Syrie: une cinquième année cauchemardesque (communiqué)
Par N.TPublié le
Les grandes puissances mondiales doivent préserver l’espoir, au lieu d’attiser les violences. La cinquième année du conflit en Syrie a été la pire pour la population : les parties belligérantes ont continué à semer le chaos, ont de plus en plus entravé l’aide humanitaire et ont multiplié les sièges de villes. La Russie, les États-Unis, la France et le Royaume-Uni doivent préserver la lueur d’espoir que le cessez-le-feu apporte à la population civile, au lieu de « mettre de l’huile sur le feu », mettent en garde 30 organisations humanitaires internationales et syriennes dans un rapport publié aujourd’hui.
« Si la poursuite des violences doit être principalement imputée aux parties au conflit, leurs soutiens internationaux doivent choisir : mettre fin à cette catastrophe ou continuer à l’aggraver ? Nous avons vu l’effet des frappes aériennes. La Russie, les États-Unis, la France et le Royaume-Uni ont, à des degrés divers, affaibli leurs propres engagements par des actions militaires directes, des soutiens militaires et politiques à leurs alliés respectifs et des pressions diplomatiques inappropriés », estime Jean-Patrick Perrin, chargé de plaidoyer humanitaire d’Oxfam France.
Ces quatre pays, membres du Conseil de sécurité des Nations unies et du Groupe international de soutien à la Syrie, doivent poursuivre un processus politique global pour mettre fin à cette tragédie entachant le monde depuis cinq ans. Les dirigeants mondiaux se trouvent face à un défi colossal. Ils doivent assurer que les combattants, ceux-là même que nombre de pays ont contribué à armer, fassent taire les armes.
Le rapport « De l’huile sur le feu » répertorie les différents domaines dans lesquels la situation s’est détériorée en Syrie. Alors que le fragile cessez-le-feu se maintient, la population syrienne est encore sous le choc de cette année d’escalade de la violence :
-Il y a eu une forte escalade de la violence, y compris compte tenu des frappes aériennes russes qui, selon l’ONU, ont fait 2 300 morts environ rien qu’en novembre.
-Au moins 50 000 personnes supplémentaires ont été tuées.
-Le nombre de personnes ayant besoin d’aide humanitaire a augmenté de 1,5 million.
-Près d’un million de personnes ont été chassées de chez elles par les violences.
-Le nombre de personnes vivant dans des zones en état de siège a doublé en un an. Elles sont aujourd’hui 500 000 selon l’ONU. Les organisations syriennes affirment que ce chiffre est beaucoup plus important.
-200 000 habitations ont été partiellement ou complètement détruites, soit une augmentation de 20 % par rapport à 2014.
-400 000 enfants supplémentaires ne sont pas scolarisés, ce qui porte le total à plus de 2 millions.
-Les attaques contre les hôpitaux et autres centres de santé ont augmenté de 44 %.
« Il faut cesser d’affaiblir les engagements visant à protéger le peuple syrien. En plus d’exiger le respect du cessez-le- feu et l’arrêt des attaques contre les civils, les membres du Conseil de sécurité des Nations unies doivent demander des comptes à ceux qui violent le droit international et mettre fin à l’utilisation aveugle des armes explosives à large champ d’action dans des zones peuplées. De même, malgré les besoins grandissants, l’action des ONG humanitaires n’a jamais été aussi difficile », estime Philippe Lévêque, directeur général de CARE France.
« Au cours des cinq dernières années, plus de 700 travailleuses et travailleurs de santé ont perdu la vie en Syrie. 2015 a enregistré le plus grand nombre d’attaques sur les établissements hospitaliers, avec au moins 112 attaques en une seule année. Nous espérons que les événements récents vont marquer la fin des déclarations et condamnations creuses. Il faut assurer un accès permanent aux soins médicaux pour les civils », souligne le Dr Ahmad Tarakji, président de SAMS.
Les populations restent privées de toute assistance dans de larges zones de la Syrie, où les organisations humanitaires continuent d’être interdites d’accès, attaquées ou harcelées par toutes les parties belligérantes. Les restrictions imposées à l’accès humanitaire sur le territoire contrôlé par le gouvernement syrien sont telles que seulement 10 % des convois de l’ONU ont pu passer.
L’accès aux communautés en état de siège reste limité. 200 000 personnes sont toujours bloquées dans la ville de Deir ez-Zour, sans aucune aide. Des marchandises sont acheminées au compte-goutte dans les autres zones assiégées, comme la ville de Madaya. En moyenne, en 2015, l’ONU a pu apporter une aide médicale à seulement 3,5 % des populations assiégées et une aide alimentaire à moins de 1 %.
La scorecard est disponible en français ici : http://oxf.am/Zhuj