France : des sans-papiers menacés d’expulsion après des années de travail chez Chronopost
Par red avec agencesPublié le
Des travailleurs originaires du Sénégal et du Mali, employés chez Chronopost dans le département du Val-de-Marne, qui demandent depuis plusieurs années leur régularisation, sont sous obligations de quitter le territoire français (OQTF), alors que leurs demandes d’obtention de titres de séjours sont en examen.
Les syndicats Solidaires 94, Sud-PTT Val-de-Marne, et le Collectif des travailleurs sans-papiers de Vitry-sur-Seine (CTSPV) dénoncent des décisions arbitraires, conséquence directe du durcissement des conditions de régularisation décidé par le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau
La lutte de ces travailleurs pour obtenir un statut légal a débuté en décembre 2021. Leur objectif principal était de réunir les documents nécessaires pour déposer une demande d'admission exceptionnelle au séjour (AES), un processus pouvant leur accorder un titre de séjour malgré leur situation irrégulière. Ces documents incluaient des certificats de concordance, qui attestent de la reconnaissance de leur emploi sous un alias par leurs employeurs, et des promesses d'embauche.
En juin 2023, 32 dossiers ont été soumis à la préfecture du Val-de-Marne : 18 concernaient des grévistes de Chronopost, et 14 provenaient de soutiens à leur cause, incluant notamment des travailleurs impliqués dans d'autres luttes similaires depuis 2019. Sur ces 32 demandes, seuls 15 ont été approuvées, dont un nombre restreint pour les travailleurs de Chronopost.
« Trois années de grève et de lutte balayées »
Cela a laissé 17 dossiers toujours en suspens, et malgré un engagement oral de l'ancienne préfète à ne pas émettre d'OQTF pour les travailleurs de Chronopost, cinq obligations ont été reçues de façon inattendue, semant la consternation parmi les syndicats.
Dominique Gilardi, secrétaire adjointe de Sud-PTT Val-de-Marne, dénonce l'arbitraire flagrant de ces décisions administratives. « Trois années de grève et de lutte ont été balayées d'un revers de main, malgré la complétude des dossiers fournis, » explique-t-elle avec amertume. Les efforts considérables déployés pour rassembler les documents requis n'ont apparemment pas pesé lourd dans la balance décisionnelle de la préfecture, qui persiste dans sa réticence, même face à un nombre significatif de pièces justificatives.
Gilardi met également en lumière le « silence total » et l'absence de communication de la part de l'administration, une attitude qui renforce le sentiment d'arbitraire et d'injustice parmi les travailleurs concernés.
Cette situation s'inscrit dans un contexte politique complexe. Selon Dominique Gilardi, la circulaire Retailleau, qui stipule de nouvelles conditions restrictives pour la régularisation des sans-papiers, ajoute une couche de difficulté aux démarches déjà ardues de ces travailleurs.
Elle déplore également une montée des idéologies défavorables à l'immigration, illustrée par la progression du Rassemblement National, ainsi que le désengagement de La Poste, maison-mère de Chronopost, qui rejette la responsabilité de ses pratiques sur ses sous-traitants.
Cette affaire prend une ampleur particulière en raison des liens historiques de lutte des travailleurs sans-papiers, qui se battent non seulement pour leur régularisation, mais aussi pour faire valoir leur contribution à l'économie et leur intégration. Un rassemblement pour la régularisation des travailleurs sans papiers est organisé devant la préfecture vendredi 21 février à 16h.