Montpellier : la présidente de la LDH écrit au Préfet au sujet des réfugiés somaliens
Par nicolas éthèvePublié le
Sophie Mazas, la présidente de la Ligue des Droits de l'Homme à Montpellier, a adressé une lettre ouverte au préfet de Région. Elle y dénonce le coût exorbitant que représente pour la collectivité, l'acharnement procédural subi par les réfugiés somaliens.
Infatigable défenseuse des droits des sans-papiers au barreau de Montpellier, Sophie Mazas, la présidente de la LDH dans la capitale du Languedoc-Roussillon, a pris sa plume pour écrire au préfet Pierre de Bousquet de Florian. Dans sa lettre ouverte, l'avocate spécialisée dans la défense des droits des sans-papiers évoque le sort réservé aux demandeurs d'asile somaliens, régulièrement transbahutés de Montpellier au centre de rétention de Nîmes pour ensuite revenir à la case départ ; mais aussi celui des militants héraultais qui les défendent et doivent prendre la route du Gard, plutôt que de pouvoir se rendre au centre de rétention de Sète, où ces réfugiés Somaliens pourraient également être placés, sauf à vouloir fatiguer les solidarités, ce que Sophie Mazas sous-entend dans son courrier.
Un peu d'humour pour faire passer la facture
La présidente de la LDH Montpellier y dénonce aussi, avec le même humour aiguisé, le coût exorbitant induit par la politique en vigueur en matière de lutte contre l'immigration, aujourd'hui sous l'égide du ministre de l'Intérieur Manuel Valls. Soit plus de plus de 18 000 euros pour chaque placement en centre de rétention, selon la dernière estimation de la Cimade. Un coût d'autant plus exorbitant qu'il est supporté en ces temps de crise où l'« austérité » est pourtant de rigueur, alors que, selon Sophie Mazas, la jurisprudence est claire : les sans-papiers présents à Montpellier le sont encore pour longtemps, puisque l’État français est aujourd'hui dans l'incapacité juridique de les reconduire chez eux, l'Etat somalien n'existant plus... Médiaterranée Languedoc-Roussillon publie ici sa lettre ouverte au Préfet, in extenso...
La lettre ouverte de Sophie Mazas, présidente de la LDH Montpellier, au Préfet
« Monsieur le Préfet,
Je me permets de venir vers vous concernant les demandeurs d'asile somaliens de Montpellier, un peu usée de devoir une fois par semaine me déplacer sur Nîmes pour plaider le dossier de l'un d'entre eux, placé en rétention à Nîmes, tout comme les militants associatifs et d'autres confrères en charge de ses dossiers.
Si je me réjouis du travail de fond que je peux faire dans leur dossier, poussant les limites procédurales sans aucune crainte, aucun Somalien n'ayant été reconduit depuis deux ans que nos accords de réadmission avec des pays tels la Libye ne peuvent plus être mis en œuvre, je trouve ce processus un peu vain.
Outre le questionnement sur l'inadéquation du centre de rétention de Sète aux Somaliens, à qui vous semblez désireux de faire bénéficier des prestations hôtelières nîmoises, je m'interroge surtout sur la dépense générée de plus de 18 000 euros par placement en centre de rétention (cette estimation effectuée par la CIMADE étant antérieure à la réforme du 16 juin 2011 et donc à l'allongement de 32 à 45 jours de la durée totale de rétention).
La police passant régulièrement au squat semi institutionnel des somaliens, du 4 rue Duguesclin (à Montpellier, NDLR), cherchant au fil du temps ceux pour qui l'obligation de quitter le territoire a plus d'un mois, ce petit jeu peut durer longtemps.
Mais comme la plupart du temps, ces personnes ayant un avocat, une demande d'aide juridictionnelle est en cours voire l'aide juridictionnelle accordée et un recours introduit, cela ne peut conduire qu'à l'échec du placement en rétention.
Si par extraordinaire un magistrat maintenait le placement en rétention et rejetait le principe du droit à un avocat et du caractère suspensif de la demande d'aide juridictionnelle, la Cour Européenne des Droits de l'Homme nous a rappelé l'an dernier son caractère effectif dans le dossier OAM / France concernant justement un Somalien de Montpellier.
Par jeu, je suppose, vos services se réfèrent à la jurisprudence OAM du tribunal administratif de Toulouse, justement sanctionné par la CEDH pour tenter de justifier le placement en rétention ... je comprends mal parfois l'humour au 4ème degré.
Cette question se pose très rarement toutefois : en l'absence de tout état civil fiable et de passeport, puisqu'il n'y a plus d’État, comment espérer reconduire ces Somaliens chez eux?
Ainsi, au pire, le Somalien en question restera 45 jours au frais de l’État, savourant la solidarité socialiste, avec peut être un léger goût amer.
Coût amer en tout état de cause, puis qu'en reprenant l'estimation CIMADE, plusieurs dizaines de milliers d'euros sont ainsi évaporés depuis le début de l'année pour tenter de faire croire que ces Somaliens seront un jour reconduit. Goût amer devant le sort fait à ces demandeurs d'asile, maintenus dans la rue, sans aide, niés, et la Convention de Genève relative au droit d'Asile bafouée ».