Carla Del Ponte,  membre de la Commission d'enquête indépendante de l'ONU sur les violences en Syrie... (DR)

Syrie : armes chimiques et agression israélienne, la nouvelle donne

L’information, inattendue, est tombée comme un couperet… l’utilisation par les rebelles syriens d’armes chimiques, plus précisément de gaz sarin, un agent neurotoxique interdit par le droit international, sème le trouble dans la communauté internationale. Cette première conclusion de la Commission d’enquête indépendante de l’ONU qui intervient au moment où Israël attaque Damas crée une nouvelle donne.

Carla Del Ponte, ancienne procureure du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et membre de la Commission d'enquête indépendante de l'ONU sur les violences en Syrie, n’a pas tergiversé dans la communication des premiers résultats de sa mission. Selon elle, l’usage d’armes chimiques par les rebelles n’est pas discutable. Les témoignages recueillis et les indices relevés prouvent largement les faits, tout comme ils incitent à la réserve quant à l’usage de ces mêmes armes par les unités de l’armée syrienne. « Selon ce que nous avons pu établir jusqu'à présent, pour le moment ce sont les opposants au régime qui ont utilisé le gaz sarin », a déclaré Carla Del Ponté.

S’exprimant la veille sur le sujet, le président américain Barack Obama a insisté sur le franchissement d’une « ligne rouge » au sujet des armes chimiques, tout en se gardant d’accuser ouvertement le régime de Bachar al-Assad et en excluant clairement toute éventualité d’intervention des troupes américaines sur le territoire syrien.

Le même Obama s’est empressé d’affirmer le « droit à la défense » d’Israël suite à l’attaque au cœur du pouvoir syrien qui a fait 42 morts et des centaines de disparus parmi les soldats, vendredi et dimanche derniers.

Mais le président américain n’en est pas moins pris de court devant la conjonction précipitée de ces évènements. Tout comme d’ailleurs la France qui garde étrangement le silence devant les derniers développements.

Le fait est en effet qu’une chose au moins est sûre à présent : le soutien sans réserve aux opposants syriens a finalement pour premier résultat clairement établi le renforcement des capacités des milices du Front Al-Nosra et de la nébuleuse islamiste qui reçoit par ailleurs en continue le renfort de djiahdistes tunisiens et libyens lourdement armés. Tout ce beau monde serait en plus détenteur d’armes chimiques. L’hypothèse la plus cauchemardesque.

Et comme un malheur n’arrive jamais seul, l’entrée en scène de l’Etat Hébreu vient compliquer considérablement la donne. L’Algérie qui prend la juste mesure d’un retournement de situation à très haut risque tire d’ores et déjà la sonnette d’alarme. Le Conseil de sécurité de l’ONU est appelé à « assumer ses responsabilités pour mettre fin à ces agressions flagrantes qui aggravent un contexte régional déjà fortement dégradé ».

Les Etats-Unis et l’Europe sont tout compte fait pris au piège d’une situation imprévue pouvant déboucher sur un embrasement régional et une expansion des mouvements intégristes et donc de la force de frappe du terrorisme international. Il leur faut à présent trouver le moyen de composer avec la Russie et la Chine pour négocier une porte de sortie à Bachar al-Assad, éviter un conflit armé avec Israël, et contenir l’expansion des mouvements djihadistes. Un casse-tête, une nouvelle donne aux issues incertaines.