Résidents du Refuge, ils écrivent contre l'homophobie : le témoignage de Romain !
Par nicolas éthèvePublié le
Médiaterranée, le Refuge et MonRubanBleu® s'associent pour donner la parole chaque dimanche, à un jeune résident du Refuge. Au travers de leurs écrits, ils racontent leur histoire et leurs difficultés face à l'intolérance homophobe pour qu'elle disparaisse de ce monde. Aujourd'hui, nous vous livrons le témoignage de Romain.
Deux mois après la mort de Peter, ce jeune homosexuel que ses parents homophobes voulaient exorciser pour qu'il « change de bord », Le Refuge, MonRubanBleu® et Médiaterranée ont décidé de s'associer pour donner chaque dimanche de ces prochaines semaines, la parole à un résident du Refuge. Pour qu'ils puissent, chacun à leur tour, vous raconter leur histoire et leurs difficultés face à l'intolérance homophobe. Parce que l'écriture libère et transforme les êtres et le monde.
Après le précédent témoignage de Jordan, nous vous livrons ce dimanche 28 septembre, celui de Romain, un jeune de 20 ans qui a été mis sous la menace d'un fusil de chasse avant d'intégrer le Refuge où il est toujours hébergé.
Le témoignage de Romain
"J'ai eu une enfance avec une mère très prise par le travail, mais présente malgré tout, et un père totalement absent, parti à mes huit mois. Je suis issu de deux familles aux coutumes différentes : une mère algérienne, musulmane pratiquante et un père gitan. Bref, avec le temps, on grandit et on se fait une raison. Puis les années passent. Jamais une fille ne m'a attirée. Depuis mon plus jeune âge, je savais que j'étais gay.
Bien évidement, je ne le criais pas sur tous les toits. Quand j'en ai parlé à ma mère, sa réponse a été "c'est hallam, mais tu es pardonné car tu es un bon gamin..."
Puis à mes 12 ans, je suis tombé sous le charme d'un jeune homme de 17 ans. Nous sommes restés trois ans ensemble, il m'a fait vivre un véritable calvaire. Jaloux, je n'avais pas le droit de parler à un autre homme que lui. Il me frappait et m'a fait prendre de la "came" jusqu'à devenir toxico.
À mes 13 ans, j'ai appris que ma mère était atteinte d'un cancer du colon. Aucune solution, pour elle, les médecins étaient formels, elle allait mourir. Je décide alors de tout arrêter, y compris mes études, pour rester le plus possible à ses côtés. L'école étant obligatoire jusqu'à seize ans, les assistantes sociales et les éducateurs s'en sont mêlés et la justice m'a placé en famille d'accueil, puis en foyer.
En 2009, j'ai 15 ans, je rentre enfin chez ma mère, et, trois mois après, c'est la catastrophe ! Ma mère part rejoindre les anges. C'est à ce moment-là que mon père fait son apparition, comme une fleur au milieu d'un champ. C'est le début d'un nouvel enfer : je sers de bonniche, pour lui, je suis le plus grand de ses enfants, alors je dois m'occuper de mes frères et sœurs, faire le ménage, à manger, tel une mère de famille !
À mes 16 ans, je commence un apprentissage en coiffure, mais tout s'arrête très rapidement, car le salon ferme ses portes. Je décide alors de me lancer dans un apprentissage en alternance dans un centre équestre, où j'obtiens mon monitorat équestre.
À 18 ans, je décide de faire mon coming-out... Ça n'arrange pas la situation, bien au contraire. Mon père commence à me frapper, à m'insulter. Fort de caractère, je ne me laisse pas faire, je me rebelle. Chaque jour les disputes s'enchaînent et plusieurs fois par semaine, nous en venons aux mains, cela devient notre lot quotidien. Jusqu'à ce jour où mon père a sorti un fusil de chasse et l'a braqué vers moi en me disant "maintenant dégage, je n'aime pas les PD, les pédales n'ont pas leur place dans cette maison..."C'est à ce moment qu'une amie très proche m'a parlé du Refuge. Très craintif, j'ai quand même envoyé un SMS sur la ligne d'urgence. J'ai reçu très rapidement une réponse et une semaine plus tard, j'intégrais la délégation de Lille où la belle équipe du Refuge m'aide jour après jour. Bien plus qu'une équipe, c'est une famille pour moi ! J'y suis depuis quatre mois, j'ai repris mes études à la FAC et j'ai un emploi à mi-temps à la mairie de Lille. Jour après jour, j'essaye de reconstruire ma vie, que je partage aujourd'hui avec quelqu'un. J'ai vingt ans, je n'ai plus aucun contact avec ma famille et ce n'est pas plus mal. Un grand merci à toutes les personnes mobilisées pour nous venir en aide !"