoyens du Midi, la démarche de Philippe Saurel m'a redonné l'espoir de changer les choses et l'envie de m'impliquer pour en être partie prenante.
Bien sûr, il faut un brin d'utopie et aussi du courage. Mais ce n'est pas pour rien que le Discours à la Jeunesse de Jaurès - et notamment tout le passage sur le courage - est LA référence de mon engagement politique...
Voilà. J'aurais pu encore écrire bien d'autres choses et j'espère avoir su exprimer ce que je ressens. Merci de m'avoir accordé quelques minutes d'attention. Mais, même si ton courrier n'appelait pas forcément de réponse, il était important pour moi de t'expliquer ma démarche.
Amitiés,
Pierre"