Tunisie : Entre stabilisation et scénario à l’égyptienne
Par jcsPublié le
La classe politique tunisienne entame depuis quelques jours une série "marathonienne" de pourparlers, à la fois pour tenter de trouver un terrain d'entente consensuel et afin d’éviter un scénario similaire à celui vécu en Egypte.
Dans la nuit de lundi à mardi, un poste frontalier avec l'Algérie a été visé par un groupe de terroristes sans pour autant enregistrer de dégâts notables "grâce à une intervention professionnelle, efficace et instantanée des unités de la Garde nationale", a annoncé mardi le ministère tunisien de l'Intérieur.
D'après des analyses locales, le constat actuel en Tunisie augure d'une escalade de la violence et du terrorisme se référant principalement à deux assassinat en six mois (Chokri Belaïd en février, Mohamed Brahmi en juillet), plusieurs attentats à l'explosif en plus de la récente embuscade terroriste au montagne Chaâmbi près de la frontière avec l'Algérie (centre-ouest) causant la mort de huit soldats de l'armée.
Réunis en urgence jusqu'à une heure tardive de ce lundi, les partis de la Troïka (coalition tripartite au pouvoir), ont insisté sur "l'impérative nécessité de relancer le dialogue national dans les plus brefs délais tout en préservant l'Assemblée Constituante qui doit garder toutes ses prérogatives", comme l'a expliqué mardi Imed Daïmi, secrétaire général du Congrès pour la République, parti présidentiel membre de la Troïka.
Dans ce sens, la Troïka a exhorté le président de la Constituante, Mustapha Ben Jaafar à revenir sur sa décision de geler les activités de l'Assemblée jusqu'à la reprise du dialogue entre les différents partenaires politiques du pays. Une décision qui a surpris la Troïka mais fortement appréciée par l'opposition et la société civile.
Concertations et consultations
Au siège de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), le secrétaire générale de la centrale syndicale a reçu pour plus de quatre heures le numéro un du parti islamiste Ennahdha qui conduit la Troïka, Rached Ghannouchi : une réunion qualifiée de "positive et constructive".
Les deux hommes qui étaient à la tête de deux délégations respectives ont souhaité un prochain consensus sur une feuille de route politique qui fera sortir le pays de la crise qui le balaie. "La réunion n'a pas échoué puisqu'elle ne visait pas initialement, à trouver une solution et qu'il s'agit tout simplement d'une manche parmi d'autres qui auront lieu dans les jours qui viennent", a déclaré mardi le membre du bureau politique d'Ennahdha, Ridha Chaïbi.
"Jusqu'au 12 août 2013 tous les partis politiques, y compris ceux de la Troïka, n'ont pas atteint le degré de maturité requis pour être en mesure de trouver un accord pour sortir de la crise", a commenté M. Chaïbi lors d' un passage à la radio privée tunisienne Mosaïque FM.
Le principal organisme ouvrier du pays (UGTT) et le parti majoritaire au pouvoir (Ennahdha) se sont accordés sur la nécessité de préserver l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) de tout tiraillement politique, mais en l'obligeant à suivre un agenda "précis et bien déterminé" pour le reste de la phase transitoire.
Le point de jonction
Du côté de l'opposition, le "Front National de Sauvetage" (crée par des partis d'opposition après l'assassinat le 25 juillet 2013 du député-opposant Mohamed Brahmi) ne cesse de multiplier ses réunions dont la dernière en date (dimanche) a abordé sérieusement la situation de blocage dans le pays, les outils pratiques permettant de s'en sortir, en plus des actions à planifier les prochains jours.
Composé en majorité des partis de l'Union pour la Tunisie (coalition de cinq partis du centre-droit), du Front Populaire (coalition de gauche) renforcés par la société civile, le "Front National de Sauvetage" a déjà recherché la composition d'un éventuel "gouvernement de salut national", sa mission et les profils de ses membres.
L'actuelle situation en Tunisie est en quelque sorte au point de jonction entre deux champs : un premier, qui mène à la stabilité et au démarrage d'une nouvelle ère de construction (cela implique le consensus). Et un second, qui n'est autre qu'un raccourci vers le scénario égyptien.
Mais en Tunisie la facture serait plus lourde, vu l'incapacité des forces armées - déjà en état d'extrême alerte - à assurer à la fois la gestion des affaires courantes de l'Etat, dans l' attente des élections, et la préservation des frontières des menaces terroristes qui commencent à se rapprocher des zones peuplées.